The Art Of #1 : James Jean

Petite présentation le temps d’un premier numéro…

The Art Of est une nouvelle chronique mensuelle richement illustrée (cliquez sur les images pour agrandir), ayant pour seule prétention de vous faire connaitre ou redécouvrir l’espace de quelques minutes, de grands artistes issus, exclusivement ou non, du monde des comics. Bien sûr, je me dois de centrer ces portraits d’artistes sous la bannière bienveillante de DC Comics, mais je ne bouderai aucun travail digne d’intérêt s’il se trouve chez un autre éditeur dans la mesure où DC Comics n’est pas spolié. Parce que le comics est un art, il convient de mettre en lumière ces artistes d’hier, d’aujourd’hui mais aussi en devenir. La chronique ne sera pas un espace de promotion pour de jeunes artistes, mais je n’exclue pas de vous présenter de nouveaux talents sous forme d’entretiens dans la mesure où DC Comics reste l’objet central.

Je souhaite faire de cette chronique un rendez-vous dominical interactif. C’est bien vous qui choisirez les artistes des prochains The Art Of. Pour cela rendez-vous sur le forum du site où un topic sera consacré à la chronique, ou sur Facebook, Twitter, Google + (non là je déconne), avec le hashtag #TheArtOf.

Vu que le choix vous est donné pour la suite, je me permet d’aborder pour ce premier numéro un artiste auquel vous n’auriez sans doute pas pensé. C’est un choix un peu spécial car il ne s’agit pas d’un dessinateur de comics à proprement parlé mais d’un artiste complet, peintre et illustrateur de couvertures : James Jean.

DES DÉBUTS PROMETTEURS

James Jean est né en 1979 à Taipei, capitale de Taïwan, mais il a été élevé à Parsippany-Troy Hills, une ville du New Jersey aux États-Unis. Enfant, James Jean achetait régulièrement des comics au Funny Books Comics & Stuff sur Beverwyck Road, sans se douter qu’un jour ce sont ses illustrations qui trôneraient fièrement dans les étals des comics shop (1). À 18 ans il entre à l’École d’arts visuels de New York, un des établissements les plus prisés en matière d’art et de dessin. Pour la petite anecdote, Gerard Way, auteur du comics Umbrella Academy encore en cours de publication chez Dark Horse et dont les couverture sont signée James Jean, a ciré les bancs de cette école, tout autant que Joe Quesada, Bryan Singer, l’incroyable Dash Shaw, et bien d’autres artistes gravitant dans le monde du comics aujourd’hui (2).

Il sort diplômé de l’école en 2001 pour être recruté dans la foulée comme cover artist par DC Comics. Tout en conservant un pied dans l’illustration publicitaire, comptant comme clients notamment le Time Magazine, Rolling Stone, Atlantic Records, Playboy, Prada (3) et bien d’autres, il se consacre progressivement – c’est un euphémisme – entièrement à ce qui fait aujourd’hui sa renommée, son travail d’illustration pour DC Comics et notamment Fables.

LA FABLE DE L’ARTISTE ET DE L’ÉDITEUR

Dans un article publié sur son site, James Jean se rappelle du contexte de ses débuts chez Vertigo: « J’ai d’abord reçu l’appel pour créer la première couverture de Fables en Octobre 2001 , un mois après que ma colocataire, Yuko Shimizu [illustratrice pour Vertigo], et moi regardions les tours jumelles s’effondrer depuis notre grenier à Greenpoint, Brooklyn. Peu de temps après, j’ai pris un avion pour l’Autriche pour y passer 3 semaines, j’ai vu les nouvelles de la peur de l’anthrax depuis l’étranger [affaire des colis piégés d’anthrax], pour retourner enfin à la maison où un message de Vertigo m’attendait sur mon répondeur, me demandant de créer les cinq premières couvertures de Fables. » (4)

De leurs côtés, Bill Willingham au scénario, Lan Medina aux dessins (Mark Buckingham n’arrive qu’à partir du 6ème numéro), Steve Leialoha et Craig Hamilton à l’encrage (uniquement sur ces 5 premiers numéros) et Sherilyn Van Valkenburg aux couleurs (Daniel Vozzo ne travaille qu’à partir du numéro 6), s’activent sur la série (5).

Fables débute en juin 2002 (tpb #1 en avril 2003) et le succès ne se fait pas attendre puisque, souvenez-vous, la série remporte pour ses 5 premiers numéros la même année les Eisner Awards de la meilleure nouvelle série ainsi que de la meilleure histoire à suivre (que la série a également remporté en 2005 et 2006) (6). James Jean remporte quant à lui son premier Eisner Award l’année suivante, celui du meilleur artiste de couverture, essentiellement grâce à son travail sur Fables, série toujours saluée par la critique, mais également sur Batgirl. En 2005, James Jean remporte de nouveau l’Eisner du meilleur artiste de couverture toujours chez DC Comics, pour Fables, Batgirl mais aussi Green Arrow.

