Review VO – Batman : White Knight #1

Quelle lourde tâche que de critiquer Batman : White Knight #1. Le numéro qui est à mes yeux l’événement de l’année, oui, bien au delà de Dark Nights : Metal. J’aime Sean Murphy, son écriture rebelle et engagée, son trait parfois brouillon mais très puissant. Alors lorsqu’il nous propose une histoire où les rôles entre Batman et le Joker sont inversés sur fond de politique et de guerre médiatique, forcément, je n’attendais que ça. Maintenant, plus on s’approchait de la sortie, plus certaines craintes faisaient surface. Peur que l’auteur ne s’emballe, peur qu’il n’aille au contraire pas au bout de ses idées. Mais clairement, je ne suis pas déçue de cette lecture, et je vais revenir plus en détails dessus pour vous faire un bilan.

Une idée folle mais pourtant significative

Et si le Joker pouvait devenir un être normal et battre enfin Batman ? Voilà en gros le pitch de l’histoire. Sauf que Sean Murphy va bien plus loin. Nous ne sommes clairement pas dans le monde des héros et du Batman qui ne donne qu’une petite tape sur les fesses pour arrêter ses ennemis. Ici, c’est une bête sauvage que l’on ne peut arrêter. Une tornade de violence et de rancœur aux prises avec sa némésis le Joker, jusqu’au moment de trop. Le moment où tout dérape pour lui suite à ses excès de violence. On retrouve ici une image de Batman qui se fait plus régulière ces derniers temps, que ce soit au cinéma ou dans le run de Tom King, un Batman qui a du mal à se contenir et qui se prête facilement à la torture et autres joyeusetés sous le coup de ses pulsions violentes. Cette vision qui n’est pas celle d’un justicier droit dans ses bottes rebutera une nouvelle fois les fans du personnage, bien qu’elle soit une vision tout à fait logique lorsqu’on s’intéresse de près à la caractérisation du personnage et ses origines : la colère d’avoir perdu ses parents puis du crime qui envahit sa ville qui le transformeront en justicier. Ce n’est pas juste pour faire le bien, mais ici, Sean Murphy l’explique très bien à travers les discours tenus dans son numéros, c’est un Batman qui purge sa colère en combattant le crime et la violence par la violence. Une vision somme toute normale quand on est humain, la colère appelle la colère et parfois il devient difficile de la contenir. Je suis donc très heureuse que l’auteur ait choisi cette voie pour le personnage, le faisant quasiment devenir une bête dans les premières pages, soit un an après le début des événements, et je peux vous dire que je veux vraiment savoir comme il a fini dans cet état. Même si cela est facilement imaginable vu la noirceur qui l’habite au fil des pages qui lui sont consacrées.

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Alors pour contrer cette violence et cette noirceur, quoi de mieux qu’un White Knight ? Un génie qui se dresse contre cette image pour redorer son image mais aussi d’une certaine façon sa ville ? C’est là où frappe le génie de l’auteur : inverser les rôles pour une histoire inédite. Bien que les origines de ce White Knight me laissent dubitative, je trouve que son engagement et sa caractérisation donne un aspect nouveau à toute cette batmythologie que l’on peut suivre depuis de nombreuses années. Alors pour certains la pilule aura peut-être du mal à passer mais pourtant, le raisonnement de Mr Napier se tient de bout en bout. Abusé par tous lors de sa phase criminelle, il décide de se faire justice face à Batman et au GCPD pourri jusqu’à la moelle et aveugle face aux agissements du justicier. Mon problème : la rapidité d’exécution. Nous avons droit à plusieurs pages de course poursuite entre le Joker et Batman, une scène qui tiendrait presque de l’exécution publique, puis tout s’enchaîne très rapidement. Entre la période de soin et la période du génie qui sort de sa boîte il n’y a que peu de temps et cela me gêne beaucoup. Je sais qu’il s’agit là d’une introduction et séparer l’histoire en deux parties m’aurait encore plus agacée, mais c’est trop rapide. La pilule magique ne prend pas sur moi pour le coup et ça me laisse un peu perplexe comme dit plus haut. Maintenant, il est évident que ce génie charismatique m’a tapé droit dedans avec son discours et que l’auteur sait trouver les mots pour garder le lecteur attentif et prêt pour la suite. Nous avons aussi droit à une petite scénette placée là pour probablement justifier la violence du personnage, seulement elle est de trop. J’aurais préféré la retrouver en début de second numéro pour répartir un peu les révélations et rester sur l’image de Batman violent en me demandant pourquoi. Cette justification montrerait presque qu’au fond l’auteur veut justifier la caractérisation de son personnage d’entrée sans laisser planer de mystère et c’est dommage.

