DC (Trash) Talk #5 – Rendez-moi mon Lobo emo !

J’ai pour habitude de garder mon calme en beaucoup de circonstances. Mais comme tout le monde, j’ai mes limites. Et aujourd’hui, on a dépassé les bornes, et beaucoup trop. La goutte d’eau qui fait déborder un vase déjà bien trop plein des frustrations engendrées par la vie de tous les jours. J’aime DC Comics et vous le savez certainement bien. Sinon je ne serai pas en train d’écrire ici depuis plus de deux ans. Mais vous savez, dans un couple, même quand vous êtes fou amoureux de l’autre, il y a bien un truc que vous finissez par ne pas aimer. Comme cette fâcheuse habitude de vouloir à tout prix regarder « Plus belle la vie » tous les soirs ; ou encore cette tendance à laisser traîner ses chaussettes sales dans le salon. Et DC Comics vient de faire quelque chose dans le même genre, mais en puissance 1000 (parce que mon amour pour l’éditeur ne peut même plus se quantifier de toute façon.

On vous en a parlé en début de semaine, c’était la petite douche froide du lundi – qui accompagnait d’ailleurs très bien les 15 degrés en moins qu’on s’est mangé et les trombes d’eaux qui suivent et oui, si j’ai envie de parler météo je le fais. Avec les sollicitations de décembre, on nous apprend que quelques titres vont s’en aller, faire les adieux, et rejoindre l’autel des titres sacrifiés au nom des faibles ventes, du lectorat trop frileux ou du manque de qualité. Et parmi ces titres, dont certains très bons (ou au moins, qui ont osé la carte de l’originalité, dédicace à toi mon brave Omega Men), et certains un peu moins (et pourtant, c’est pas faute d’avoir essayé, parce que réellement juger de la qualité d’un titre ou de sa rentabilité après 3 numéros, hein…) ; il y avait une petite perle, un écrin de provocation, de défiance et de liberté. Un joyeux David qui résistait face au Goliath du mécontentement, j’ai nommé : Lobo.

Alors j’en entends déjà venir me dire « mer il et fou » mais je tiens à vous préciser que je n’ai lu AUCUN numéro de Lobo, que ce soit le vieux ou l’ancien (bon en vérité j’ai lu un spécial Noël de l’ancien Lobo pour un Showcase et le #1 de la nouvelle série mais on va dire que ça compte pas). Et donc vous pourriez me dire de me taire car du coup je ne sais pas de quoi je parle, mais je vous répondrai que bien au contraire, ça me permet d’avoir un avis objectif sur la question car je suis allé appréhender le personnage sans à priori ou préférence pour ce qu’il était dans des comics qui étaient publiés alors que je venais à peine de sortir du ventre (au sens propre, t’inquiètes la césarienne) de ma mère. Ici, je ne souhaite pas tellement vous parler du personnage de Lobo, ancien ou nouveau, de sa caractérisation, de son allure, de sa violence, mais plutôt de ce qu’a représenté son changement dans les New 52 et pourquoi je suis révolté que sa série soit annulée !

Le cas Lobo remonte à il y a plus d’un an. Par un beau mois d’août 2013, notre ami de toujours Dan Didio nous révélait lequel des 4 re-designs pour la version New 52 de Lobo avait été choisi. Je me rapelle très bien de cette journée, internet a explosé juste après qu’on ait publié l’article. J’entendais Harley pousser des hurlements de rage, Twitter qui s’affolait avec le hashtag #WTFDC?? et tout le monde pour décrier cette nouvelle apparence d’androgyne, je cite « croisement du chanteur de Tokio Hotel avec Edward Cullen de Twilight » – on a les références qu’on peut hein. Et ce n’était que y a deux ans, si si, ça semble tellement loin.

Si je reviens là-dessus, c’est pour montrer un moment où, je trouve, DC Comics a tenu bon face à la déception et la grogne ambiante. Le cas Lobo nous montre que l’éditeur sait aller à contre-courant, à s’opposer au conservatisme du lectorat, même avec des idées pas forcément bonnes. Non parce que non content d’annoncer ce nouveau Lobo, il fallait parler de l’ancien. Le sort en était jeté, un mois plus tard lors du Villains Month, on nous apprend que le « vrai » Lobo est en fait un usurpateur et que le nouveau va avoir sa peau. Et près d’un an plus tard, DC Comics annonce sa décision d’accorder une ongoing au personnage. Avec une certaine subtilité pour le choix de l’équipe, non parce qu’engager un type qui s’appelle Cullen pour écrire sur un type qu’on appelle à tour de bras Edward Cullen : vous avez le sens de l’humour, et c’est quelque chose que j’apprécie. Et vous savez ce qu’il se passe dans le premier numéro ? On voit le Lobo emo décapiter le gros motard barbu. Et hop, on n’en parle plus.

