Highlights de la semaine #120 (Infinite Frontier)

Pour ces nouvelles Highlights, nous allons revenir sur cette deuxième semaine de sorties sous l’ère Infinite Frontier. Encore une fois, DC et ses créateurs proposent des débuts prometteurs pour leurs séries, en espérant que ça dure le plus longtemps possible. Le titre Batman de la semaine, Urban Legends, a eu droit à sa propre critique que vous retrouverez ci-dessous.

• Review VO – Batman – Urban Legends #1

LES COUPS DE CŒUR

Wonder Woman #770

Scénario : Becky Cloonan, Michael W. Conrad, Jordie Bellaire

Dessins : Travis Moore, Paula Ganucheau

Après un passage émouvant sur Future State : Immortal Wonder Woman, voici le tandem Becky Cloonan et Michael W Conrad sur le titre officiel pour ce renouveau Infinite Frontier. Et quel joli départ ! Les scénaristes profitent du nouveau statu quo post-Death Metal pour emmener Diana dans un univers quelque peu différent de ses habitudes : celui du Vahalla et de la mythologie nordique. Si, sur le papier, on peut rester plus ou moins sceptique, le résultat est franchement réussi. 

Cela fonctionne grâce à un univers asgardien très bien mis en place. Porté par des personnages sympathiques et assez attachants, il donne envie d’être exploré et approfondi, ce qui est toujours bon signe lorsqu’on découvre quelque chose de nouveau. On sent que Cloonan et Conrad savent de quoi ils parlent en termes de mythologie, comme on le remarque avec l’intégration de Ratatosk, une pièce fondamentale mais souvent négligée du mythe d’Yggdrasil. Cloonan et Conrad prennent également soin de forger quelques éléments mystérieux intéressants au niveau de leur intrigue, que ce soit avec Diana elle-même ou l’univers en soi, sur lesquels on espère voir un aboutissement satisfaisant. On espère que Cloonan et Conrad sauront rester sur cette voie, qui continuerait de faire d’eux des noms franchement prometteurs pour l’avenir de DC (même si on connait Becky depuis de longues années !).

Les dessins de Travis Moore sont également remarquables, et entretiennent l’univers du Vahalla. Les redesigns de grands héros asgardiens sont excellents, portant notamment une certaine esthétique super-héroïque plutôt séduisante. Comme à son habitude, Tamra Bonvillain offre elle-aussi un travail dantesque, continuant de montrer qu’elle reste l’une des meilleures coloristes de DC. Le back-up de Jordie Bellaire sur la jeune Diana est également plutôt sympathique, même si on ne comprend pas bien la raison de son inclusion. Est-ce pour teaser un éventuel titre orienté enfants autour du personnage ? A titre personnel, j’ai du mal à apprécier les dessins de Paulina Ganucheau, qui sont peut-être trop cartoony et enfantins à mon goût personnel. Mais si vous appréciez ce style, sans doute serez-vous séduit malgré tout.

– myplasticbus

The Joker #1

Scénario : James Tynion IV

Dessins : Guillem March

À l’annonce de la série Joker, j’ai réagi comme tout le monde : j’ai levé les yeux au ciel. Sur le principe, j’ai trouvé l’idée complètement nulle. C’était pour moi une capitalisation sur un personnage populaire et survendu qui n’apporterait sans doute pas grand chose. Et pourtant, plus j’y pense, plus j’ai adoré ce premier numéro de Joker. Car en réalité, ce n’est pas une série Joker. C’est une série Jim Gordon en feat. avec son Butzemann, le Joker. 

Là où la série réussit son coup, c’est d’abord dans son traitement des personnages. Plus que sur un plot en tant que tel, Joker est une exploration de la vie intérieure de Jim Gordon, de ses peurs, de son sentiment d’échec infini alors qu’il est un flic en retraite, à moitié sans le sou malgré toutes ses années de service. L’histoire en elle-même est secondaire, même si elle reste intéressante en tant que telle. La narration sert surtout de prétexte pour mieux disserter sur Gordon, et c’est tant mieux. Même si la proposition faite à Jim semble un peu aller loin par rapport au personnage, elle est crédible dans l’univers mis en place par Tynion IV et March. 

Cet épisode d’ouverture brille également par son ambiance noire et légèrement horrifique. Guillem March (pourtant loin d’être mon dessinateur favori) parvient parfaitement à représenter les tréfonds de Jim Gordon, notamment ses visions étranges du Joker. L’expressivité à la fois neutre et torturée qu’il donne au personnage principal renforce l’aspect d’homme sur la brèche, qui essaie de contenir son traumatisme tout en étant submergé. On ressent ainsi pleinement les choses avec Gordon, et c’est un vrai plaisir de lecture.

