Review VO – Martian Manhunter : Son of Mars

Critique de Martian Manhunter - Son of Mars
Les points positifs :
  • Maîtrise narrative
  • Bonne compréhension du personnage
  • L’implication de la JLA
Les points négatifs :
  • Pas très beau
  • Dans l’ombre de la JLA

« I am and always will be an alien, what the writer Heinlein called a Stranger in a strange land. »


  • Scénario : John Ostrander, John Arcudi – Dessin : Tom Mandrake, Jan Duursema

Suite au succès fulgurant de la JLA de Grant Morrison à la fin des années ’90, DC Comics décidèrent, pour la première fois dans l’histoire, de tenter de faire vivre une ongoing autour du personnage de Martian Manhunter. En effet, hormis ses apparitions dans la Justice League au fil des années, on ne l’avait vu en solo que dans des back-ups de Detective Comics ou deux mini-séries, l’une hors-continuité écrite par le pas toujours très bon Gerard Jones, et l’autre en spin-off à la Justice League International, dans une démarche un peu similaire à celle qui nous intéresse ici. Aux commandes de ce titre, DC plaça John Ostrander, qui sortait couvert de louanges de deux longs runs très appréciés sur la Suicide Squad et The Spectre. Pour quel résultat ?

Contenu : Martian Manhunter (Vol.2) #0-9

John Jones pour certains, Bio Armor Jade Warrior pour d’autres ou tout simplement le Martian Manhunter pour la majorité, J’onn J’onzz est le quasi-dernier survivant de son peuple, les Martiens, décimés par une épidémie physique et mentale il y a des années. Accueilli sur Terre, il trouve auprès des plus grands justiciers des amis chers qui rendront son exil moins douloureux. Mais tout comme il n’a pas oublié Mars dans son coeur, Mars, et ce qui y est resté, ne l’a pas non plus oublié. Quels dangers attendent J’onn J’onzz ? Parviendra-t-il à sauver sa peau, tout en évitant à ses amis de la JLA d’être blessés ?

Une écriture complète et tragique des origines

Le passé de J’onn J’onzz sur Mars avait été peu exploré jusque là. J.M. DeMatteis le fit brièvement au cours de ses quatre numéros dans les années huitante, introduisant par exemple le dieu martien du feu H’ronmeer, mais le Martian Manhunter est resté pour l’essentiel le membre réservé au passé mystérieux. John Ostrander entreprend donc dès le début de son ongoing de soulever le voile sur les origines de Martian Manhunter, ce qui en fait une excellente introduction au personnage. On voit ainsi précisément dans quelles circonstances les Martiens, parmi lesquels la femme et l’enfant de J’onn J’onzz, ont été décimés ; puis comment J’onn J’onzz erra durant des jours, des mois, des siècles dans une solitude accablante ; avant d’être téléporté de force sur Terre par l’étrange machine du Dr Erdel – rejoignant ici les origines établies au Silver Age ; puis comment il suivit le quotidien du détective John Jones pour se familiariser aux moeurs humaines avant de prendre son identité dès sa mort.

Une excellente introduction au personnage, portée par ailleurs d’une compréhension exemplaire de celui-ci. Ainsi, dès les toutes premières pages, John Ostrander souligne la différence qui le sépare de Superman, malgré les points communs des deux extra-terrestres, car si Superman provient également d’une autre planète, il a été élevé sur Terre, à la différence de J’onn J’onzz, et se sent dès lors plus à sa place parmi les humains. En outre, Superman n’a pas assisté à la destruction de son peuple – J’onn J’onzz si. Autant de détails qui dessinent l’isolement de Martian Manhunter, mais également l’importance de la Justice League pour lui, puisque c’est pratiquement ses seules connaissances dans le secret de sa double-identité, sa seule famille – là où SupermanLois Lane, les parents Kent, son quotidien au Daily Planet, etc. John Ostrander insiste sur la nécessité pour J’onn J’onzz d’être reconnu par ses pairs de la JLA : « I can’t think of anything more central to my being. I am the league and the league is me. » Ce qui est d’autant plus intéressant d’un point de vue métatextuel puisque Martian Manhunter a toujours été, d’une certaine manière, le membre représentatif de la Justice League sous toutes ses déclinaisons – le seul qui n’avait pas de problèmes à part dans une ongoing pour l’appeler vers d’autres priorités.

