Review OST – Suicide Squad

•  Suicide Squad Original Motion Picture Score – Water Tower Music – 10,99€
• Compositeur : Steven Price

 Depuis mercredi déjà, le film mettant en scène la Suicide Squad ainsi que le personnage emblématique du Joker a fait beaucoup parler de lui. Lors du visionnage, la musique qui accompagne les images passe difficilement inaperçue, mais pas nécessairement pour de bonnes raisons. Alors, qu’est-ce que ça a donné ?

Tout d’abord, un choix qui a été fait concernant la musique de film qui accompagnerait Suicide Squad a été d’y mettre des morceaux déjà bien existants en plus d’une musique composée pour l’occasion par Steven Price. Connu pour avoir fait la musique de « Le Dernier Pub avant la fin du monde » ou encore « Gravity », il a aussi collaboré, soit en tant que monteur soit en tant que compositeur de musique additionnelle, pour plusieurs films connus et notamment « Batman Begins ». Avec un petit bagage tout de même bien respectable, on peut s’attendre à une musique d’une certaine qualité. Malheureusement, ses compositions ne bénéficieront que d’une maigre mise en avant. Certains d’entre vous, moi-même aussi d’ailleurs, seront sortis du cinéma sans le moindre souvenir d’un thème orchestral composé pour l’occasion, et c’est tout à fait compréhensible. Par contre quand on entend du Eminem ou du Queen à fond, difficile à ne pas remarquer et donc à oublier.

Le choix d’interpeller l’auditeur avec des tubes bien connus du grand public reste assez facile. On reconnaît des morceaux très populaires qui ont donc plu à une grande partie des spectateurs, un moyen efficace de le caresser dans le sens du poil et le mettre dans de bonnes dispositions pour l’appréciation du film. On pourrait cependant déplorer le fait que ces musiques n’aient pas été pensées pour souligner la scène, et le feront donc moins bien qu’une véritable composition faite pour apporter quelque chose à un moment particulier. Et pourtant, le travail de composition a été fait, et plutôt bien fait, par Steven Price mais qui malheureusement est peu mis en avant en comparaison.

Sans être la plus grande musique du siècle, puisqu’elle reste oubliable et ne marque pas beaucoup durant le visionnage du film, la composition de monsieur Price fait son job en utilisant des procédés simples, souvent les mêmes, mais qui restent efficaces car ils posent une ambiance bien claire rapidement. On y retrouve beaucoup de contrastes avec alternance entre des passages lyriques, mélancoliques et d’autres plus rythmés et dynamiques ou alors d’autres encore qui vont dans le solennel avec des cuivres bien présents. On retrouve la présence d’instruments d’orchestre, qui permet toujours une grande richesse, auquel Price ajoute des éléments plus électro pour moderniser le tout. Souvent, les deux sont superposés mais restent reconnaissables et s’entremêlent habilement, sauf dans des moments de plus grande tension où il choisit de les mélanger dans un genre de brouhaha organisé.

Parmi les procédés récurrents, le compositeur utilise très souvent (peut-être un peu trop ?) des motifs obstinés joués en boucle qui donnent au morceau quelque chose de stressant ou évoquent quelque chose d’obsédant. L’orchestration varie en revanche, donnant cette partie parfois aux violons, d’autres fois aux cordes graves ou encore aux cuivres selon l’ambiance recherchée. Un thème plus lyrique est parfois ajouté sur cette nappe dynamique, et il faut dire qu’il est souvent confié aux violoncelles, dont les solos sont nombreux. On pourrait y voir une tentative de soudoyer la rédactrice que je suis en lui fournissant sa dose violoncellistique, ça ne suffira pourtant pas à m’acheter, je suis trop professionnelle pour cela. Les pianistes se réjouiront peut-être de la présence de leur instrument préféré, mais ce ne sera que de courte durée puisqu’il apparaît très ponctuellement et pour l’interprétation de quelques notes, très solitaires, voire de simples accords. Le piano est utilisé pour donner une touche mélancolique simple, le violoncelle est souvent en soliste pour des thèmes très lyriques avec vibrato et l’on retrouve aussi à quelques reprises des voix humaines. Souvent, il s’agit simplement d’une voix féminine, mise en fond, avec beaucoup d’écho pour donner un aspect flottant et lointain mais dans le morceau « She’s Behind You », on entend l’intervention d’un chœur qui chante de manière saccadée. Ces voix donnent une idée de chant un peu rituel.

Dans les ambiances que l’on peut retrouver dans les musiques de Suicide Squad, il y a certains moments plus burlesques, rares mais existants, qui sont plutôt bien réussis, notamment dans « You Make My Teeth Hurt ». On a l’impression que certains intervalles sont « ratés » car souvent un peu dissonants, et le tout devient alors un peu incertain et boiteux. De manière plus générale, et c’est aussi le cas dans l’exemple que je viens de citer, on entend souvent des chromatismes ou des rapports de demi-tons entre les notes, qui créent une tension assez forte et fonctionnent dans plusieurs types d’ambiances différentes. Dans « Are We Friends Or Are We Foes » par exemple, un intervalle de deux notes est systématiquement répété à un demi-ton d’écart, et ceux dans trois transpositions différentes. Le rapport de demi-ton est donc bien tendu et reste beaucoup utilisé, de manière générale mais aussi dans cette OST. Il fait partie de ces techniques employées fréquemment, qui manquent peut-être un peu d’originalité mais suffisent dans un cadre aussi grand public.

La musique composée en l’honneur du film Suicide Squad par Steven Price est tout à fait acceptable, utilisant des procédés très courants, peu originaux mais souvent efficaces et en variant les couleurs, les ambiances et les instruments utilisés, électroniques ou non. Malheureusement, ces compositions sont très peu mises en avant et on retiendra surtout des gros tubes connus greffés sur certaines scènes qui font perdre un peu le lien avec l’intrigue et peuvent un peu agresser l’auditeur au lieu de souligner subtilement une scène. Dommage.