La sortie du film Black Adam a non seulement amené Dwayne Johnson dans la peau du personnage après plus de 10 ans d’attente, mais aussi la première apparition sur grand écran de la Justice Society of America. Pour leurs fans, c’est donc l’apothéose, mais pour ceux qui ne connaissaient pas encore cette grande équipe, voilà de quoi vous convaincre d’élargir votre plaisir en sautant le pas vers les comics de la JSA, tout en apprenant plus sur l’histoire de leur publication.
Le Golden Age et All-Star Comics (VO)
Les plus téméraires, ceux qui n’ont pas peur des vieux comics des années 40, pourront tout simplement commencer par le commencement. En juin 1940, All-American Publications et National Periodical Publications sortent en collaboration une nouvelle série anthologique, All-Star Comics, regroupant des histoires individuelles de plusieurs super-héros de chaque éditeur créés plus tôt dans l’année. Les deux compagnies finiront par fusionner en 1946 pour donner DC Comics. Dès le #3 de décembre, Gardner Fox et Sheldon Moldoff, des futures légendes du milieu, débutent le numéro par une réunion de tous ces héros, racontant chacun leur histoire. On y retrouve les premiers membres de ce qui est appelé la Justice Society of America : Hawkman en tête de proue, Flash, Green Lantern, Atom, Spectre, Hourman, Sandman, Doctor Fate et deux membres honoraires, Red Tornado (bien différent de l’image que vous avez) et Johnny Thunder.
Au début, les numéros consistent en des aventures solo dans une histoire commune, avec une conclusion de toute l’équipe réunie (les parties de Sandman ont été dessinées par Jack Kirby pendant quelques numéros, au passage). Vous y lirez la première apparition de Wonder Woman ou l’arrivée dans la team de Dr. Mid-Nite et Starman assez rapidement, puis Black Canary quelques années plus tard. Les membres se croiseront de plus en plus vers 1944, mais Dr Fate et Starman disparaissent de l’équipe, pour réduire le nombre de pages du magazine et étant les moins populaires du groupe (Hourman disparaît très vite également).
Cette série va continuer jusqu’en 1951, totalisant 57 numéros et voyant des super-vilains tels que Psycho-Pirate, Brain Wave ou Per Degaton (et finalement l’Injustice Society of the World) apparaître, avec des guests comme Wildcat, Mr.Terrific ou Batman et Superman (signant la première collaboration de la Trinité). Mais l’intérêt pour le super-héros s’amenuise et aura raison de la JSA pendant un moment, le titre devient alors All-Star Western. Seule Wonder Woman continuera d’être publiée durant les 50s, où certains héros seront remaniés quelques années plus tard comme Atom, Flash et Green Lantern.
Silver et Bronze Age : Crises et Multivers (VO)
Durant les années 60, le Spectre aura droit à son titre solo, mais les autres héros de la Justice Society of America ne seront présents que dans des team-ups multiversels avec les héros de la Justice League. Car oui, les aventures du Golden Age appartiennent désormais à Terre-2, comme le montre par exemple le très célèbre The Flash #123, « The Flash of Two Worlds », où les deux itérations du personnage se rejoignent le temps d’une aventure, lançant le concept de multivers pour la première fois. Après 12 ans d’absence, c’est dans Justice League of America #21 de 1961 que Gardner Fox, créateur des deux équipes, va débuter le rendez-vous JLA/JSA annuel, qui aura lieu jusqu’à Crisis on Infinite Earths, où les héros du Golden et du Silver Age découvriront d’autres Terres dont la Terre-3 du Crime Syndicate ou la Terre-X où l’Allemagne nazie a remporté la guerre. Ils sont regroupés en VO dans les volumes Crisis on Multiple Earths.
Les années 70 offrent à la JSA le retour de leur titre originel. Malgré All-Star Western, All-Star Comics reprendra au #58 en 1976 sous Gerry Conway et Ric Estrada pour 17 numéros. L’équipe est formée de Doctor Fate, Doctor Mid-Nite, Flash, Green Lantern, Hawkman et Wildcat, ainsi que trois jeunes membres regroupés sous le nom de Super Squad : le Robin de Terre-2 (et donc du Golden Age), Star-Spangled Kid et Power Girl, qui fait sa première apparition. C’est aussi le cas plus tard de Huntress, la fille de Bruce Wayne. D’autres membres reviendront spontanément pour affronter des vilains classiques de la JSA comme Brain Wave, Per Degaton ou Solomon Grundy, dans les pages de Paul Levitz, Keith Giffen ou encore Wally Wood. Lors de la DC Implosion, All-Star Comics se voit annuler, mais les histoires de Levitz continuent dans Adventure Comics #461 à 466.
All-Star Squadron et Infinity Inc.
Deux ans plus tard, en 1981, la JSA revient dans All-Star Squadron, une série qui nous ramène à l’époque de la Seconde Guerre Mondiale et où la Justice Society s’attache à d’autres héros du Golden Age pour former cette escouade susnommée.
