Dernier cheval de course chez Vertigo, The American Way et son titre à rallonge semblaient tout droit sorti de l’esprit de David Simon, et je ne dis pas cela uniquement pour les premières pages se déroulant à Baltimore, mais pour son rapport très étroit avec la drogue. Après les événement de la série principale de 2006, publiée chez Wildstorm, ce qui pouvait être attendu comme un spin-off se révèle être une suite tout aussi intéressante.
Pour commencer son scénariste, John Ridley retrouve le dessinateur de cette première série, George Jeanty, ce qui assure déjà une parfaite association/intégration par rapport à la série précédente. A la manière des Watchmen, les héros sont particulièrement mal vus au sein d’un système social où l’image du héros n’est rien d’autre qu’une illusion affiliée au rêve américain. Société en pleine désillusion, axe justement cette série vers le désire de vengeance, de revanche, et d’agir pour manifester une pensée indépendante. Exprimer le désir d’indépendance. Le rapport à la drogue au final n’apparaît que comme déclencheur dans ce numéro, pour amener à un nœud duquel devront agir divers personnages présentés, et retrouvés ici. Ce qui rend ce numéro à la fois accessible aux nouveaux lecteurs comme nécessaire à ceux ayant déjà lu la série précédente, sans effet de redite pouvant donner au numéro quelques effets de lourdeur.
L’effet de désillusion modifie l’image de la série, qui sonne comme une seconde saison plus mature, où héros et humains se retrouvent au même point. Aucune supériorité n’est ressenti dans l’écriture. Le détenteur de pouvoirs n’est pas mis en avant, montré en exemple, bien au contraire. Les pouvoirs ne sont usés que comme des armes et n’influent en rien sur la personne, plongé dans un éternel doute, ou enfermé dans une certitude la poussant à agir. Une belle panoplie de personnages sont présents, leurs écritures donnent un aspect très réaliste à la chose. On peut néanmoins autant reprocher la sensation de ne pas plus approfondir les causes de ce qui arrivera par la suite et dans d’autres développements, comme on peut apprécier les nuances crées avec le rapport entre les forces de l’ordre et le ghetto, comme entre Willie et un groupuscule s’en prenant aux dealers. Une nuance manifestée par un racisme réciproque, rarement mis en avant dans les comics.
Du point de vue des dessins, nous sommes entre le comics classique et la patte Vertigo. Il s’agit d’une très belle réalisation pour un comicbook issu de l’indé pour son style qui pourra amener les lecteurs de super-héros basique à lire du Vertigo et de l’indé. Un lien parfait par les thématiques et une écriture nouvelle du super-héros, et d’un monde réaliste possédant une vision à laquelle le scénariste se tient. L’action est rapide et intense, les couleurs sont sobres, dynamique sans être impressionnant, George Jeanty use de certains outils de représentations classiques pour rendre ses personnages charismatiques. Cela fonctionne malgré tout, et le plaisir de lecteur n’en est pas réduit.
American Way : Those Above and Those Below #1 se démarque pour son aspect bien plus réaliste, et un nouveau questionnement du statut de héros en tant qu’outil politique et représentation d’un mauvais aspect du pays. Inclus comme élément de la vie courante, le citoyen lambda y joue finalement un rôle important. John Ridley semble avoir trouvé de quoi faire pour explorer de nouvelles contrées en ce qui concerne l’étude du super-héros. Une bonne série en perspective qui saura plaire à tous.