DC Comics a établi très rapidement James Jean comme un artiste incontournable et d’une constance remarquable pour son éditeur avec lequel il compte finalement 6 Eisner Awards du meilleur artiste de couverture entre 2004 et 2009 pour Fables et 3 Harvey Awards entre 2005 et 2007 toujours pour Fables (7).

En 2008 James Jean annonce vouloir mettre un terme progressivement à son activité d’illustrateur pour se consacrer entièrement à la peinture comme il l’explique dans un billet publié sur son site, et non sans surprise adressé à l’équipe de Fables : « J’ai arrêté de travailler pour des magazines, livres et publicités, et j’ai essayé d’entamer une transition vers des travaux plus personnels… jusqu’à présent Fables a représenté le dernier vestige de ma carrière d’illustrateur. […] Ça a été une occasion extraordinaire de travailler sur Fables ces 7 dernières années, mais je pense qu’il est temps pour moi de me consacrer à temps plein à la peinture et divers travaux personnels. […] Ça a été un vrai privilège de travailler au sein d’une équipe produisant une si bonne chimie sur le papier, et de faire partie d’une série si importante qui a diverti et rapproché tant de gens. » (4) La dernière couverture de Fables signée James Jean est celle du numéro 81, bouclant ainsi 8 riches années d’assiduité artistique et d’une qualité constante sur Fables.

UN ARTISTE AVEC UN GRAND « A »

James Jean reste aujourd’hui l’artiste le plus primé aux Will Eisner Awards dans la catégorie « Best Cover Artist » avec 6 récompenses entre 2004 et 2009, soit 2 de plus qu’Alex Ross lors de l’apogée de ce dernier en tant que cover artist juste avant les années 2000. James Jean a également été primé dans les deux villes de son cœur, titulaire de deux médailles d’or et une d’argent de la Société des Illustrateurs de Los Angeles et une médaille d’or de la Société des Illustrateurs de New York.

Depuis 2008 et sa « retraite » en tant qu’illustrateur, James Jean expose fréquemment, lors de présentations individuelles mais aussi collectives, essentiellement à New York et Los Angeles. En 2008, James Jean se retrouve au Riversade Art Museum avec des artistes tels que Glenn Barr, Dave Cooper, Bob Dob, Joe Ledbetter, Shag, Amy Sol, Michael Whelan, Tara McPherson, pour représenter un art underground héritier de Robert Crumb et de mouvements « Pop Surrealism » californiens de la fin des années 70 comme le « Lowbrow Art ». (8) En 2009, la galerie Jonathan Levine de New York organise la première exposition individuelle de James Jean nommée « Kindling ». (9) La même année, James Jean participe à la Biennale Giant Robot au Japanese American National Museum. (10) En 2010 pour sa première exposition à l’étranger, James Jean partage l’affiche de la Parco Factory de Tokyo avec son collègue de Los Angeles David Choe. (11) James Jean expose en 2011 à la galerie Martha Otero de Los Angeles avec une exposition intitulée « Rebus » (12), qu’il représente également au Los Angeles County Museum of Art (13). Pour sa seconde exposition à l’étranger, James Jean se rend à Londres au Ivory & Black Soho lors d’une exposition collective intitulée Gin & Juice. (14) En 2013 on pouvait retrouver James Jean de nouveau à la galerie Martha Otero lors de l’exposition « Vitruvius », en compagnie d’artistes tels que Gregory Euclide, Jonathan Brand, Jacob Hashimoto, Saelee Oh, Alexander Tarrant ou encore Eric White. (15) C’est cette même année que James Jean expose à la galerie Jack Tilton de New York sa série « Parallel Lives ». (16)

Jusqu’à présent les expositions de James Jean se sont quasiment cantonnées au sol américain mais il ne faut pas désespérer de voir un tel artiste débarquer un jour en France, surtout depuis que les artistes de Comics s’exposent de plus en plus dans la capitale française, à l’image de l’exposition prochaine d’Alex Ross au Mona Bismarck American Center for Art & Culture du 5 mars au 8 juin 2014. (17) Affaire à suivre pour celui que j’aime appeler le Maxfield Parrish du comics. En attendant je vous invite à vous procurer les tomes de Fables actuellement publiés chez Urban Comics dans la collection Vertigo Classiques et plus particulièrement l’artbook (en anglais) de James Jean sur Fables publié par Vertigo, encore trouvable si vous cherchez bien et que votre compte en banque vous le permet.

Je vous retrouve le premier dimanche du prochain mois pour un nouveau The Art Of. N’oubliez pas de participer à la sélection du prochain artiste sur les réseaux sociaux #TheArtOf (ne vous gênez pas de partager avec ce hashtag également) et aussi sur le topic dédié à la chronique sur le forum du site.

Notes :