C’est à la Wonder Con 2018 que l’éditeur DC Comics a annoncé la création d’une nouvelle ligne : New Justice, qui regroupera les titres Justice League, Titans, Teen Titans, et les futurs Justice League Dark, Justice League Odyssey et Hawkman. Cette nouvelle bannière représente en quelque sorte le terrain de jeu de Scott Snyder et ses copains James Tynion IV et Joshua Williamson, un territoire tracé par la conclusion du titre événementiel Dark Nights: Metal.
En effet, après quelques mois où l’auteur de Batman New 52 s’était fait relativement peu présent dans le paysage DC, il était revenu en force avec son compagnon Greg Capullo pour proposer un événement estival totalement barré centré sur Batman, avant que celui-ci ne prenne en ampleur jusqu’à concurrencer Doomsday Clock. Ce dernier, prévu pour être l’avènement de l’intrigue Rebirth lancée en 2016 et qui avait marquée le renouveau de l’éditeur, est en effet passé peu à peu dans l’ombre au profit de Metal, plus explosif, plus coloré, plus fou, plus apte à faire rentrer un maximum de sous. Au bout du compte, nous nous sommes retrouvés mercredi dernier avec une conclusion pour cet événement qui n’en est pas vraiment une, puisqu’il est indiqué au lecteur que tout ceci n’est que le commencement d’une nouvelle ère. Celle-ci nous est représentée par la destruction du mur de la source, littéralement la frontière du Multiverse, symbolisant l’affranchissement des frontières par le trio fou (Snyder, Tynion IV et Williamson), qui gagnent encore en importance et poussent leurs plans encore plus loin à travers New Justice.
Les conséquences de Dark Nights: Metal sur le DCU
Pour le dernier numéro de Dark Nights: Metal, Scott Snyder avait deux missions : conclure un récit aux proportions dantesques, et annoncer la prochaine étape de son plan sans fin. Un cahier des charges bien rempli et qui, comme on peut s’en douter, ne laisse pas de place à une fin réellement satisfaisante. En effet, au-delà d’avoir une résolution bien trop simpliste à un événement qui remettait pourtant énormément de fondamentaux en question, l’auteur laisse en suspens un grand nombre d’éléments introduits. Un choix qu’il assume pleinement puisqu’il déclare lui-même que certains mystères trouveront des réponses par la suite, et d’autres n’en trouveront jamais. Un parti pris pas très étonnant de la part de Snyder, reconnu pour finir ses histoires en queue de poisson. L’auteur, plutôt que de se concentrer sur un récit à la fois, préfère penser au futur, à ce que son récit pourrait amorcer de plus gros encore pour le DCU. Un besoin de laisser sa marque fort visible, notamment dans l’épilogue qui énumère succinctement toutes les conséquences qu’a eu cet événement sur l’univers DC.
On trouve ainsi le retour de personnage disparus et réintroduits lors de Metal, comme Hawkman, qui aura droit à son titre solo écrit par Robert Venditti, ou encore Hawkgirl et Martian Manhunter, qui rejoindront la Justice League de Snyder après No Justice (dans un nouveau Hall de Justice aussi teasé). L’auteur prépare également le terrain pour ses copains, comme Neil Gaiman qui s’apprête à revenir sur son Sandman Universe, expliquant que même le Royaume des Rêves a été touché, un livre de la bibliothèque étant manquant. On y trouve également le lancement de la nouvelle ligne New Age of DC Heroes, qui résulte d’une libération d’énergie provenant de la rupture entre les différents univers du Multiverse, créant de tous nouveaux héros. Mais le gloubi-boulga opéré par Snyder dans ce dernier numéro (et dans l’intégralité de son run diront certains) laisse place à des ramifications plus grandes encore. Comme il l’explique à travers des visions du futur expérimentées par Carter Hall dans la Forge, l’univers DC ne reviendra jamais à ce qu’il était avant, il a été changé par l’attaque de Barbatos. Ainsi, le 10ème métal utilisé pour vaincre le démon a donné naissance aux désirs de personnages, et les mythologies de certains personnages se verront étendues. On trouve notamment teasé le retour des Darkstars, un corps cosmique concurrent aux Green Lanterns, l’ajout d’un panthéon noir au monde de Wonder Woman, l’ascension d’Atlantis à la surface pour Aquaman, ainsi qu’une déclaration de guerre entre Barry Allen et Wally West. Finalement, et c’est là la ramification la plus importante pour Snyder, le mur de la source (constitué de chaque personne ayant voulu le franchir), la limite du Multiverse, a été brisé par ce déferlement d’énergie et ces ruptures entre univers, créant un moteur pour de nouvelles histoires.
