Review VF – Batman Tome 8 : La Relève, 1ère Partie

Les points positifs : Un numéro dessiné par Jock. Introduction d’un nouveau méchant intéressant. Au risque de me répéter : visuel au top. Les points négatifs : Une narration un peu répétitive. Un Bruce Wayne relativement insipide.

« Je suis Batman. Et il faut qu’on parle. » – James Gordon

• Scénario : Scott Snyder, Brian Azzarello, James Tynion – Dessins : Greg Capullo, Jock, Roge Antonio – Couleurs : FCO Plascencia, Lee Loughridge, Dave McCaig – Encrage : Danny Miki

• Urban Comics – DC Renaissance – Batman tome 8 – 27 mai 2016 – 184 pages – 17,50 € – Contient : Batman #41-45 and Free Comic Book Day 2015: DC Comics Divergence #1 + Batman Annual #4

Contrairement à ce que le titre peut évoquer, ce tome rassemble la suite du run de Snyder/Capullo sur Batman et non une adaptation de la série animée Batman : la relève. Cependant, après que Bruce Wayne ait disparu corps et biens (sa société a été rachetée par Powers International) dans sa lutte effrénée contre le Joker, il revient mystérieusement à la vie sans aucun souvenir de sa vie précédente. Il est alors question de trouver un remplaçant à Batman. Dans ce tome, c’est James Gordon qui endosse la cape du Chevalier Noir, dans une armure robotisée. Sans avoir le temps de s’habituer à son nouveau rôle, l’ancien marine doit faire face à un tout nouveau mais redoutable ennemi : le Jardinier (rien à voir avec les ennemis de Spyral) alias Mr. Bloom.

Un prologue signé Jock

Avant de croquer à pleine dents dans ce récit, le numéro 44 de Batman, dessiné par Jock et scénarisé par Snyder et Azzarello, revient sur le passé du héros, lorsque Bruce Wayne portait encore la cape du justicier de Gotham. Le justicier cherche à retrouver le meurtrier d’un adolescent, dont il a trouvé le corps dans la baie de Gotham. Sa piste le mène de gangster en méchant, pour échouer dans Blossom Row, une partie de la ville où la nature a repris ses droits. Et où un mystérieux « jardinier » distribuerait des substances capables de développer des capacités surhumaines pendant quelques temps. Ce numéro n’est pas sans rappeler Batman Sombre Reflet, sur lequel Jock a travaillé, que ce soit dans le style de narration ou dans l’ambiance assez noire. Au niveau visuel, tant que narratif, ce numéro forme un contraste marqué avec la série habituelle, qui affecte un ton un poil plus léger tout de même. Pour les dessins, le style de Capullo et la coloration de FCO Plascencia sont beaucoup plus vifs et précis, parfois presque tape-à-l’œil. Un trait comme celui de Jock offre donc un changement intéressant et bienvenu.

Un nouveau Batman

Le numéro 44 est suivi par le numéro de Divergence distribué au Free Comic Book Day. C’est l’équipe habituelle aux fourneaux et elle s’offre le luxe de définir ce que signifie Batman pour Gotham… avant de présenter l’homme qui prend la relève de Bruce Wayne : le commissaire Jim Gordon. Ce choix peut paraître étrange de premier abord, surtout si on s’attendait à ce qu’un des membres de la Bat-family reprenne le costume de leur mentor (cela est déjà arrivé par le passé, et c’est Dick Grayson qui s’y était collé).

Mais avec toutes les séries dans lesquelles ces personnages évoluent, difficile de caser cela, à moins de faire doublon ou de mettre en pause les aventures de la Bat-doublure. Ainsi, le choix de Jim Gordon est relativement sûr éditorialement parlant, surtout si on considère que c’est un ancien marine et qu’il est policier depuis belle lurette et connaît Gotham et ses gangs comme sa poche. Je m’attendais au pire et, si on met de côté l’équipement ridicule et gigantesque de ce nouveau Batman, Gordon remplit bien son rôle de flic largué qui veut faire le bien mais qui s’aperçoit être un pion dans un jeu qui le dépasse. Un des acteurs de ce théâtre est Geri Powers dont on apprend à se méfier dès les premières pages : trop puissante et trop lisse en apparence, elle n’inspire pas vraiment confiance ni à Gordon, ni à nous. Elle est la P-D.G. de Powers International qui a racheté Wayne Enterprises lorsque Bruce est déclaré disparu. C’est cette firme qui fournit les équipements du nouveau Batman et qui, de ce fait, peut espionner le moindre de ses faits et gestes.

Bruce Wayne version mouton, quant à lui, est parfaitement détestable. Je le préfère nettement en version méchant loup qu’en playboy millionnaire plus préoccupé par ses propres fesses qu’autre chose (quoique, ça ne change pas tellement d’avant sauf qu’avant ce n’était pas aider les jeunes en difficultés qui le faisaient vibrer mais se balader en collants dans une voiture-char d’assaut). Le personnage est parfaitement insipide, voire même odieux et on a hâte que ça change.

