Review VF – Superman Univers Hors Série #1

Les points positifs: Une origin story de la relation Batman/Superman juste parfaite. Des grands talents en pleine forme. Des scénarios bien ficelés. Une bonne surprise. Les points négatifs: Des dessins qui ont (forcément) vieillis.

« Batman est à Metropolis… ce qui veut dire que les ennuis ne vont pas tarder. » – Superman

• Scénario : John Byrne, Roger Stern, Jerry Ordway, Dan Jurgens – Dessin : John Byrne, Arthur Adams, Bob Mc Leod, Jerry Ordway, Dan Jurgens, Brett Breeding – Couleur : Tom Ziuko, Petra Scotese, Glenn Whitmore,

• Superman Univers Hors Série #1 – 18 mars 2016 – 162 pages – 5,90 € – DC Kiosque

Rebondissant, une fois de plus, sur la riche actualité cinématographique en ce qui concerne la partie mâle de la trinité, Urban sort un premier Superman Univers Hors Série qui leur est consacré. Ce hors série est plus précisément consacré aux relations des deux super héros après Crisis On Infinite Earths, une période où Superman vient d’arriver sur Terre et où Batman et lui doivent apprendre à se connaitre malgré une défiance commune. L’ouvrage contient donc Man Of Steel #3, Action Comics Annual #1 et Action Comics #653 suivi d’un récit en trois parties, Dark Knight Over Metropolis, composé de Superman #44, Adventures of Superman #467 et Action Comics #654.

Un dialogue de « La Cité De La Peur » pourrait théoriser le genre de la première rencontre de super-héros. Quand un producteur américain rencontre Odile Deray à Cannes et lui pitche le film Snow White and the mercenaries seven: « First, they meet, then they meet and they fight, and then at the end they fuck », bien sûr le troisième axiome ne concerne que les héros de sexe opposé ou homosexuels. Et je doit dire que l’on est ici bien loin de tout ça dans ces histoires, on est même très loin de la bromance au premier regard, tellement la méfiance est grande et réciproque. On est plus dans le récit de deux personnalités très opposées qui apprennent à se connaitre avant de s’apprécier.

Je ne sais combien de fois a été joué la scène de la rencontre de Superman et de Batman dans les divers média, mais John Byrne réussit à faire, dans Man Of Steel #3, un récit qui respecte les fondamentaux des deux protagonistes, tout en servant une histoire pas du tout caricaturale et suffisamment originale: Batman est à la poursuite de Magpie qui a perpétré des cambriolages sanglants à travers Gotham City. Pour ce faire, il tente de « convaincre » un de ces hommes de main de parler, c’est alors que Superman apparaît pour tenter d’arrêter le Chevalier Noir qu’il considère comme un criminel. Ce dernier va alors essayer de convaincre le Kryptonien que ce qui marche à Metropolis n’est pas forcément adapté à Gotham City. Et que pour une ville plus sombre et plus violente, il faut un héros plus sombre et plus violent, prenant pour exemple Magpie pour appuyer son propos. Superman va alors suivre Batman lors de sa traque de la criminelle et entrer dans la bagarre au côté de son homologue.

John Byrne ne se contente pas de nous délivrer un bon scénario, mais il officie aussi aux dessins, et si le graphisme est forcément un peu daté (ils ont 30 ans), il est soigné et à part quelques arrières plans un peu vides, c’est très agréables à lire. Les visages sont expressifs, les scènes d’action dynamiques, avec un coup de cœur pour la scène d’ouverture à la première personne où Batman malmène un brigand.  Seule la dernière case m’a un peu déplu, avec sa réflexion un peu attendue. Pour le reste c’est vraiment bien et on évite pas mal de poncif du genre ce qui est en quelque sorte un petit exploit…

L’année d’après Byrne signe Action Comics Annual #1 et est rejoint par Arthur Adams aux dessins pour nous conter la deuxième collaboration des deux plus grands héros du monde du comics. Et c’est dans une ambiance plus champêtre qu’elle se situe, puisque ce sont dans les marais de Fayerville que Batman enquête sur des meurtres en série. L’ampleur du problème est tel qu’il demande l’aide de Superman en passant par l’intermédiaire de Clark Kent. Il ne seront pas trop de deux pour dénouer les mystères de cette petite ville de l’Amérique profonde.