Vous voyez ce que DC a fait là ? C’est pas avoir des couilles et les poser sur sa table ? Alors que ça fait depuis plus d’un an que tout le monde râle (sincèrement : je n’ai entendu PERSONNE me dire du bien du nouveau Lobo. PERSONNE.), et les types, ils s’en foutent. Et pire, on leur dit « redonnez-nous l’ancien personnage ! », et BIM ! Ils te le zigouillent à la face du lectorat ! Regardez c’est qui le patron ! On s’est cassé le cul à demander à Kenneth Rocafort des recherches de design, alors maintenant on va l’assumer ! Et jusqu’au bout. Pour moi, c’est un magnifique cas de résistance dans l’adversité, une véritable prise de risque. Non, parce que faut pas croire, le titre a eu un bon lancement à près de 40 000 numéros vendus, puis au second c’est parti dans les 25 000 et ça n’a cessé de chuter. Mais même en voyant ça, et même après six numéros, le titre était maintenu. Même avec la reprise DC You le titre n’est pas reparti, et il était dans le bas du classement des ventes. Merde, le titre vendait moins que Mortal Kombat X ! Y a plus de types qui apprécient le comicbook de Mortal Kombat que ce Lobo là. Alors c’est soit que les lecteurs de comics sont complètement cons ou peut-être que y a un problème avec la série, non ?

Alors je pose la question : pourquoi ? Pourquoi annuler Lobo ? Et tous ses petits camarades aussi. Vous nous avez montré que vous êtes capables de tenir bon, d’imposer un personnage détesté par l’ensemble du lectorat, et de maintenir sa série pendant une bonne année ? Malgré des ventes pourries depuis longtemps ? Non parce que de toute façon elles ne décolleront plus à présent. Vous nous MONTREZ que vous pouvez faire tenir sur 12 numéros un truc qui part avec toutes les chances les plus mauvaises de marcher ! Parce que « on s’en bat les steaks (frites) », on a pris une décision éditoriale (pourrie) mais on l’assume ! Et c’est bien ! C’est ce qui fait votre force en tant qu’éditeur ! Pour peu, ça me rappelle quand Sarko avait imposé sa réforme des retraites alors que y avait 6 millions de gens dans les rues : ok, c’est un connard, mais au moins il fait ce qu’il dit (ouais allez, on parle politique maintenant, on s’en fiche on peut se lâcher). Et là c’est pareil. Si. Et le premier qui dit que j’extrapole je porte plainte.

Alors pourquoi laisser un titre que tout le monde déteste sur douze numéros et ne PAS accorder sa chance à d’autres qui ne demandent qu’à exister, et dont tout le monde dit du bien ? Omega Men, à peine quatre numéros sortis que c’est sabré ! Pareil pour Doomed (alors qu’en plus ça a quand même du potentiel cette connerie). Et pour Gotham By Midnight qui aura duré un peu plus longtemps. Et j’allume une chandelle pour Lost Army, déjà que vous avez sabré à mort dans l’univers Green Lantern, vous laissez même pas croquer les p’tits frères d’une série en rab.

N’allez pas me faire croire que c’est une histoire de chiffres, Lobo se vendait tout aussi mal, et personne ne l’aimait de toute façon. Alors que vos 10 000 numéros de Midnight vendus, c’étaient des mecs qui kiffaient ce qu’ils lisaient ! C’est DC You qui vous fait peur ? Les « mauvais » chiffres après 3 mois ? Quand au #3, Lobo avait perdu 50% de ses lecteurs, ça ne vous a pas effrayé pourtant ! Alors si vous êtes prêts à maintenir des concepts qui ne plaisent à personne, essayez de faire de même avec ceux qui plaisent, ou à défaut, qui intriguent, qui donnent la curiosité aux lecteurs, l’envie de découvrir quelque chose de différent, d’original. DC, je vous le demande, soyez forts à maintenir votre DC You autant que vous l’avez été à imposer ce nouveau Lobo dont personne ne voulait !

Alors rendez-moi ce Lobo ! Continuez de rester fort et croyez en ce que vous faites, les bonnes choses comme les mauvaises, on s’en fiche : on veut un éditeur qui assume ses choix, et qui en paie les conséquences ! Se rétracter sur une nouvelle initiative alors que les ventes ne sont pas aussi folles (nan mais sinon on pourra aussi re-parler de votre campagne de comm’ d’ailleurs) qu’espérées, c’est lâche. Et vous pouvez faire bien mieux que ça, j’en suis convaincu. Alors la prochaine vague de titres que vous annoncerez, sans compter les mini-séries, vous avez intérêt à les assumer.

Oh, et n’annulez pas la seconde partie de Prez. Parce que la vie de moi si vous faites ça, je monte à Burbank et je fais un auto-dafé avec toutes vos cover 3D. Je le jure.