Des connexions entre titres et époques fort nombreuses dont se félicite Snyder, ravi de ramener cette fibre à DC après que l’éditeur l’ait perdu pendant les New 52, une époque qui préférait regarder toujours vers l’avenir sans se soucier du passé selon lui. Comme il l’avait déjà expliqué par le passé, le but de Metal était de revenir aux gros événements du passé qui récompensaient les fans de leur amour pour ces personnages en les réunissant dans un monde secoué, menacé. Bien que Snyder prend en galon au sein de l’éditeur, le retour de ces liens à travers les ramifications d’un événement n’a néanmoins pas été imposé aux autres auteurs. Il explique en effet que quand il a expliqué à l’ensemble des équipes créatives de quelle façon allait se conclure Metal, nombre d’entre elles ont souhaité se joindre à lui. Ainsi, tous les éléments teasés à la fin de l’événement ont été apportés par les différents auteurs, qui pourront s’en servir quand ils le souhaiteront.
No Justice et New Justice : Vers l’infini et au-delà
Dès l’automne dernier, Snyder et sa clique pensent déjà à la suite des événements. A ce moment, il est déjà prévu que l’auteur de Dark Nights: Metal reprenne le titre Justice League, et que Williamson et Tynion IV l’accompagnent en parallèle. Sachant qu’il fallait également trouver le prochain événement estival de DC, le trio décide de faire d’une pierre deux coups et profite de ce timing pour créer une mini-série événementielle qui servirait de rampe de lancement à leur nouvelle vague de titres. Nul besoin de tergiverser sur la tonalité à emprunter pour la suite des événements, Snyder et compagnie choisissent de s’inscrire dans la droite lignée de Metal : du fun et de la couleur, en veux-tu, en voilà. C’est ainsi que naît No Justice, mini-série de quatre numéros écrite par Snyder et mise en page par Francis Manapul, qui a déclaré s’inspirer de Jack Kirby pour certains designs.
En voici le postulat : après la destruction du mur de la source dans Dark Nights: Metal #6, l’univers DC est plus grand et effrayant que jamais. Chacun réagira à cette nouvelle donne différemment : certains l’embrasseront, et certains réagiront avec crainte et violence, et cela à différents niveaux. Sur Terre, nous suivrons notamment Amanda Waller (accompagnée de Nightwing), la maniaque du contrôle, qui n’appréciera pas d’apprendre l’existence du mur de la source seulement une fois que celui-ci est détruit, signifiant l’émergence d’une foule de nouvelles menaces dont personne ne sait rien. Une situation qui la dépassera de loin, et ce n’est pas la seule, puisque même un être aussi puissant que Brainiac y réagira avec peur et viendra demander aux héros de la Terre leur aide pour défendre sa propre planète, Colu (après leur avoir mis une raclée, sinon c’est pas drôle).
En effet, la destruction du mur éveille également la crainte de quatre dieux cosmiques appartenant à la partie connue de l’univers, et qui représentent chacun une force fondamentale de l’univers : le Mystère, la Merveille, l’Entropie, et la Sagesse. Néanmoins, Brianiac estime nécessaire une redistribution des personnages dans quatre équipes reflétant ces forces. Il répartira donc les héros en fonction de leurs statistiques, de leurs pouvoirs, afin de former les meilleures équipes possibles, sans toutefois se soucier de leur personnalités et relations, ce qui créera forcément des réactions négatives de la part de certains. James Tynion IV et Joshua Williamson nous expliquent qu’il y eut de longues conversations sur la composition de ces équipes : il fallait trouver quels personnages incarnaient au mieux ces énergies (à la manière des maisons d’Harry Potter), qu’on nous décrit comme reliées à la vie même, régissant les relations, et entrant en conflit entre elles mais créant en même temps une harmonie. Mais surtout, ces compositions sont à l’image de l’ambition première de Metal et No Justice : une occasion de jouer avec les personnages comme jamais auparavant, de créer de nouvelles combinaisons plus folles que jamais, des relations jamais vues auparavant (comme Beast Boy et Lobo, un duo dont les auteurs semblent assez fiers). Pouvoir utiliser Starman, explorer l’histoire du père de Darkseid ou encore intégrer Bat-Mite au titre Justice League, voici autant de choses que Snyder veut pouvoir faire sans restriction, ce qui est désormais le cas.
