Review VF – Wonder Woman Rebirth Tome 1 : Année Un

Abondance de biens ne nuit pas, dit le proverbe, mais comme beaucoup de ces vieilles paroles probablement pleines de sagesses, le contraire se vérifie parfois. Par exemple mon ressenti aurait il été un peu meilleur (bien qu’il ne soit pas foncièrement mauvais) si nous n’étions pas, en ce moment abreuvé d’origin stories concernant l’Amazone ?

Et pour cause entre le premier tome de Wonder Woman Dieux Et Mortels, Wonder Woman Terre Un, Le film et l’ouvrage qui nous intéressent, ce sont immanquablement autant de points de comparaisons dont pourrait potentiellement souffrir ce premier tome marquant l’entrée de Wonder Woman dans l’ère Rebirth. Oui, je m’interroge car si j’ai bien aimé ce livre, je n’ai pu m’empêcher de me dire qu’il était moins bien que Terre-Un et très semblable au film… Mais j’y reviendrai…

On retrouve dans le livre le contenu du deuxième TPB Rebirth consacré à la princesse en VO c’est à dire les numéros #2-4-6-8-10-12-14 du comics original. Car comme vous le savez, la publication bi-mensuelle oblige a faire intervenir deux dessinateurs et le choix qui a été fait pour cette série à été d’alterner deux intrigues selon les équipes créatives. Celle ci narrant les débuts de Diana dans le mondes des hommes et s’intitulant Année Un est la conséquence de la remise en question de ses origines dans les numéros impair intitulés Les Mensonges.

Et donc nous retrouvons une Diana qui grandit insouciante sur l’île de Themyscira en parallèle d’un Steve Trevor qui lui suit sa formation militaire de façon un peu moins insouciante… Les deux vont se rencontrer lors du crash de l’avion de Trevor sur l’île des Amazones. Il faut donc une championne pour raccompagner Steve chez lui et affronter une secte terroriste et la méfiance du monde des hommes…

Et dit comme ça, ça va vous rappeler pas mal de souvenirs, voire vous paraître redondant. Et en effet dans les grandes lignes ces origines sont assez classiques. Classiques mais réactualisées juste ce qu’il faut pour être respectueux de celle qui est devenue un mythe du comics. En fait j’ai l’impression que Greg Rucka a pris le problème par le bon bout en en tentant une relecture complète de la genèse de Diana. Il a eu l’intelligence de respecter le canon tout en changeant une partie de la forme. J’en veux pour exemple, la façon dont la fabrication du jet invisible est abordée, et sa disparition, hommage intelligent et moderne à un élément qu’il aurait été difficile de pérenniser de façon crédible. De même, il parait évident à l’heure actuelle que les premiers adversaires de la princesse Amazone soient des terroristes, instillant une méfiance dont Diana elle même est la victime. Une juste réactualisation de la menace belliciste qui a toujours accompagné les débuts de Wonder Woman.

Le pendant de tout cela c’est qu’un trop grand classicisme flirte avec la frilosité, alors où se situe la ligne rouge, à vous de juger. Pour moi cela évite de se retrouver avec un charcutage en règle façon secret origins et cela me va. Par contre, il y a un détail vraiment gênant : pourquoi Steve Trevor se met toujours torse nu ? Est ce un contre-pied à la représentation parfois sexiste de la femme ? Dans ce cas je doute de l’efficacité de combattre le stéréotype par un autre stéréotype…. Ou bien une volonté de le transformer en toy boy ? Toujours est il qu’il ne manque pas une occasion de tomber la chemise.

Par contre le personnage de Barbara Minerva est formidablement actualisé en chercheuse à la recherche des Amazones sous les quolibets et manipulée par les Dieux et plus anciennement par son père. D’ailleurs si l’Olympe est forcement impliqué en arrière plan, il se fait discret, nul doute qu’ils apparaîtront de façon plus ostentatoire dans le futur de la série car tout cela sent la manipulation à plein nez.

Aux dessins on retrouve Nicola Scott qui est une de mes dessinatrices favories et dont j’avais adoré la participation sur la série Earth-2. Colorisé par Romulo Fajardo Jr, son trait prend une tout autre dimension. Il est moins mainstream et gagne en personnalité, peut être les longs mois passés depuis la dernière série que j’avais vu d’elle lui ont permis de mûrir son style, ou bien a-t-elle été fortement inspiré par Diana mais les dessins sont à la fois forts et sensuels, donnant de vrais personnalité aux personnages. D’ailleurs j’aime beaucoup le coté méditerranéen donné à Diana.

Si je devais pinailler, peut être que je reprocherais un côté parfois un peu figé, pas très dynamique, mais ce serait vraiment pour trouver à redire. Le chapitre consacré à Barbara Minerva est illustré par Bilquis Evely est bien moins réussi, sans pour autant être une catastrophe, mais il souffre beaucoup de la comparaison avec la dessinatrice principale. Les couleurs de Fajardo, forcement plus sombres dans ce chapitre, sont ici comme dans la gamme plus pastels de l’intrigue principale vraiment agréables, c’est là encore une franche réussite…

Une relecture des origines de la plus grande super-héroïne des comics, certes un peu frileuse, mais qui aura au moins le mérite d’être intéressante, respectueuse et moderne. La prudence aura au moins permit d’éviter un charcutage en règle et rien que pour ça, elle est salutaire. De plus la fin de l’intrigue est plus personnelle et gagne en intensité. Mais le vrai point fort de ce volume, c’est le travail effectué par le binôme Scott-Fajardo qui fait des miracles dans un style très pastel et coloré, un vrai bonheur pour les rétines.