[Review VO] Batman by Doug Moench et Kelley Jones Vol. 1

Batman by Doug Moench and Kelley Jones Vol. 1
Les points positifs :
  • Le design de Batman
  • L’ambiance visuelle
  • Le côté fantastique/horrifique
  • Les sous-intrigues politiques
  • Le traitement des personnages
Les points négatifs :
  • Le style de Jones, controversé
  • Certains visages ratés
  • Toutes les histoires ne se valent pas

« I’ve decided it’s time for something new… »


  • Scénario : Doug Moench  – Dessins : Kelley JonesJohn BeattyEduardo Baretto – Couleurs Adrienne RoyGregory Wright Couverture : Kelley Jones


Comme vous le savez certainement puisque nous sommes en train de le fêter tout ce mois, Batman a soufflé sa 75ème bougie cette année. Ces 75 ans d’existence ont été marqués par la succession de nombreux auteurs et artistes pour raconter les histoires du Chevalier Noir, et aujourd’hui nous allons nous intéresser à l’un des duos mythiques qui ont façonné Batman dans les années ’90. Il s’agit, vous l’aurez aisément deviné, de Doug Moench et Kelley Jones, et cet ouvrage reprend les débuts de la collaboration entre l’auteur prolifique (qui écrivait sur Batman depuis le numéro #489 – il avait déjà assuré un premier run sur les numéros #360-400) et l’artiste au style particulier, qui a complètement redéfini l’ambiance visuelle du titre à l’époque. En 1995 donc naissaient ces premiers numéros d’une collaboration qui durera de Batman #515 à #552, avec quelques numéros fill_in par d’autres artistes qui ne sont malheureusement pas inclus dans cet ouvrage. Mais ne râlez pas de suite, vous allez voir que ce qui est contenu dans ce livre vaut son pesant d’or. Explications.

Si on se replace dans le contexte historique de Batman, le personnage sortait tout juste de l’éprouvante saga Knightfall, alors qu’il vient de reprendre son costume à Jean-Paul Valley et que Dick n’a plus besoin d’assurer le rôle de son mentor. Nous commençons précisément avec Batman #515 qui est le premier numéro de l’arc Troïka (qui suit directement Prodigal, les deux récits étant retrouvés dans l’ouvrage Batman : Le Fils Prodigue chez Urban Comics). Si l’histoire va perdre en intensité puisque seule la première partie de l’arc – bien qu’elle ressemble à une récit one-shot – est présente, le numéro nous plonge d’entrée de jeu dans ce qui va faire la force de l’alliance MoenchJones : le visuel. Qu’on se le dise, le style de l’artiste est très particulier et ne manquera pas de diviser les avis (il doit toujours le faire à l’heure actuelle), mais l’impression est saisissante. À commencer par Batman lui-même, qui adopte un style très prononcé et différent de tout ce qu’on a pu voir auparavant. Le héros tient ici beaucoup plus de la Chauve-Souris que de l’Homme, tant son apparence prend des proportions à la limite du difforme, avec une musculature exagérée, un cou qui semble d’une longueur surnaturelle, des gants qui laissent la place à d’immenses griffes au lieu de doigts, d’oreilles ultra pointues et longues, prêtes à déchirer le ciel… et cette cape, mes aïeux. Au gré des cases, elle vous semblera soit très longue, soit encore plus longue, avec l’impression que Batman porte une centaine de kilos de tissu sur son dos. Littéralement enveloppante, Batman ne la porte pas ici qu’en « simple » accessoire du costume, elle prend carrément plus d’importance que le reste ; il se cache dedans, ne laissant à ses ennemis que l’apparence d’un être surnaturel qui recouvre la nuit toute entière, et lorsqu’il la laisse tomber sur son corps, elle forme des petites protubérances circulaires qui me rappellent les collines particulières qu’on retrouvait dans L’étrange Noël de Mr. Jack. Ici donc, Batman ne ressemble plus vraiment à un être humain lorsqu’il opère, il est là pour réinstaurer une peur viscérale chez ses ennemis et veut s’en donner les moyens à l’aide de son apparence quasi-monstrueuse.

Mais l’empreinte de Jones ne se limite pas qu’au costume du Chevalier Noir, puisque c’est tout son univers qui s’en voit transformé, adoptant une ambiance très sombre digne des plus grands contes fantastiques, avec même une forte tendance vers l’horrifique. Les visages des vilains retrouvés sont torturés, ont tous quelque chose de laid (que ce soit de simples défauts physiques comme des boutons sur le visage), et en même temps dégagent un charme incomparable. Son Mr Freeze adopte un look résolument « cool » (sans jeu de mots, hé, c’est pas mon genre), le Scarecrow ressemble réellement à ce qu’il est censé ressembler (et sous le masque, le visage de Crane est vraiment pas à son avantage), et là je ne vous parle que des vilains, mais d’autres personnages emblématiques sont présents et participent à cette ambiance horrifique/fantastique, avec notamment un superbe Swamp Thing et un Deadman qui tient vraiment du cadavre, surtout lorsqu’on le compare à ses autres versions (pour ma part, New 52 en tête dans Justice League Dark). En alliant cela avec certains décors somptueux, on ne peut rester insensible au trait de Jones magnifié par l’encrage de John Beatty qui participe à cette ambiance très sombre. Les deux coloristes ne sont d’ailleurs pas en reste également, livrant un travail exemplaire – mais pour l’anecdote, il faut savoir que Beatty colorisait lui-même les couvertures des numéros qu’il faisait. Alors on trouvera quand même quelque chose à redire à Jones, au vu de son trait particulier, et je reconnais que je ne suis pas très fan de son design de la Batmobile ni des visages des alliés de la Bat-Family. Il faut reconnaître que Dick GraysonTim Drake ou même Alfred ne sont pas mis en valeur, et les personnages masculins ont tous une tendance à avoir un énorme menton, ce qui est assez perturbant. De même, lorsqu’on a des cases de taille moyenne avec des personnages représentés en entier, il arrive souvent que le trait soit plus grossier et qu’une impression de travail vite-fait s’en dégage, ce qui n’aide pas si déjà à la base le style ne vous séduit pas.

