Après trois numéros rappelant ô combien l’intervention de Cave Carson est importante, il faut dire que cette quatrième partie de Milk Wars se faisait grandement attendre. Que vaut donc ce duo plus qu’étrange entre Cave Carson et Swamp Thing ?
Stranger Milks
Le scénariste de Cave Carson Has a Cybernetic Eye, Jon Rivera, s’attaque à une lourde tâche que celle de présenter l’association entre deux personnages en marge de leur univers respectif : Cave Carson et Swamp Thing. On ressent toute l’originalité du concept par la présentation d’un héros inscrit dans les droites lignes éditoriales avec une représentation bureaucratique, qui se plie aux codes de l’entreprise et, instinctivement, s’enferme dans ces codes. On se retrouve quelque peu enfermé dans cet espace de bureaux made in 80’s, avec tout le potentiel pour nous faire une scène digne d’un Matrix premier du nom, ou un huis-clôt oppressant, mais rien de tout ça. L’histoire se dirige vers une succession de cause-conséquence amorcée par l’arrivée de Swamp Thing, qui éveillera un esprit de rébellion. Ce qui entraîne un sacré manque de rebondissements avant un final brillamment (et le mot est juste) réussi.
L’usage d’éléments fictifs semblent désorienter Jon Rivera, qui passe à côté de l’écriture de Swamp Thing. Le personnage perd autant de son allure par l’écriture que par la représentation graphique qui lui est attribuée. Une écriture simple, avec quelques légères touches d’humour qui n’ont pas lieu d’être, et une forme rappelant le design de Justice League Action, et il nous semble ne se tenir devant nous qu’un outil factice ayant le nom et l’apparence de Swamp Thing, sans pour autant qu’il s’agisse réellement du personnage.
Deus Ex Natura
Autre problème avec Swamp Thing, le personnage DC Comics/Vertigo ne trouve sa place que dans sa capacité à sortir Cave Carson et son équipe de leur situation d’hypnose. Et tout le numéro ne reposera que sur cet objectif, là où les numéros précédents relevaient plus d’une conscience des personnages de leur rôle et cherchaient une solution pour dépasser leur statut. Une véritable force se dégageait des personnages, alors que Cave Carson et Swamp Thing ne restent que des pantins malgré leur action contre la menace censée tenir un contrôle fort, et où les rouages et la critique contre l’industrie est bien plus forte que dans n’importe quel numéro précédent.
C’est bien ce dernier point qui permet au titre de se démarquer et sortir la tête de l’eau, alors que Langdon Foss peine à livrer un travail homogène. L’artiste a tout de même déjà réalisé un travail assez impressionnant sur le titre Winter Solider, et à participé à l’élaboration de quelques numéros. Il arrive chez DC avec ce premier travail agréable, mais trop irrégulier. On sent bien le potentiel de l’artiste sur certaines scènes qui nécessitent un travail phénoménal, une certaine minutie dans la représentation de nombreux personnages ou la destruction d’une enveloppe corporelle – certains personnages étant composés de lait. Mais d’autres scènes, souvent des temps morts, paraissent bâclés. Le style n’aide en rien la charge de travail que l’artiste s’impose. Langdon Foss est un très bon artiste, mais qui trouverait bien plus son compte et s’épanouirait bien mieux dans un univers qui lui est propre et où il pourrait achever son travail. Ce qui est bien regrettable pour un label comme Young Animal.
Cet avant dernier numéro est un passage obligatoire pour le final qui s’annonce grandiloquent, mais est bien une douche froide comparé à l’attente créée suite aux premiers numéros, de très haute qualité. Néanmoins, il est toujours aussi plaisant de découvrir une nouvelle vision du contrôle de la retcon et une critique pointue du système de production de comics en tant que forme d’art. Un thème qui gagnerait à être encore plus mis en avant. Mais j’attends cela pour le prochain et dernier numéro.