Tous les ingrédients sont alors réunis pour préparer la suite des événements : le lancement de la nouvelle ligne New Justice, qu’on peut considérer comme le bac à sable de Snyder et ses acolytes. A l’instar de la destruction du mur de la source dans Metal, un événement d’importance conclura No Justice et affectera un nombre conséquent de personnages émotionnellement, et qui conduira à la formation de nouvelles équipes. Tout d’abord, la Justice League connaîtra un relaunch avec l’arrivée de Scott Snyder au scénario, qui poursuivra d’explorer les limites du DCU, accompagné de Jorge Jiménez et Jim Cheung. Pourvue d’un nouveau Q.G avec la fondation du Hall de Justice, sa formation se verra modifiée avec l’arrivée de Martian Manhunter et Hawkgirl, et la disparition de quatre membres : Aquaman, Simon Baz, Jessica Cruz et Cyborg.
Si les deux premiers ne retrouveront aucun équipe, les deux derniers intégreront le titre Justice League Odyssey, résultat d’une envie de longue date. Joshua Williamson, son scénariste, explique que l’opportunité vint de façon naturelle en travaillant sur Metal alors qu’ils y évoquaient le rôle de Cyborg, et sa place à la fin de tout ceci. Leur souhait fut de l’intégrer davantage au Multiverse et d’explorer son lien avec le Quatrième Monde, ce qui n’a jamais vraiment été fait auparavant. Et pour cela, qui de mieux que Darkseid lui-même, le seigneur d’Apokolips déchu (depuis Darkseid War) ? C’est le pari fou que fait Williamson avec Stjepan Sejic en établissant Darkseid comme un guide (comparé tout de même à Hannibal Lecter) d’une équipe également constituée de Jessica Cruz, Starfire et Azrael. Cette Justice League WTF, comme l’appelle Scott Snyder, explorera un des anciens vaisseaux de Brainiac qui contient son propre univers (une ramification de Metal et No Justice).
Si l’on compte des disparitions et mutations, un membre de la Justice League se dédoublera : Wonder Woman. Après avoir fait équipe avec des personnages liés à la magie dans No Justice, celle-ci mènera aux côtés de Zatanna une nouvelle version de la Justice League Dark écrite par James Tynion IV et dessinée par Alvaro Martinez. Composée de Swamp Thing, Detective Chimp et Man-Bat, elle devra elle aussi faire face aux conséquences de Metal et No Justice puisque la magie s’en est vu troublée, ce qui amènera ses créateurs à venir en reprendre la possession. Selon l’auteur, une bonne partie des personnages liés à l’univers magique de DC seront également de la partie, comme Constantine, ou encore Doctor Fate et Etrigan, qui feront eux aussi partie de l’équipe Merveille aux côtés de Wonder Woman et Zatanna pendant No Justice. Leur absence de la Justice League Dark sera une conséquence directe de la mini-série, mais ceux-ci tiendront toutefois un rôle majeur dans le titre.
Se retrouveront dans les Titans différents membres des équipes de No Justice : Beast Boy (Team Entropie) et Raven (Team Merveille), qui seront bien évidemment menés par Nightwing, qui aura sa propre mission sur Terre pendant les événements de la mini-série. Dan Abnett, toujours à l’écriture du titre, conservera Donna Troy de la formation précédente, et y ajoutera Miss Martian, qui fera son retour peu après son oncle. Finalement s’ajoute Steel, mais avec sous le costume Natasha Irons, la nièce du porteur original. Les répercussions de No Justice se feront sentir dès le Titans Special #1, dans lequel un virus mettra en ébullition les pouvoirs des méta-humains non nés avec, ce qui forcera Nightwing à établir une nouvelle composition de l’équipe. Puis, dans le semi-relaunch du titre, à partir du numéro #23, ce seront face à de nouvelle armes créées à partir du métagène pandémique.