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Une merveille artistique

Le style de l’artiste (touche à tout) Sean Murphy a ses adeptes et ses détracteurs. J’avoue faire clairement partie de la première catégorie. Que ce soit sur l’aventure enfantine Joe L’aventure Intérieure, sur un récit d’horreur comme The Wake ou American Vampire Legacy, ou un récit qui lui est propre comme Punk Rock Jesus, sont style particulier me fait toujours de l’œil. Ici, c’est pareil. Le trait de l’artiste colle parfaitement à l’ambiance de l’histoire, et il s’en dégage une impression limite malsaine à la lecture. On sent une folie et une violence omniprésentes, un peu comme si on pénétrait dans un esprit torturé. A bien y regarder, c’est d’ailleurs le cas, on se retrouve dans l’esprit d’un Batman torturé et d’un Joker qui, bien que torturé physiquement, partira en guerre avec la rage qui lui est à nouveau donnée pour combattre l’oppression.

Je trouve la composition des pages assez simple, mais cependant, elle laisse la place aux parties les plus importantes sans non plus nous les faire sauter au nez au détriment d’autres parties secondaires où les dialogues sont plus importants que la scène elle-même. Les caractères des personnages sont également bien retranscrits au niveau de leur physique comme par exemple Bullock ou même le Joker lorsqu’il parle de sa relation avec Batman. Une relation d’ailleurs à son paroxysme avec un Joker qui met les mots exacts sur les sentiments et ce que l’on sait depuis longtemps. Ce qui frappe le plus reste à mes yeux la bestialisation de Batman dans les premières pages, surtout face à Mr Napier, les full pages sur l’histoire du Joker et sa solitude qui sont d’une beauté absolue, ou encore la naissance du White Knight en toute dernière page. J’aime cet artiste, et le retrouver sur un titre qui s’annonce assez riche, sombre et surprenant me plaît énormément. L’avantage, c’est qu’étant aussi l’auteur, il n’est pas limité dans son choix de création pour les pages, il gère tout de bout en bout, hormis la couleur réalisé par Matt Hollingsworth qui nous régale avec une palette diverse mais qui reste sombre et qui n’en fait pas trop.

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Pour essayer de reprendre un peu tout à la fois, ce Batman : White Knight #1 est un numéro très prometteur pour la suite malgré quelques rapidités et quelques éléments de l’histoire révélés trop tôt. Bien sûr, il faut adhérer à la vision de l’auteur et artiste qui n’est pas pour me déplaire mais qui fera crisser des dents chez certain*e*s fans des personnages impliqués dans l’histoire. Ces quelques pages à la construction efficace et faisant la part belle au talent artistique de Sean Murphy offrent une très bonne lecture, et j’espère que la suite sera des plus réjouissantes, surtout vu l’aperçu du futur qu’on nous livre en début de numéro.

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14 Commentaires
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The Bat
6 années il y a

J’ai beaucoup aimé ce numéro. Coup de cœur absolu. J’espère que la suite sera au moins aussi bonne que cette introduction.

Entre White Knight et le projet de Busiek qui arrive bientôt on ne peut pas se plaindre !

Mocassin
Éditeur
6 années il y a

C’est un bon premier numéro, c’est certain, et notamment par certaines idées et scènes assez puissantes (la confrontation Batman/Joker). Mais il n’en reste pas moins décevant sous bien des aspects, et ne tient pas toutes ses promesses. Murphy part vers la facilité en nous livrant un Batman complètement borderline : à partir de là, le Joker n’a pas grande difficulté à le présenter comme une menace. De plus, ce dernier manque de cohérence : on dit le guérir, alors qu’il n’a jamais été malade puisqu’il a choisi de lui-même d’être le Joker. Dommage, la promesse était belle.

Mocassin
Éditeur
6 années il y a
Répondre à  Harley

J’ai plutôt l’impression que la fameuse pilule lui a donné une intelligence accrue, rien de plus. Que ce soit ça ou ta théorie, ça n’en reste pas moins décevant en un sens, même si le propos de ce Joker est intéressant.

The Bat
6 années il y a
Répondre à  Mocassin

Batman n’a jamais été considéré comme une menace vu qu’on nous dit qu’il n’est même pas censé exister. En fait, tant que les citoyens savaient qu’il combattait le crime et qu’il contribuait à rendre les rues plus sures, ils ne cherchaient pas plus loin. En voyant la vidéo, le peuple s’est rendu compte de l’extrême brutalité du Dark Knight. Sans compter que Murphy sous-entend que ce sont les médias qui ont fait changer d’avis le peuple de Gotham. Même qu’il y a une petite critique des personnes qui critiquent tout et n’importe quoi de nos jours, notamment via les réseaux sociaux.