Et un méchant inédit

Un mot sur le méchant, à présent. Depuis plusieurs jours, Gotham est victime d’attaques de « super-vilains » aux pouvoirs extra-ordinaires. Ces vilains ne sont autres que des membres des gangs criminels de la ville, auxquels Gordon a déjà eu affaire lorsqu’il était policier. Son équipe découvre que ces vilains, ainsi que plusieurs autres membres de gangs retrouvés morts possédaient tous un implant sous-cutané de haute-technologie et ressemblant à une graine avec une fleur dessus. Il remonte la piste jusqu’à un être étrange qui, apparemment, conclut des marchés avec la pègre de Gotham et élimine tous ceux qui ne veulent pas faire affaire avec lui : Mr. Bloom aussi appelé le Jardinier. Pour l’instant, nous n’en savons pas plus sur cet être aux facultés diverses et qui semble jouer sur plusieurs tableaux. Le tome se termine sur son attaque à un gala du gotha de Gotham.

Je ne vais pas m’étendre sur les aspects visuels des numéros réguliers de la série. Si vous avez lu les reviews des tomes précédents, vous connaissez mon amour pour le coup de crayon de Capullo et mes envolées lyriques au sujet de l’excellente, bien qu’électrique coloration de FCO Plascencia, qui sont également en grande forme sur ce tome-ci. Particulièrement au niveau du découpage qui est impeccable et original. L’action est toujours aussi bien exprimée, notamment dans le numéro 45 où ça bastonne à tout va. Petit bémol tout de même : Capullo dessine très bien les hommes mais il semble être plus en difficulté quand il doit crayonner des femmes qui ne rentrent pas dans le moule de la bombe rousse à longue chevelure. En effet, Geri Powers et surtout Maggie Sawyer (oui, c’est une femme… à moins qu’ils aient changé le sexe du personnage) n’ont pas un design cohérent et leurs visages sont parfois dessinés de manière étrange.

Un Annual rafraîchissant

En fin de volume, se trouve l’Annual #4 qui fait resurgir des méchants classiques : Gueule d’Argile, le Sphynx et Mister Freeze. Le trio profite du déplacement des patients de l’asile d’Arkham (Wayne avait donné son manoir pour que l’institut puisse y traiter ses fous-furieux et le bâtiment lui est rendu par Powers) pour coincer Wayne et le faire payer pour son crime : à savoir avoir financé et, de ce fait, créé Batman. Ils ne sont apparemment pas au courant de l’identité du justicier, même si dans les numéros rassemblés dans ce tome, il m’a semblé que les gens étaient au courant. Notamment Jim Gordon lorsqu’il va parler à Wayne sur son lieu de travail. La controverse de savoir si l’ancien commissaire est au courant de l’identité de Batman et fait mine de l’ignorer ne date pas d’hier et on ne va pas en débattre ici. On peut toutefois souligner qu’il est connu que Wayne Enterpises finançait en grande partie le justicier et qu’il en est la source la plus proche. C’est du moins l’argument avancé par le scénario.

Cette histoire de l’Annual est encore une fois un rafraîchissement dans cette série dont la narration se répète et semble s’essouffler avec le numéro 45. Ressortir des méchants à l’ancienne est un clin d’oeil bienvenu aux fans et il permet de voir les choses de leur côté : Batman les a marqué et les a fait souffrir, voire a gâché leur vie et ils veulent se venger. De plus, cela offre un cadre narratif dans lequel Bruce Wayne doit agir autrement qu’en se débinant en disant qu’il n’est plus l’homme qu’il était avant sa disparition… et quelques réflexes de justicier reviennent, ce qui laissent à penser que Batman traîne encore dans le subconscient du playboy millionnaire. Milliardaire, pardon.

Cette question est d’ailleurs débattue par Superman et Alfred dans le numéro 43. Le Grand Bleu est d’avis qu’il y a un moyen de ramener Bruce à son soi originel, et qu’il est impératif de le faire. Alfred, quant à lui, se refuse à chercher un moyen de rafraîchir la mémoire de son ancien patron car il est heureux ainsi. Durant cette discussion, le majordome présente à Kent une machine à cloner sur laquelle travaillait Bruce avant l’attaque du Joker. On ne comprend pour l’instant pas vraiment pourquoi ce dispositif est introduit dans l’histoire mais j’imagine qu’il va certainement servir dans le futur. A moins qu’il ne s’agisse juste d’un clin d’œil au numéro 27 où un futur nous était conté.

Bref, ce tome 8 des aventures de Batman est bon, malgré quelques répétitions scénaristiques. J’ai été agréablement surprise par la manière dont Jim Gordon remplit l’office de Batman, et par le nouveau méchant Mr. Bloom. Je me réjouis de lire la suite de cet arc, pour autant que l’histoire avance un peu plus que dans les numéros 42 à 45. L’Annual était lui aussi bon tant au niveau scénaristique que graphique avec un trait et un encrage fort et marqué.