Alors que Brian M. Bendis vient de lancer son épopée Superman, Nuclear Man vient toquer à la porte du monde des comics. Il n’est autre qu’un personnage improbable issu du film improbable qu’est Superman IV. Considéré jusqu’alors comme le pire film Superman de tous les temps, l’opposition Man of Steel/Batman V Superman vous semblera ridicule lorsque vous réaliserez de quelle situation le boy-scout s’est tiré.
Gouffre sans fin, dans un puits sans fond
Après l’échec qu’a été Superman III, ce Superman IV était sans espoir. Sorti quatre ans après le dernier volet, la production a changé du tout au tout dans l’espoir de procurer à la licence un vent de fraîcheur. Superman devait être dépoussiéré. Christopher Reeve ne voulait plus jouer Superman, mais avec quelques arrangements, et notamment une augmentation, il accepta. Le résultat : Superman IV a été le seul film à perte, estampillé Superman, malgré un budget bien amoindri. Superman III avait misé sur le comique et l’exagération, ce qui a fait couler la popularité du personnage, déjà en baisse. Ce Superman IV n’est pas dénué de bonnes intentions, malgré son échec assuré.
Le scénario propose quelques réflexions générales sur l’état actuel d’une société obsédée par l’argent et où la Guerre Froide est à deux doigts d’éclater. La question est : Quel est le rôle de Superman dans ce contexte géopolitique ? Quel est le rôle de Clark Kent lorsque le Daily Planet est sur le point de se transformer en journal à sensation ? Le tout accompagné d’une morale relative à l’argent et aux valeurs humaines. Si on peut penser que tout ceci est gentillet ou simplet, il n’en reste pas moins bienvenu et en accord avec l’image de Superman. Un autre point fait plaisir à voir. Clark est seul. Ses parents décédés, il doit vendre la ferme, mais insiste pour qu’elle reste une ferme. Malgré tous les défauts du film, cette scène, unique, parvient à faire ressentir le poids de cette situation. Malheureusement, le film ne se focalisera pas là dessus, mais sur la relation Superman/Clark avec Lois Lane/Lacy Warfield – nouveau love-interest, créé pour l’occasion et dont 45 minutes de romance ont été coupées au montage.
Un film en grande peine
Toutes ces bonnes intentions sont gâchées par le traitement assez simple, mais surtout par la réalisation et les moyens engagés. En guise de comparaison, Superman IV avait moins de la moitié du budget de Superman III. Avec ses petits seize millions, et un réalisateur ayant le vent en poupe à l’époque pour The Boys in the Company C et The Entity, Superman IV marquera la fin pour Superman jusqu’à Superman Returns en 2006. Ce qui est assez drôle lorsqu’on sait que la dernière phrase prononcé du film par Clark est « On se retrouve dans vingt ans« . Sidney J. Furie tombera dans la réalisation de nanars par la suite. Et cela n’a rien d’étonnant. Le film souligne toujours la dimension comique de la scène, ce qui enlève toute dimension spectaculaire aux affrontements.
Le manque de budget se fait ressentir à chaque plan. Cannon Film était dans une situation des plus délicates lors de la production de Superman IV. La production espérait se renflouer avec ce retour, mais le film n’a reçu que dix-sept millions sur les 36 octroyés par la Warner à l’époque. Ce qui rend bien plus compréhensible le résultat, et ses effets spéciaux, moins bons que ceux du premier volet. Les fonds verts sont tous ratés, et la partie des effets-spéciaux s’est révélé être un casse-tête infernal pour l’équipe de post-prod.
Nullité nucléaire
Superman devient l’ombre de lui-même. Il s’essaie même à reproduire le succès du premier volet (remake de la scène de vol entre Superman et Lois), et s’efforce de retrouver de son prestige à travers un film cherchant un ton sérieux. Il se met lui-même des bâtons dans les roues en s’imposant des personnages et scènes ridicules. Entre autres, le neveu de Lex Luthor n’est rien d’autre qu’une tentative d’inclure le stéréotype du jeune de l’époque. Ou encore, Nuclear-Man.
Ce tout nouveau personnage, interprété par Mark Pillow (qui n’a rien fait d’autre hormis quelques téléfilms), dans un costume évoquant bien plus le personnage parodique que le méchant à craindre. S’y ajoute son cri/rugissement, sorte de mélange du cri de l’éléphant et du jaguar ; et sa faiblesse ridicule qui en ferait un adversaire ridicule face à Batman. Ce grand méchant, qui mettra Superman à mal, possède un jeu d’acteur révolutionnaire se limitant à la grimace continuelle. À l’origine, l’équipe voulait utiliser Bizarro. Mais Superman III avait déjà usé du duel entre Superman et lui-même.
Superman IV est un film au budget grandement réduit, et qui, en plus de cela, se bat contre lui-même. Le film Superman III lui collait l’image d’un film comique, là où Superman IV tente de retrouver une dimension sérieuse. Superman cherchait à devenir objet de réflexion sur le monde, il est devenu un échec considérable sur tous les plans.
Merci de ce retour Fuful’ sur ce chef d’œuvre qui reste, à mes yeux, plus agréable et sympathique à visionner que Superman III. C’est drôle, Nuclear Man est hilarant et le film offre des images assez belles, malgré leur aspect irrationnel (je pense à la scène où Superman sauve Lacy Warfield dans l’espace).