Le Joker n’a pas grande difficulté à le présenter comme menace maintenant que tout le monde a vu la nature de ce Batman.

De plus ce Batman extrêmement violent ne dérange pas vraiment. C’est le postulat de départ de cet elseworld.

Mocassin
Éditeur
6 années il y a
Répondre à  The Bat

Un postulat bien facile, alors que la promesse me semblait toute autre.

Twelve
6 années il y a
Répondre à  The Bat

100% d’accord avec ça. J’ai fait ce parallèle avec la police dont Sean Murphy dénonce le comportement. Batman est une figure de la loi (presque), et à partir de là ses agissements divisent le peuple en deux camps : ceux qui sont prêts à accepter la violence tant que ça les arrange, ceux qui ouvrent les yeux sur le comportement de Batman. Personne n’a jamais rien trouvé à redire sur cette violence, et rien de mieux que de le faire dire par son pire ennemi.

Twelve
6 années il y a

Première chose : les dessins sont tous aussi beaux que ceux teasés. J’apprécie particulièrement le jeu des couleurs, et y a un million de détails.

Pour le récit, c’est au top. A la rigueur, l’excuse de la pilule passe en second plan. J’ai pas particulièrement de problème avec un Batman aussi violent (et j’suis d’accord que l’explication tombe un peu comme un cheveu sur la soupe, toi aussi utilise des vieilles expression).

Mais je crois que ce qui m’a plu par dessous tout, c’est la dimension politique/philosophique du récit. On retrouve plein de thèmes tristement actuels : les violences policières, une critique d’une certaine utilisation des réseaux sociaux, les SJW.

J’espère sincèrement que le teasing de ces items seront développés dans les numéros à venir.

VRAI BON KIF.

mavhoc
6 années il y a

Comme toi, j’attendais ce numéro qui était l’événement de l’année à mes yeux, et même si je demeure confiant pour la suite, reste que ce numéro est quand même pas mal décevant à mon goût. Un Joker caractérisé avec la subtilité d’un Batman : Lego Movie, qui a une Origin Story fade au possible (adieu the « bad day », bonjour folie sans raison), qui n’est pas craint comme le monstrueux tueur qu’il est (la foule se presse pour critiquer Batman). Ajoutons à cela la thématique de la violence policière un peu mal amenée, Barbara et Dick en figuration, le coup de la pilule miracle … Ca fait beaucoup pour un premier numéro et vraiment, j’ai du mal à être totalement indulgent… A voir comment la série va avancer.

Bon par contre les références au dessin-animé et aux films sont géniales.

Witchdoctorseuss
Witchdoctorseuss
6 années il y a

En ce qui concerne le joker, je l’ai toujours vu comme un serial killer, individu assez dur à être défendu en soit; le joker présent dans cette histoire semble n’avoir jamais rien fait de tel, il est un peu comme le tissu rouge brandi devant le taureau-Batman. À partir de là, il est , en effet, assez simple de se mettre du côté de Napier, ce qui est plutôt dommage je trouve, j’aurais aimé voir ces interrogations et thèmes transposés dans un univers tel que celui de l’univers canonique.

KillingJoke
KillingJoke
6 années il y a

La grosse claque graphique et scénaristique.

Pour moi ce Batman violent ne me choque pas, celui de Miller va encore plus loin dans la violence.
Ici la personne étant la plus détestée de Gotham renverse tout un système de pensées. La police (et surtout Gordon) s’est caché derrière des illusions de justice beaucoup trop aisée en laissant Batman faire SA justice, le Joker est là pour rappeler qu’il y a des lois à suivre que nul n’est autorisé à passer au travers.

L’univers Batman est présent sans trop être rempli (pas trop de personnages annexes), j’attends de voir les rôles de Nightwing et Batgirl pour la suite.

Cielo
6 années il y a

J’ai bien fait de commander ce numéro visiblement :)

setois3
6 années il y a

La scène en question que l’on peut effectivement estimer prématurée a ce stade de l’histoire, me rappelle beaucoup Batman et Robin, j’ai adoré l’évocation d’un des éléments dramatiques de ce film et de son glacial super villain ?

nomalez
6 années il y a

Merci pour cette longue et passionnante review. Sean Murphy est devenu un artiste incontournable à mes yeux depuis que j’ai lu Punk Rock Jesus et savoir qu’il oeuvre sur Batman enjaille mon esprit. C’est très dur d’attendre la VF …oui, car je me fais une étagère à la gloire de Sean Murphy mais tout le monde OSEF^^ En tout cas l’idée de base du scénario me plait beaucoup! Urban, vite donner une date de sortie VF svp !! ^^

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