Encore une histoire qui sort des sentiers battus, puisque c’est le thème du surnaturel, qui plus est dans un décor campagnard, qui est exploré. Exit les ennemis habituels du duo et les grattes ciels de leurs villes respectives. L’ambiance est d’ailleurs un poil plus détendue entre les deux protagonistes puisque l’un a demandé l’aide de l’autre, preuve d’un regain de confiance… Néanmoins ils n’en sont pas à se mettre des grandes claques dans le dos.

Les dessins de Arthur Adams sont encore plus rétros que ceux de Byrnes et un peu moins détaillés, à part peu être Skeeter (un protagoniste féminin habillé court) qui semble avoir les faveurs du dessinateur. Une fois que j’ai dit ça, rassurez vous c’est vraiment qualitatif.

Reste alors le gros morceau du magazine, c’est à dire « Dark Knight Over Metropolis » et son introduction dans Action Comics #653. Dans ce numéro, une femme qui détient l’anneau de Kryptonite de Luthor fait avouer à Clark Kent qu’il est Superman. Qui elle est et comment elle est entrée en possession de cette anneau seront la plaque tournante de l’intrigue, tout comme le procès de Morgan Edge, ancien numéro un de l’Intergang où Cat Grant est témoin à charge. Inutile de dire que l’Intergang va tenter de la faire taire, néanmoins elle aura trois super gardes du corps en la présence de Gangbuster, Superman et Batman, venu sur Metropolis pour enquêter sur un bijou trouvé à Gotham.

Ce sont donc Roger Stern, Dan Jurgens et Jerry Ordway qui scénarisent cette histoire. Et l’histoire est prenante. Si la trame qui met en scène l’Intergang et Cat Grant est assez classique, celle en toile de fond sur l’anneau de Kryptonite amène du sel et de l’intelligence au tout. C’est donc au final une intrigue  extrêmement bien ficelée qui sert aussi de socle à la relation future entre Superman et Batman car les révélations faites seront de nature à les souder.

Les dessins de Bob Mc Leod, qui officie sur le titre Action Comics ressemble beaucoup à l’image classique des comics tel que se le représente le grand public, avec son coté coloré et épurés. Cependant les visages sont extrêmement expressifs et plein de détails. Ceux de Jerry Ordway, dans la série Superman, montent d’un cran dans le détail avec plus de décors, des visages plus expressifs encore et un travail sur les ombres plus important aussi. Le climax graphique est atteint avec Dan Jurgens, dans Adventures of Superman #467, qui frise la perfection, notamment dans les scènes de nuits, simplement magnifiques. les visages sont plus réalistes, les cases remplies de pleins de petits détails qui donnent de la vie à l’ensemble.

Je partais plein de préjugés sur ce magazine, qui, de loin, ressemblait à un fourre tout opportuniste, destiné à faire écho à la sortie de Batman V Superman. Il n’en est rien puisque l’excellent travail éditorial d’Urban qui a consisté à cibler la période post Crisis on Infinite Earths est une réussite. Réussite, parce que c’est une histoire qui explore la rencontre entre les deux héros de façon originale et avec talent. On sort du schéma du « je te vois, je te tape et on devient pote » et lorgne plus du côté d’un réalisme bienvenu. Les deux protagonistes se jaugent et apprennent à s’apprécier dans des aventures communes très intéressantes. Cela forme un ensemble extrêmement cohérent et se lit d’une traite. Le tout écrit et mis en images par de grands talents. Une époque qui, vue d’ici, semble bénie, surtout quand on se souvient des débuts de la Justice League dans les New 52…