Les Teen Titans connaîtront également une nouvelle composition quand, suite à No Justice, Damian Wayne se rebellera et décidera de créer une nouvelle version de l’équipe qui jouera selon ses règles plutôt que de suivre un ordre établi. De l’équipe originale ne subsistera que Kid Flash, qui sera cette fois-ci accompagné de Red Arrow (Emiko) et trois nouveaux personnages : Crush, la fille de Lobo, ainsi que Djinn et Roundhouse. Ce renouveau sera signé Adam Glass pour ce qui est du scénario et Bernard Chang pour les dessins, et ce, à partir du numéro #20 où, sous le nouveau Q.G de l’équipe, Damian cachera un secret qui devrait changer à jamais notre perception du personnage.
Bref, Snyder n’a pas besoin de plus de titres pour démontrer le pouvoir qu’il possède désormais chez DC. C’est désormais lui et ses complices qui semblent mener la danse pour l’avenir de l’éditeur, et non plus Geoff Johns, qui avait pourtant entamé la période Rebirth, et largement participé à son succès. Nul ne sait aujourd’hui quelle réelle importance sera donnée aux plans des deux auteurs, qui malgré les apparences, pourraient ne pas être mutuellement exclusifs. Après tout, DC Comics pourrait avoir laissé Scotty tirer ses plans sur la comète le temps que Doomsday Clock parvienne à sa fin et amène de réelles conséquences pour l’univers. Quoi qu’il en soit, il va falloir composer avec la fibre plus grandiloquente et colorée de Snyder pour encore un moment, et même si Metal n’a pas su se montrer réellement convaincant, l’espoir est encore permis pour la suite. Après tout, les intentions sont loin d’être mauvaises, et New Justice réunit tout de même en son sein des talents qui ne demandent qu’à s’exprimer.
Ça vaut pas Michael Cray…
Rooh t’exagères Blue, il va avoir de bonnes séries dans le tas.
Si sa se trouve sa sera du même niveau que Morrison.
« Brainiac y réagira avec peur et viendra demander aux héros de la Terre leur aide pour défendre sa propre planète, Colu (après leur avoir mis une raclée, sinon c’est pas drôle). »
J’ai ri xD
Sinon je suis d’accord avec toi pour Doomsday Clock, vu qu’il va falloir attendre encore 1 an avant que sa finisse, DC veut combler cette attente par une autre direction vu que les intrigues liée a DC Rebirth dans les autres titres sont déjà fini en avance.
Doomsday Clock, dans un an ? Tu est optimiste toi ^^
J’ai toujours trouvé que Metal était tout de même injustement trop rabaissé en critiques. Certes ce n’est pas d’un niveau extrême, mais il y a pas mal de bonnes idées et surtout une envie de changer un peu les choses et de ne pas faire une simple pseudo crisis ou je ne sais quoi. Enfin, comme d’habitude sûrement une divergence d’opinion ^^.
Pour ce qui est de No Justice et New Justice je ne sais pas trop quoi en penser. Même si personnellement j’ai hâte de voir ce que ça va donner, le projet est basé sur Metal et comme pour certains Metal n’est pas bon, on partirait déjà sur des bases faibles pour un event qui marquera DC…
Personnellement ce qui me fait surtout » peur » c’est le coup de Darkseid. Je ne sais vraiment pas ce que ça va donner, mais c’est peut-être le seul petit point que j’appréhende ^^
la meilleure blague ça reste l’idée qu’il y aurait une « intrigue Rebirth ».
Très franchement, merci bien pour ce très beau dossier, particulièrement instructif et qui réussit là où DC échoue : émoustiller le lecteur pour la suite !
Merci beaucoup pour le dossier très intéressant pour le lecteur FR qui n’avais pas connaissance de toute la répercution de l’event de Snyder.
Je préfère attendre la vf pour tout assimiler correctement et me faire un avis définitif sur Metal, mais le mec avait clairement de grosses ambitions en deboulant chez DC.