Batman Rebirth tome 10 est une parenthèse particulière dans le run de Tom King. Le héros est confronté à plusieurs problèmes successifs qui lui permettrons de sortir de la dépression dans laquelle il est plongé depuis son mariage raté.
Sweet Dreams
Ce tome est composé d’un ensemble de récits indépendants les uns des autres, chacun illustré par un artiste différent. Dans le premier, dessiné par Travis Moore, Batman doit enquêter sur un meurtre, celui des parents du jeune Bruce Wayne, assassinés dans une ruelle, derrière un cinéma. Une mise en abîme intéressante et très bien pensée par Tom King qui donne sa vision de ce que serait devenu Bruce s’il existait déjà un Chevalier Noir. Ou tout du moins, ce que Bruce avait peur de devenir s’il n’avait pas embrassé le mode de vie qu’on lui connaît actuellement. Ce chapitre est le premier cauchemar d’une longue série.
Le second est l’occasion de rassembler King et Mitch Gerards, équipe créative derrière l’acclamé Mister Miracle, auquel une petite référence est faite en début de numéro. Le duo fonctionne à merveille. L’action est sublimée par les dessins aux couleurs sanglantes et aux formes dérangeantes. Ici, Batman est prisonnier de Professeur Pyg et tente de s’échapper. On entre dans sa tête et on observe chaque mouvement, chaque pensée, chaque sentiment. Ce second cauchemar est multiple : la peur d’aller trop loin, celle de faire tout cela pour rien, de mettre en danger son entourage, de n’avoir plus personne sur qui compter. Puis un souvenir qui commence à revenir. Celui d’un toit, d’une demande en mariage et d’une douleur énorme.
Et c’est dans la troisième partie que les choses commencent à s’assembler. Les deux premiers récits sont évoqués, mais aussi une réalité qui semble lointaine. On comprend que chaque chapitre fait en réalité partie d’un grand tout qui nous sera dévoilé par la suite. On nous fait voyager entre réalité et rêve. On continue d’explorer les pensées et souvenirs effrayants de Batman. Ici, une réalité utopique se transforme finalement en cauchemar. Les enjeux et le contexte sont maintenant fixés, Batman est piégé, seul, avec aucun moyen de s’en sortir.
Tomber pour mieux se relever
Tom King aime raconter les débuts de Batman et Catwoman. Et il ne s’en prive pas. C’est le sujet principal du quatrième chapitre. Si les éléments principaux restent inlassablement les mêmes, les détails autour varient selon le point de vue, selon le contexte. On en vient à penser à ces couples qui doivent perpétuellement raconter comment ils se sont rencontrés, question très fréquente lors des repas de famille. Cette fois ci c’est Catwoman qui raconte sa version des faits. Sur cette fameuse rencontre et sur tout ce qui s’en est suivi. A la manière d’un polar noir, Batman, incarné par The Question, essaye de comprendre. Car c’est la seule solution pour qu’il s’échappe de ce piège cauchemardesque. Jorge Fornes est excellent pour retranscrire l’ambiance de ce numéro. Les histoires semblent écrites pour chaque illustrateur, tout en servant le propos principal du récit global.
Il en va de-même pour le numéro suivant, quasiment muet, qui montre avec finesse la peur du héros de faire tout cela pour rien. Une course poursuite infinie contre le mal, à la manière de la course perpétuelle du Coyote pour rattraper Bip-Bip. S’en suit un chapitre plutôt banal. D’un côté, Catwoman et Loïs Lane font la fête dans la forteresse de solitude. Cette partie ne sert qu’à mettre en évidence la seconde partie, à savoir Batman et Superman qui s’ennuient, n’ayant aucune menace à combattre. Si ce numéro est en deçà des autres, le message n’en est pas moins important. Le plus grand cauchemar de Batman est de ne plus avoir à être Batman.
Et la conclusion en devient alors logique. Pour s’en sortir, il suffisait à Batman d’arrêter de se mentir. D’affronter et d’accepter son pire cauchemar, d’accepter la vérité. La dernière partie de ce tome amène l’élément manquant pour assembler le puzzle. Celui des différents cauchemars, mais aussi celui de la psyché du Chevalier Noir. Après être descendu plus bas que terre, il est temps, pour lui de se relever.
Batman Rebirth tome 10 vient conclure les péripéties post-mariage de Bruce Wayne. Il fait ici face à lui-même dans des chapitres indépendants, bien que finalement liés. La volonté de Tom King d’explorer la presque totalité des névroses du Chevalier Noir est claire. Et pour cela, il s’est entouré de dessinateurs de grand talent qui sont venu sublimer chaque numéro comme s’il avait été écrit pour eux. Cauchemars est un arc nécessaire et rédempteur pour le personnage écrit par King depuis le début de son run. Un nouveau chapitre peut alors débuter.
Comme toi j’ai adoré et en lisant un peu les retours sur Internet il semblerait qu’on ne fasse pas partie de la majorité.
En le lisant en VO, numéro par numéro, cet arc m’avait semblé un peu long et pas vraiment pertinent. Mais assemblé, je trouve qu’il a vraiment du sens. Et même sans parler de ça, j’ai trouvé que chaque mini histoire était vraiment agréable à lire indépendamment.Après je comprends aussi ceux qui ont eu du mal avec Cauchemars. C’est difficile à appréhender lorsqu’on cherche un Batman plus traditionnel.
Cet arc sorti du contexte oui j’imagine que ça ne doit pas être facile à lire ou à apprécier
N’est-ce pas le propre des travaux de Tom King d’être bien plus pertinents lorsqu’ils sont lus par arc ? En tout cas, j’ai une nouvelle fois adoré (et le tome suivant est tout aussi bon !)
Ce que j’aime particulièrement avec King c’est que chaque numéro a de l’intérêt indépendamment et garde une cohérence avec le reste du run. Après c’est le propre d’une série régulière d’être cohérent avec le reste de l’arc, pas seulement celui de King.
Pour ce qui est du tome 11, la review devrait arriver très prochainement. Mais si tu veux un petit teaser, je l’ai beaucoup moins apprécié.
Si ça passe d' »Excellent » à « très bon », je saurai te pardonner justafrogg…