Le grand Roy Thomas écrira 70 numéros de nos héros des années 40, et ils sont légion. Aux membres de la JSA s’ajoutent Johnny Quick, Liberty Belle, Plastic Man, Robotman, Phantom Lady, Shining Knight, la liste est longue et plus jamais quelqu’un ne vous dira qu’il n’y a pas assez de héros chez DC après avoir lu ces histoires, l’une de nos plus chaudes recommandations. La série s’arrêtera en 1987, mais une suite sur les jeunes alliés du All-Star Squadron, les Young All-Stars, sortira au même moment et continuera pendant une trentaine de numéros jusqu’en 1989.
De l’autre côté, Roy et Dann Thomas et Jerry Ordway sortiront Infinity Inc., un spin-off dans le présent sur la nouvelle génération qui suivra les traces de la JSA, et amèneront dans le lore cette idée d’héritage qui est chère à l’équipe et à l’esprit de DC Comics tout entier. Mis à part Star-Spangled Kid, qui leur sert de leader, l’équipe est composée uniquement d’enfants de la Justice Society ou ayant un lien avec eux : Jade et Obsidian (Green Lantern), Brainwave Jr, Fury (Wonder Woman), Huntress (Batman), Silver Scarab (Hawkman et Hawkgirl), Northwind (filleul de Hawkman), Nuklon (filleul d’Atom et petit-fils du vilain Cyclotron), Power Girl (cousine de Superman) et quelques autres membres qui rejoindront l’aventure en cours de route. Infinity Inc. sera publié jusqu’en 1988 pendant 53 numéros.
Enfin, une mini-série de 4 numéros nommée America vs the Justice Society sortira en 1985, toujours par Roy et Dann Thomas avec Jerry Ordway dans les parages. Toujours sur Terre-2, le journal du Batman de cet univers alors décédé semble dévoiler que la JSA est coupable de trahison lors de la WWII, s’inspirant des événements du faux journal de Hitler découvert en 1983.
Post-Crisis, retour laborieux sur Terre-1
Avec Crisis on Infinite Earths, fini le multivers et donc la Terre-2. La Justice Society of America est désormais dans la continuité de Terre-1 comme les héros de l’époque, les doublons comme Batman et Superman se faisant effacer. Pour éviter certains problèmes de cohérence, la JSA disparaît des publications : All-Star Squadron s’arrête pour laisser place à Young All-Stars, Infinity Inc. continue sans eux et le couple Thomas explique la fin de l’équipe dans Last Days of the Justice Society Special.
Pour la faire courte, Hitler utilise une arme magique nommée la Spear of Destiny pour tenter d’éliminer la JSA et de lier le sort de l’univers au Ragnarok de la mythologie nordique, Dr Fate fait alors fusionner les héros avec les Dieux Nordiques dans un combat qui ne fera que se répéter continuellement. Seuls 4 héros continueront d’être publiés jusqu’en 1992 : Dr Fate, le Spectre, Power Girl et Star-Spangled Kid.
C’est en réalité en 1991 qu’une nouvelle série de 8 numéros verra le jour, la première sous le nom de Justice Society of America. Écrite par Len Strazewski et dessinée par Rick Burchett, elle se déroule encore une fois dans le passé, en 1950, où ils combattent Solomon Grundy et les plans machiavéliques de Vandal Savage.
On les retrouve dans Armageddon : Inferno en 1992, la suite de l’event Armageddon 2001, où la JSA arrête enfin leur combat éternel. Ça a mené au deuxième volume de Justice Society of America, vite annulée après 10 numéros. Elle est dissoute à l’event de 1994, Zero Hour, les membres étant morts ou trop vieux pour continuer leur carrière. Bref, tout ça est laborieux, mais au moins vous êtes au courant.
Geoff Johns et James Robinson, le renouveau de la Justice Society
Justice Society : L’Age d’Or (VF)
Voilà le premier comics de la JSA que vous pourrez retrouver en VF chez Urban Comics. En 1993, James Robinson écrit une mini-série de 4 numéros appelée Golden Age autour de l’équipe et de l’All-Star Squadron juste après la fin de la guerre. dans ce récit considéré comme un Elseworld, nos héros tentent de trouver leur nouvelle place dans cette Amérique bouleversée et qui avance très vite, tandis que les secrets liant les super-héros et le gouvernement commencent à se dévoiler.
JSA (VO)
Le même auteur commence en 1994 les aventures du nouveau Starman pendant 80 numéros (un 81e sortira pour Blackest Night bien plus tard), avec quelques apparitions de la JSA ou de ses membres. Après une autre mini-série, JSA Returns, qui rend hommage aux premières publications et en se focusant sur certains personnages avec quelques guests créatifs de marque, il débute une véritable série JSA en 1999 avec en co-scénariste David S. Goyer (oui, le scénariste de Man of Steel, Batman v Superman, co-scénariste de The Dark Knight, mais aussi de Blade ou Ghost Rider 2, mais bref ici c’est bien). Dans le même temps, son ami Geoff Johns débarque dans les comics en écrivant Stars and S.T.R.I.P.E., un comics coming of age très sympa sur la nouvelle Star Spangled Kid, qui finira par prendre le nom de Stargirl. Le personnage va faire partie de la nouvelle vague de personnages à rejoindre la JSA, et Johns ne tardera pas à prendre la place de Robinson à l’écriture, dès le #6. Il sera seul scénariste à partir du #52 et jusqu’à la fin de la série, le #87, en 2006 à cause d’Infinite Crisis.
