Review TV – Gotham S03E21/E22 : « Destiny Calling/Heavydirtysoul »

C’en est fini ! Après deux pauses hivernales qui auront rallongé plus que besoin la durée de l’étalement de cette troisième saison, Gotham profite d’un double épisode pour livrer un final qui s’évertue à boucler au maximum ses intrigues, faire un certain ménage dans quelques personnages, et faire évoluer vers une saison 4 dorénavant confirmée, au grand regret de votre rédacteur (si vous me suivez depuis quelques temps, vous connaissez mon opinion sur la série et il n’y a plus à s’en cacher). Mais regardons, sans trop de procès d’intention, ce que l’on peut retirer de ce final – et de cette 3e saison dans son ensemble.

Un final qui tire en longueur et en répétitions

Le fil conducteur de Gotham saison 3, alors qu’on pouvait penser que la Cour des Hiboux, Ô combien massacrée (dans tous les sens du terme), serait la menace principale, s’est révélé être le fameux virus de Jervis Tetch et l’emprise morbide qu’il a sur les personnes contaminées. Sachant qu’au dernier épisode, c’est à peu près toute la ville qui y passait. Une situation critique pour tout Gotham City (qui est illustrée de façon plus ou moins correcte en début d’épisode, les travelings de la ville offrant quelques immeubles en flammes CGI au passage) et malgré tout, face à cette situation de crise, Danny Cannon et ses copains vont rester au plus proche de leurs personnages, dont on s’aperçoit qu’ils sont bien (trop ?) nombreux pour être tous exploités correctement. D’un côté il y a des intrigues à terminer et s’aventurer dans une gestion de crise globale aurait trop dénoté avec le reste de la saison ; de l’autre on voit aussi très vite les limites de Gotham à proposer des histoires qui n’utilisent pas toujours les mêmes ressorts narratifs.

En gros, on nous ressort là deux axes qui seront usés jusqu’à la moelle : en premier lieu, la dualité intérieure des personnages (qu’elle soit motivée par la présence du virus, un lavage de cerveaux, etc…) afin de déterminer le « véritable soi ». C’est une ficelle pas si idiote à utiliser pour Gotham puisque ça permet de justifier au final toutes les actions les plus débiles faites par les personnages afin d’expliquer que ce n’étaient pas les personnes « réelles » et les amener ensuite vers un plus droit chemin. J’en veux pour preuve ce magnifique Bruce Wayne qui passe véritablement d’un extrême à l’autre en un temps record, et l’idée d’ailleurs que cette saison 3 aurait pu conclure la série mais ce n’est pas le propos. La remarque se vaut pour beaucoup d’autres, Gordon étant un schizophrène assez incroyable, et la palme revenant à Leslie Thompkins – qui vient d’ailleurs jouer sur le terrain de la compétition des décolletés gratuits, parce que les #TigresBoobs et #IvyBoobs ne suffisaient plus.

Le second axe seront les éternelles histoires de rivalités entre vilains qui utilisent toujours les mêmes retournements de situations, et lorsque ce n’est pas fait avec finesse, ni intelligence, on se fiche de savoir qui avait tout prévu du plan de l’autre, qui va se décider à trahir qui que ce soit et à quel moment, et qui vient faire de la figuration encore plus que Selina Kyle dont je serai curieux de connaître le montant de ce cachet pour cet épisode, où elle est moins présente que certains « guests ». Et comme l’épisode est double, la répétition des évènements se fait encore plus ressentir, rendant le tout très long. Comptez le nombre de fois où le jeu de chat et souris tourne court entre Penguin et Riddler – aka la rivalité la plus tirée en longueur dans l’histoire de la télévision – ou que Gordon et les autres infecté sont pris de leurs crises virales, featuring leurs putains d’effets spéciaux de films de démons Syfy. Si vous buvez à chaque fois, vous serez très vite bourré.

Le massacre des personnages continue

Honnêtement Gotham m’a très souvent habitué à détruire beaucoup d’aspects que j’aime à retrouver chez les personnages DC Comics, et il y a là aussi de quoi. Je ne souhaite pas prendre trop de temps pour tout expliquer (de mon point de vue, ça semble assez limpide ; et bien que je veux bien qu’on joue sur les différences par rapport à d’autres supports, je n’aime pas qu’on détruise des aspects que sept générations de créatifs ont contribué à construire) ou spoiler mais : ce que fait Bruce Wayne à Alfred ; Gordon qui d’un coup est un expert du katana face à la Ligue des Assassins ; Barbara Kean (qui doit en fait être une autre personne, c’est pas possible autrement) ; et quelle était l’utilité de faire revenir tous ces losers de la saison 2, que sont Fish Mooney (là encore : déjà vuuuu) ou Hugo Strange (incarné par un BD Wong abominablement mauvais, c’est vraiment triste) ? A la fin, on dirait que même Penguin est lassé de toutes ces conneries, tout autant que le spectateur, qui ne commencera à reconnaître certains de ses personnages favoris que vers la toute fin quand, curieusement, le délire perpétuel semble se calmer et revenir vers une quatrième saison qu’on oserait espérer plus terre à terre. Ca transparait aussi dans les dernières lignes de Jim Gordon, et je ne sais encore si on pourra lui donner raison, mais quelque part, il y aurait toujours matière à rectifier le tir et à aller plonger dans un récit anodin, du nom de Gotham Central, pour redonner à Gotham un semblant de dignité.

