Review VO – Batman / Teenage Mutant Ninja Turtles #1

Les points positifs: Un gros délire nostalgique. Un graphisme solide. C’est jouissif. Les points négatifs: Le scénario tient sur un timbre-poste. Ne parle pas à toutes les générations. Personne ne dit « Cowabunga » pour le moment…

« Turtles… » – Batman

• Scénario : James Tynion IV – Dessin : Freddie E Williams II – Couleur : Jeremy Colwell

• DC Comics / IDW- Batman Teenage Mutant Ninja Turtles – 09 décembre 2015 – 24 pages – $3.99.

On ne va pas se mentir, le gamin des 90’s, né à la fin des années 80, que je suis, ne s’est plus senti de joie à l’annonce de cette mini-série. J’ai probablement passé beaucoup trop d’heures à imaginer des team-ups invraisemblables entre mes héros favoris, et ceux-là en faisaient clairement partie. Associer Batman et les TMNT pour aller casser la gueule à Shredder et à la rogue gallery du chevalier noir était d’ailleurs mon passe-temps préféré du mercredi après-midi. Mais rangeons tout de suite cette petite nostalgie mal placée, et attaquons-nous au premier numéro de cette mini en six parties. Est-il à la hauteur de nos attentes ? Aviez-vous réellement envie de lire ça ?

Soyons clairs : ce n’est pas du grand comic-book, et l’on se trouve en présence d’un titre créé dans l’unique but de raviver pour la énième fois la flamme de la nostalgie qui brûle dans le cœur de tous ces fanboys des années 80 / 90, fort à la mode en 2015, année de l’arrivée de Marty McFly dans le « futur ». C’est pour surfer sur cette mode qu’IDW publishing et DC Comics s’associent pour nous proposer ce petit crossover, qui rappelle clairement ce qui se faisait beaucoup par le passé (n’oublions pas les Batman vs Predator et autres Spawn / Batman). Ce n’est clairement pas plus ambitieux que ça, mais ça a le mérite d’exister. Les bases du scénario sont simplissimes : Batman est à la recherche d’un générateur de la société Powers (rappelez-vous de Batman Beyond, tout ça) et notre héros se rendra bien vite compte que le Foot Clan se trouve derrière tout ça. De leur côté, les Tortues Ninja ont établi leur repaire dans les égouts de Gotham, et ce dernier est bien vite découvert par Killer Croc, qui compte régner en maître sur les sous-sols de la ville. C’est loin d’être original, et ça ressemble étrangement à ce que j’aurais pu écrire à cinq ans, quand je jouais avec mes figurines Kenner et Playmates, mais honnêtement, ça fait le job.

Il est évident que le scénario ne repose pas sur une écriture subtile, mais ce n’est pas ce que l’on demande à ce comic-book, qui remplit sa fonction principale, à savoir être un pur produit de fan-service très divertissant. Et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il excelle dans cet exercice. Les combats sont franchement bien pensés, et il est évident que l’on prend plaisir à lire ce titre pour ce qu’il est. Batman qui casse du ninja du foot clan, c’est très jouissif, et très Frank Millerien dans l’esprit (ce qui est logique, quand on sait que les Tortues Ninja sont, à l’origine, une parodie du Daredevil de ce cher Frankie). De même, voir les Tortues se fritter avec Croc, c’est très fun et il faut avouer que ce petit combat de reptiles est bien fichu. En ce qui concerne la caractérisation des personnages, c’est à la fois efficace et caricatural, dans le plus pur style des années 80. Batman est dark, so freakin’ dark, et cherche à protéger sa ville coûte que coûte (je ne comprends cependant pas pourquoi c’est la version New 52 qui a été retenue) et les quatre ninjas sont fidèles à leurs versions post-dessin animé des 80’s (en gros, on est plus proche de ce registre comique, repris dans les séries qui suivent, ainsi que dans les comics de chez IDW, que du style über-violent de la première version du studio mirage). Ainsi, on a le plaisir de retrouver un Leonardo qui fait le leader, un Raphael totalement bourrin, un Donatello intello comme jamais et un Michelangelo débile, comme à son habitude. C’est d’ailleurs ce personnage qui m’a le plus intéressé dans ce bouquin, tant je suis client de cet humour bas du front et enfantin, qui a fait la réputation de ce redoutable manieur de nunchakus.

Ce qui fait le charme de ce premier numéro, c’est aussi la grande qualité de ses dessins. Freddie E Williams II signe des pages d’une grande beauté, qui sont sublimées par les couleurs de Jeremy Colwell. L’aspect graphique du numéro est incroyablement soigné pour un titre aussi anecdotique, et l’on sent une volonté de créer un petit événement, qui pourrait toucher un lectorat plus vaste que celui des lecteurs habituels de comics. On a donc droit à des images assez spectaculaires et à un storytelling très dynamique et cinématographique, qui rend totalement justice au script de James Tynion IV, qui rappelle clairement le style des dessins animés que l’on pouvait voir le dimanche matin. Ce comic-book apporte ainsi un peu de fraîcheur au milieu d’un paysage éditorial un peu aride, qui nous livre beaucoup de titres Batman qui se prennent clairement au sérieux, il est appréciable de lire cette histoire légère, illustrée par ces traits à la fois solides et cartoony, qui lui confèrent une véritable identité graphique.

Batman / Teenage Mutant Ninja Turtles commence donc plutôt bien, avec ce premier numéro plutôt bien fichu, dont le scénario repose certes sur un timbre poste, mais qui saura plaire aux nostalgiques de l’époque, ainsi qu’au jeune public assez familier avec ces personnages. Et puis franchement, associer le Dark Knight et les Tortues Ninja, c’est clairement un fantasme de gamin, alors pourquoi s’en plaindre ? On pourrait parler de plaisir coupable, mais pour le coup j’ai même envie de dire que c’est de qualité assez décente pour être lu sans honte. Alors un conseil, foncez. « Cowabunga le cri des ninjas », comme on dit (en plus, le cliffhanger, bien qu’évident, laisse présager de bonnes choses).