Indissociable de la JLA

Cette importance de la JLA s’explique également par le succès que connaissait cette série-mère à l’époque. John Ostrander tente, de sa propre initiative ou de celle de son éditeur Peter Tomasi, de jeter des ponts vers le travail de Grant Morrison en reprenant des éléments qu’il avait insérés que nous pouvons difficilement mentionner sans spoiler des éléments-clés des intrigues de l’Écossais. Les membres de la JLA eux-mêmes ont une importance non-négligeable dans cette ongoing, particulièrement sur les derniers numéros de ce TPB lorsqu’une menace qui au départ n’était destinée qu’à toucher J’onn J’onzz s’étend finalement à l’ensemble des membres de la Ligue, menaçant de la déchirer. Comme si, même dans son titre solo, Martian Manhunter peinait à porter seul ses intrigues.

Pourtant John Ostrander trouve le moyen de tisser des histoires intéressantes. On retiendra par exemple sa tendance à écrire des méchants tombant rarement dans la caricature du personnage foncièrement malveillant. On voit par exemple un robot semant la destruction au Japon en mode automatique donc malgré lui ; on voit une extraterrestre emprisonnée à S.T.A.R. Labs contre son gré pour laquelle on ne peut s’empêcher d’avoir de l’empathie à cause de son existence d’animal en cage ; on voit un scientifique idéaliste convaincu de la nécessité pour l’humanité de se préparer à se diriger vers les étoiles dans l’hypothèse où un astéroïde venait à s’écraser sur Terre et à rayer toute vie de la carte. À chaque fois, les buts sont louables, mais c’est les moyens mis en oeuvre pour les atteindre qui sont répréhensibles et qui poussent J’onn J’onzz, parfois à contrecœur, à intervenir. Cette tendance à éviter tout manichéisme – hormis peut-être pour le grand méchant qui se dessine progressivement au fil du tome – donne une subtilité appréciable à cette ongoing.

La création d’une Némésis

D’ailleurs, ce grand méchant est amené de façon exemplaire. Exposé très tôt, il se dessine ensuite progressivement, prenant très lentement le devant de la scène, ce qui attise les attentes un peu de la même manière des intrigues qui préparent les arrivées de Darkseid comme The Great Darkness Saga. Quand enfin il se révèle, il représente un challenge de taille pour la JLA dans son ensemble. Cet exploit de John Ostrander a le mérite d’enrichir considérablement la mythologie du Martian Manhunter en lui dotant d’une véritable Némésis au charisme certain, capable de représenter un danger pour toute l’association de justiciers réunie.

À côté de ça, on retrouve plein de petites bonnes trouvailles qui pimentent le plaisir de lecture, par exemple l’idée selon laquelle J’onn J’onzz n’a pas qu’une seule identité civile – celle du détective John Jones – mais une large déclinaison. Ainsi le Martien joue parfois au Japon le rôle d’un super-robot également héros de son propre manga ; parfois aussi J’onn se met dans la peau d’un malfrat maladroit qui fait chaque fois capoter les plans de la bande qui l’engage à la suite de coïncidences malencontreuses, etc. Ces doubles-identités créent souvent une tension comique rafraîchissantes qui exploitent bien la capacité de J’onn J’onzz à prendre n’importe quelle apparence.

Bon mais pas très beau

En plus du goût de spin-off de la JLA qui revient souvent malgré les tentatives d’émancipation de John Ostrander, le gros défaut de cette ongoing est, à l’instar de nombreux autres titres de la même époque, les dessins de Tom Mandrake. Très hachés, garnis en longs traits, ils ont vieilli mais sans pour autant s’assimiler aux canons des années 90 – en soi un mérite. Mais s’ils ont de la personnalité, il faut reconnaître qu’ils flattent rarement l’œil du lecteur, autant dans les scènes d’action parfois agressives visuellement que dans les visages auxquels il donne parfois, Wonder Woman en tête, des airs de demeurés. Et ça me fait bizarre de critiquer Tom Mandrake parce qu’entre ses collaborations avec John Ostrander sur The Spectre et Martian Manhunter, je l’associe malgré moi à d’excellentes lectures mais, rétrospectivement, ce n’est vraiment pas leurs dessins qui me font y revenir souvent.

Le début de l’ongoing de John Ostrander forme un comic book très honnête qui exploite les capacités de Martian Manhunter autant qu’on aurait pu le souhaiter. Les ponts jetés vers la JLA sont à la fois un atout, puisqu’on a du plaisir à croiser ces visages connus, qu’un défaut, puisqu’ils empêchent l’ongoing de réellement battre de ses propres ailes. Elle n’est toutefois pas dénuée de qualités propres, lia avec maestria les petites intrigues des numéros individuels d’une super-intrigue à la tension croissante qui amène vers un excellent final sur les derniers numéros. On recommande, particulièrement à ceux qui auraient encore soif de JLA après avoir lu celle de Morrison, ainsi qu’à ceux qui s’intéressent au Limier Martien.

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1 Commentaire
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Aquaman
Invité
8 années il y a

Très bonne review qui vraiment envie de lire le TPB ^^

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superman
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