Parce que comm je le disais, oui, on revient à certains fondamentaux après ce gros passage à vide de saison 3 – pour ma part, je crois qu’il n’y a pas un seul personnage qui n’ait été épargné par la roue libre des scénaristes ; un Alfred plus aimant et moins hargneux ; un Bruce Wayne qui va enfin trouver un véritable objectif ; Jim Gordon qui veut être un flic – bien que son impunité, après tous les meurtres qu’il a commis, soit assez crasse ; et même Penguin et Selina empruntent un peu plus à ce qu’on leur connaît, bien que ce soit fait aussi sans grande subtilité. On ne change visiblement pas trop la façon de procéder mais bon. Il y aura aussi quelques surprises dans les pistes qui vont être développées. Sans parler de Ra’s Al Ghul, que la FOX a réussi à rendre moins stylé que celui d’Arrow, il y a un autre aspect de la mythologie de Gotham qui peut être intéressant, quoique, honnêtement, la formule de la série me laisse en vrai envisager le pire (je vous parle de Butch, pour ceux qui ne suivent pas).

Le problème de Gotham, c’est ceux qui ne se sortent pas les doigts pour en faire quelque chose

Le bilan est donc assez négatif, mais ça ne change pas tellement de ce que Gotham a pu nous servir ces dernières semaines. Forcément tout n’est pas à jeter, je vous parlais des quelques pistes lancées et d’un retour à la « normale » ou au « calme » qui ne peut qu’être bon après l’hystérie collective entamée depuis la saison 2. Il y a aussi les qualités propres à la série, à savoir une photographie travaillée, de jolis éclairages, qui gagneraient à être mieux servis parce que la réalisation, elle, reste toujours très basique. Du côté du jeu des acteurs aussi on nage dans une sorte de grand vide de direction (bordel, l’échange entre Strange et Penguin), et si on enlève tout le côté « inspiré de DC » à Gotham, il n’en reste pas moins qu’il y a des erreurs dans la narration et des raccourcis débiles qu’on peut retrouver dans beaucoup de séries de mauvaise qualité ; notamment cette propension aux personnages de débarquer en un rien de temps dans des endroits dont on ne sait comment ils ont été au courant que d’autres y seraient.

Bilan négatif, et d’autant plus frustrant que Gotham sait montrer quelques petites jolies choses, trop souvent gâchées dans un ramassis d’immondices. Le vrai problème de cette série, et de cette saison en particulier, c’est que non seulement la production ne sait pas où aller, mais qu’elle a véritablement donné l’impression de s’en foutre. Pourtant j’oserais espérer que les mecs pourraient avoir un coup de fouet en voyant leurs audiences diminuer inlassablement chaque semaine, mais il faut croire que se contenter de peu est suffisant pour Heller, Cannon, et les autres. L’univers de Gotham a l’avantage d’être riche en personnages haut en couleurs, de pouvoir fournir des intrigues qu’on ne retrouverait pas ailleurs, et d’avoir un vivier d’histoires déjà racontées dont certaines qui sont véritablement excellentes. Bien sûr, on peut se contenter de la soupe servie, parce qu’il y a pire à côté. Mais on peut aussi, et c’est d’autant plus vrai par ici, demander un minimum de qualité au service. Alors peut-être que ce sera pour la Saison 4 ? Mais si la barre n’est pas redressée l’année prochaine, je vous jure que si ça passe à une 5e saison en continuant comme ça, c’est qu’il y a une force malveillante et surnaturelle qui doit se nourrir de la détresse des lecteurs de comics ; sinon, je ne comprends pas.

J’aurais aimé mettre « lamentable » tant cette saison 3 aura usé mes nerfs, mais il faut reconnaître que malgré le côté répétitif et long de ce double épisode, des roues libres continuelles sur les personnages, d’un manque d’ambition affligeant et des acteurs toujours à la ramasse, ce final propose dans ses dernières lignes, et à quelques rares moments, un futur un peu meilleur, avec une série qui se calmerait pour aller lorgner un peu plus du côté des (bonnes ?) histoires couchées sur papier. C’est sûrement ma naïveté qui parle, mais l’automne sera peut-être meilleur à vivre dans Gotham City. Mais ce n’est pas une raison non plus pour vous infliger 1h20 de conneries. Cette review vous suffira amplement.