C’est le moment que vous attendiez tous, la JSA mélangeant les héros âgés et une jeune génération prête à honorer leur héritage, l’arrivée de Stargirl, d’Atom Smasher et de Black Adam, qui tente de faire le bien parmi eux et qui remet en cause la notion d’héroïsme. Cependant, comme vous pourrez le lire dans les comics Black Reign et Black Vengeance, tout ne se passe pas comme prévu.
JSA : le Nouvel Age (VF)
En réalité, l’œuvre de Geoff Johns continue dans la troisième série Justice Society of America en 2006, avec le dessinateur Dale Eaglesham. Encore 26 numéros d’histoires incroyables et touchantes autour du passage de flambeau entre la vieille garde et les héros en herbe. Flash, Green Lantern et Wildcat décident de reformer l’équipe une énième fois. C’est la première apparition de Cyclone, que vous verrez dans le film Black Adam, et ils ramènent également Damage, Dr Mid-Nite, Hourman, Liberty Belle (la fille de l’ancienne), Mister Terrific, Power Girl, Stargirl et un étrange Starman. Son run, indispensable, se termine après presque 10 ans et ce sera forcément avec une certaine émotion que vous en ressortirez, et en ayant grandi avec cette famille de héros (la dernière page de son run était même mon choix lors de l’article où les rédacteurs ont parlé d’une planche qui les avait particulièrement marqué). Malheureusement, la VF ne démarre qu’à partir de cette série (2 tomes disponibles, donc la partie de Johns), mais s’il faut lire un comics de la JSA, c’est bien celui-ci.
Le run continue avec Jerry Ordway au scénario comme aux dessins, puis par Bill Willingham et Jesus Merino avec de belles qualités. Marc Guggenheim reprend le flambeau à partir du #44 et jusqu’à sa fin au #54 avant les New 52, mais on s’en passera.
JSA All-Stars et Classified (VO)
Compte tenu de la popularité de la JSA sous Geoff Johns tout au long des années 2000, plusieurs titres sont également apparues. Le scénariste et David Goyer ont écrit 8 numéros de JSA : All-Stars en 2003/04 qui s’intéressent chacun à un héros de l’équipe (Hawkgirl, Dr Fate, Stargirl, Hourman, Dr Mid-Nite, Mister Terrific et deux numéros d’équipe). En 2005, JSA Classified reprend le même principe avec des histoires de 4 numéros sur un ou deux personnages vedettes, et ce pendant 38 numéros. En 2010, JSA All-Stars revient sous Lilah Sturges et Freddie Williams II, mais il s’agit d’un spin-off avec certains personnages qui décident de faire leur propre groupe, plutôt anecdotique.
Une autre mini-série sortie en 2004, JSA : Strange Adventures, retourne une énième fois dans le passé de la team, à l’époque de la guerre. Enfin, JSA vs. Kobra, sortie en 2009, est on ne peut plus explicite.
New 52 : Earth 2 (VF)
Lorsque DC décide de carrément rebooter son univers, la JSA passe à la trappe pendant quelques temps. En 2012, l’éditeur sort le titre Earth 2, avec le retour de nos héros remaniés, et aussi de James Robinson à l’écriture, accompagné de Nicola Scott aux dessins. Tom Taylor reprendra le flambeau plus tard, puis Marguerite Bennett entre autres. Dans ce monde où la Trinité a disparu, de jeunes héros se lèvent pour combattre la justice à leur place. Il n’est donc plus question de héros vieillissants, mais tout l’inverse, c’est donc une porte d’entrée très accessible, mais qui ne correspond aucunement à l’image qu’on se fait encore aujourd’hui de ces personnages.
La qualité de la série s’atténue avec le temps, notamment dans sa suite World’s End, puis Earth-2 Society, même si les derniers numéros de Dan Abnett sont peut-être un peu sous-estimés. 6 tomes sont disponibles en VF, sans la suite Society. Le dernier tome reprend l’event Convergence, qu’on ne vous conseille pas.
A sa fin en 2017, la JSA ne laissera que peu de traces de vie, à part un retour rapide dans Doomsday Clock par Geoff Johns ou dans Death Metal. L’auteur nous a promis l’année dernière le retour de la Justice Society en comics et c’est bien en novembre 2022 que le one-shot The New Golden Age lancera le nouveau titre JSA avec Mikel Janin le 22 novembre et la mini-série Stargirl : The Lost Children le 15 novembre avec Todd Nauck.
Voilà, pour résumer, les lecteurs VF n’auront pas trop de choix, mais il s’agira du meilleur à faire : le run de Geoff Johns (en partie). Les autres pourront se farcir toute son histoire depuis le début, s’intéresser à All-Star Squadron et Infinity Inc. ou bien opter pour les multiples portes d’entrée que font les différents comics nous plongeant dans l’époque du Golden Age.