– myplasticbus

Rorschach #6

Scénario : Tom King

Dessins : Jorge Fornès

La série Rorschach de Tom King et Jorge Fornès continue son chemin, dans une indifférence générale assez marquée, mais pas nécessairement justifiée. Certains reprochent à la série sa simple existence en affront face à Watchmen, d’autres la réprimandent en disant qu’il ne se passe rien, et que rien n’avance au point que ce soit un gâchis des dessins de Fornès. Je peux l’entendre, mais je ne suis pas du tout d’accord. Car quand bien même il ne se passerait rien, à mes yeux, ce n’est pas nécessairement un problème. 

Rorschach est une exploration qui prend son temps, et le fait bien. Chaque épisode fonctionne comme une nouvelle couche de l’oignon, qui permet d’approfondir ce qui s’est passé entre Wil et Laura, les conduisant sur la voie qui est la leur. C’est un récit qui se maintient avec beaucoup de sensibilité et se pose comme une exploration psychologique sur fond de récit à mystère à ambiance de thriller néo-noir. Ce numéro 6, où un échange épistolaire entre un auteur et une fan se transforme en confessionnal poignant, le montre à merveille. 

Pour que cette histoire soit pleinement satisfaisante, il faudra faire en sorte que Rorschach parvienne à une conclusion tout aussi recevable. Mais il me semble que dans ce genre d’histoires, ce n’est pas tant le mystère qui doit primer que les personnages. Et avec ce sixième numéro, Tom King parvient à dépeindre Wil et Laura sous un jour toujours plus touchant et intéressant. À travers eux, il nous parle d’échec, de sentiment d’insuffisance, de l’origine du mal, et du lien qui peut unir deux personnes brisées au point de les conduire vers l’irréparable. Le travail de Fornès et King, malgré le retour d’une maladresse toujours aussi problématique (la fameuse cassette !), reste pour l’instant suffisamment qualitatif pour intéresser.

– myplasticbus

LES VALEURS SURES

Superman #29

Scénario : Phillip Kennedy Johnson

Dessins : Phil Hester

Jonathan Kent est enfin de retour parmi les siens ! Pour Phillip Kennedy Johnson, l’heure n’est pourtant pas tant à la célébration, mais plutôt aux mauvaises augures. L’auteur considère en effet ce retour avec pragmatisme en abordant le fossé qui sépare désormais père et fils, Jon ayant grandi sans lui dans une toute autre époque, et le temps perdu qui ne pourra jamais être rattrapé. Ce n’est pas forcément ce que l’on attendait d’une telle réunion, mais le propos se montre tout à fait pertinent et impactant grâce à une écriture honnête et une narration assez réussie.

On a pourtant avec ce premier numéro un sentiment de décompression assez important. En effet, ce Superman #29 se lit très vite, et pour cause : Johnson mise avant tout sur le dessinateur Phil Hester pour de nombreuses pages silencieuses. Si son trait atypique n’est pas déplaisant à l’œil, ses scènes d’actions manquent d’impact et d’originalité. Le numéro se révèle alors globalement plutôt austère, ce qui va néanmoins dans le sens de son propos. C’est intéressant, mais on espère que la suite (dans Action Comics) passera à la vitesse supérieure et se montrera un peu plus engageante. Grande nouveauté de l’ère Infinite Frontier, un certain nombre de titres voient leur prix et leur pagination augmenter pour insérer une nouvelle histoire en récit. Cette semaine, les projecteurs sont braqués sur le super-fan Bibbo, qui fait assez plaisir à retrouver tant on a peu l’habitude de le voir. Les intentions derrière un tel récit sont encore floues mais pas inintéressantes, et on appréciera le voir le supporting cast de Superman au cœur de cette nouvelle intrigue.

– Mocassin

American Vampire 1976 #6

Scénario : Scott Snyder

Dessins : Rafael Albuquerque

On continue dans nos aventures, enfin, notre aventure finale. Et si le tout se suivait de façon assez tranquille, on se retrouve ici face à un twist qui donne une toute autre orientation à l’histoire. C’est à la fois bien grossier, et bien intéressant. Cela permet de redonner un souffle au récit qui se déroulait sans accroche. Alors bien sûr, le twist part complètement en vrille pour que tous les personnages soient en danger en même temps, mais Snyder permet quand même de garder l’intérêt du lecteur grâce à certains détails. 

Et puis comme on le dit, le Diable se cache dans les détails, et ce sont les détails qui font le charme de cette série, en plus des personnages riches et attachants.

– Harley