Mais si vous n’êtes pas rebutés par cette empreinte visuelle, parlons un peu des histoires contenues dans ce recueil. Dans un premier temps, ces histoires sont plutôt courtes, généralement en deux parties ; Moench revisite la galerie des super-vilains de Batman  avec des invités de marque comme Black MaskMr FreezeScarecrow ou encore Killer Croc – avec pour ce dernier une des meilleures histoires de cet ouvrage. De façon générale, les histoires s’inscrivent dans l’ambiance fantastique de la série, avec des récits qui ne donnent pas dans la grandiloquence, que j’ai trouvé même plutôt intimistes. Batman ressort de ce qu’il considère comme étant son plus grand échec personnel (le fait d’avoir laissé Valley prendre son rôle) et veut apporter du changement dans sa ville, et pas seulement via son apparence. On arrive à voir plusieurs facettes du Chevalier Noir, le côté « détective » étant très présent, mais si au niveau de l’apparence c’est la Chauve-Souris qui l’emporte sur l’Homme, dans ses pensées, c’est Bruce Wayne qui doute sur le côté Batman. À plusieurs reprises il est confronté à des choix difficiles dont la résolution ne semblera pas évidente. Et à ce titre, le récit final Ogre and Ape est vraiment très réussi, avec un Batman qui se range du côté auquel on ne s’attendrait pas, mais qui en définitive, est bien celui de l’opprimé. Et une nouvelle fois, le récit de Killer Croc illustre bien la remise en question que fait le Chevalier Noir ; un Chevalier qui aura d’ailleurs des moments de faiblesse et qui, Moench n’hésite pas à le montrer, n’arrive pas à sauver tout le monde. Il y a des morts que même Batman n’arrive pas à empêcher, contribuant ainsi à cette ambiance, ce doute qui assaille le héros en permanence. Les histoires fantastiques elles offrent également une touche de nouveauté par rapport aux autres qui restent un brin plus « classiques », et si la courte histoire faisant intervenir Sleeper m’a peu emballée au départ, l’arc en 3 parties avec Deadman est d’un tout autre niveau. Batman part dans une contrée lointaine (type amérique du sud) et devient lui-même une incarnation démoniaque pour les autochtones, ce qui laisse place à des dialogues vraiment bien ficelés avec un Chef Indien ; la relation avec Deadman est elle aussi bien explorée, faisant de ce récit l’une des perles de l’album.

Mais si la part belle est faite à Batman il ne faut pas non plus en oublier le reste de son univers qui gravite autour de lui. Nous pouvons apercevoir brièvement Dick et Tim Drake mais leur apparition n’est pas très importante, si ce n’est à appuyer le fait que le retour de Batman n’est pas facile. Moench profite de sa place de scénariste pour faire quelques petits changements de status quo avec au départ un Alfred qui est absent du manoir Wayne… et voir Bruce et Tim essayer tant bien que mal de faire le ménage, ça vaut son pesant humoristique (peut-être la seule touche d’humour de ces 400 pages d’ailleurs). Mais l’autre aspect, plus développé, est celui autour du Commissaire Gordon qui vit dans ces numéros un passage assez compliqué de sa vie. Moench bouleverse vraiment le personnage, avec une intrigue qui part dans le politique et qui, mine de rien, accroche le lecteur en très peu de pages. Je n’en dirais point plus et s’il est dommage, in fine, que le changement de status quo ne reste pas, le lecteur aura vite fait de se passionner pour les changements qui s’opèrent sur le pauvre Gordon. L’ouvrage se termine enfin avec quelques couvertures variantes, et nous pouvons découvrir au vu des indications que certaines de ces variantes avaient un effet phosphorescent et brillaient dans le noir (je vous laisse deviner lesquelles étaient touchées par ce procédé… indice : Deadman ? ça colle bien au personnage non ?) ; c’est évidemment un détail mais j’ai trouvé ça amusant… Au final, le seul « regret » que j’ai au vu des histoires racontées et le traitement qui en est fait, c’est de ne pas voir d’autres vilains monstrueux comme Man-Bat ou encore Joker apparaître ici… mais quelque chose me dit que ce sera pour le second volume !

En ouvrant cet ouvrage, il y aura deux types de réactions. Soit au bout de 5 pages, le style de Jones aura fini de vous rebuter et vous fermerez le livre aussitôt. Mais ceci serait bien dommage, car à l’inverse des autres qui seront charmés, voire conquis par l’ambiance graphique qui se dégage de ce recueil, vous passerez à côté d’histoires qui sont pour la plupart très bien écrites, avec des vilains et alliés qui voyagent dans une ambiance sombre, fantastique, et prenante. Ce tome ne comprend peut-être pas les histoires les plus emblématiques du Chevalier Noir, mais il n’en reste pas moins un classique pour qui veut connaître toutes les périodes artistiques de notre septuagénaire préféré. Et puis Kelley Jones, et cette cape, mince quoi !

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ArnoKikoo

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Biggy
9 années il y a

Je le veux :(

ramzacom
ramzacom
9 années il y a

on retrouve là le duo à l’origine du Batman VS Dracula, j’y avais adoré le chara-design.

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