Dossier – Bilan de l’ACBD : quid au niveau des comics ?

urban comics
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Comme chaque année, l’Association des Critiques et Journalistes de Bande-Dessinée (ACBD) a publié son bilan de l’année précédente. On y trouve plein de chiffres intéressants, ainsi que des analyses très pertinentes sur l’avenir de la bande-dessinée, notamment du point de vue de la BD dématérialisée ou numérique. Les comics en version française sont évidemment touchés par cette longue analyse fruit de nombreuses heures de travail. Nous avons donc jugé bon de vous en extraire quelques statistiques et conclusions dessinées par l’ACBD.

La BD en Europe, état des lieux

Tout d’abord, en 2013, il faut savoir que pour la première fois depuis de nombreuses années, la production de BDs a diminué. 5159 titres ont été tirés en 2013, et c’est 406 de moins qu’en 2012. Ceci ne se limite évidemment pas aux super-héros, mais peut être mis en relief avec la bonne santé étonnante du marché du comics, à laquelle nous reviendrons plus tard. Nous pouvons déjà dire que selon les chiffres de l’ACBD, le marché francophone est l’un des plus ouverts à la bande-dessinée étrangère, avec plus 2257 nouvelles BDs traduites, dont 461 provenant des États-Unis (la grande majorité restante provenant, sans surprise, du Japon et des autres pays asiatiques). Malgré ces chiffres impressionnants, le franco-belge reste le secteur le plus prisé par les lecteurs et ce, malgré une légère diminution, qui touche également le manga. En revanche, le secteur du comics américain est le seul à observer une amélioration ! En 2012 on comptait 366 titres parus, en 2013 c’est 407 aventures de super-héros et consorts qu’on dénombre dans les rayons! Une bonne nouvelle pour nous autres amateurs de DC Comics !

Autre bonne nouvelle, Média-Participations, avec 739 sorties cette année 2013, qui est l’énorme groupe d’éditeurs auquel appartient Urban, se fait le plus présent sur le marché d’un point de vue économique. En terme de chiffres de parutions ils sont cependant dépassés par Delcourt, qui ne se hisse pourtant qu’à la troisième place du point de vue économique. Autrement dit, Delcourt sort plus de bande-dessinées mais se fait moins d’argent. C’est une réussite pour Média-Participations, et on pourrait croire qu’Urban n’y est pour pas grand-chose dans ce succès puisque le groupe a quand même de vieilles locomotives comme Dupuis ou Dargaud, mais étonnamment, en termes de nombres de sorties, c’est Kana, principalement actif dans le manga, qui est en tête, avec 174 ouvrages parus en 2013, suivi par Dupuis (151) et Urban Comics se place en troisième place avec 127 sorties, ce qui signifie devant des mastodontes comme Dargaud et Le Lombard ! À noter que nous parlons toujours ici de titres sortis et non de chiffres de vente, mais la conclusion optimiste persiste : Urban est dorénavant un des atouts de Média-Participations sur un marché européen qu’il domine, suivi par les grosses boîtes que sont Glénat, Delcourt et enfin Madrigall (où on trouve notamment Casterman). Vous vous demandez peut-être où sont Panini dans tout ce mic-mac, eh bien ils sont loin derrière les parts de marché disputées par ces quatre géants, avec à peine 318 ouvrages sortis, comics et mangas confondus (contre 265 en 2012).

Si on se concentre sur les comics ?

Mais si on se concentre sur les comics, où en est la situation ? Eh bien, il faut dire que si le secteur est en merveilleuse santé, c’est avant tout grâce à la série The Walking Dead, éditée par Delcourt, qui compte deux tomes en 2013 tirés respectivement à 120’000 et 100’000 exemplaires. Derrière ça, on compte des adaptations des Simpson et des volumes Garfield. Il faut descendre bien plus bas, autour des 20’000 exemplaires, pour trouver des comics super-héroïques comme Kick-Ass et Hit-Girl (Panini). Côté Urban, seuls quelques titres Batman, dont le fameux ‘La Nuit des Hiboux‘, arrivent à se hisser au-dessus de la barre des 20’000 exemplaires (au-dessus de laquelle ils peuvent se targuer d’être considérés comme des best-sellers).

Du point de vue de titres parus, le secteur de la bd est en baisse. Que ce soit la franco-belge ou le manga (un secteur pourtant en hausse depuis dix ans qui accuse des baisses de vente de près de 10%), le secteur des comics est le seul à s’en tirer avec les honneurs, avec 461 titres publiés en 2013, contre 448 en 2012, pour une hausse de 11.84 %. Et même si Garfield et les Simpsons se partagent le podium en termes de chiffres de vente, si on regarde en terme de proportion de publications, les super-héros écrasent le reste avec un gros 83.51 %, soit 385 albums, le reste étant des séries humoristiques comme celles précédemment citées.

Dire que le comics est un marché très concurrentiel est un euphémisme, et c’est Delcourt qui s’en tire le mieux avec 41.4% d’exemplaires vendus de Janvier à Mai 2013 d’après Ipsos, un exploit à imputer au succès de Walking Dead et des comics Star Wars. Toujours d’après Ipsos, le label Urban Comics se hisse à la seconde place sur le marché du comics en pesant 26.8 %, ce qui le fait dépasser de peu Panini et ses 26.2% ! Si l’avance est maigre, on peut saluer l’exploit réalisé par un jeune éditeur à sa deuxième année d’existence face à un vétéran installé depuis longtemps sur le marché. Niveau kiosque en revanche c’est Panini qui l’emporte, en éditant 35 des 41 magasines super-héroïques en circulation en France. Leurs tirages oscillent entre 20’000 et 30’000 exemplaires. Les trois magasines Urban oscillaient entre 15’000 et 19’000 exemplaires à chaque tirage, et en troisième position on trouve Delcourt qui compte un tirage 15’000 exemplaires pour Walking Dead – Le magazine officiel, et de 12’000 exemplaires pour Star Wars – The Clone Wars. Entre la librairie et le kiosque, les chiffres s’inversent véritablement entre Delcourt, Urban et Panini, traduisant bien les priorités respectives que se fixent les trois éditeurs. À noter que le magasine Comic Box, édité par Panini, se targue d’un tirage bimestriel de 25’000 numéros.

L’offre numérique

L’ACBD a également effectué une analyse très intéressante de l’offre numérique et digitale, soulignant les avantages et les désavantages de cette alternative à la consommation traditionnelle de bd. Les deux meneurs sur le marché francophone sont Izneo et Numilog, qui ne concernent que peu les lecteurs de comics, en revanche il est surprenant de trouver à la troisième place le site américain Comixology, dont nombreux de nos lecteurs sont de fidèles clients, qui, en se hissant sur un podium francophone, est récompensé par les moyens déployés pour proposer à ses visiteurs des titres en français. L’ACBD recense pas moins de 500 titres en français disponibles sur Comixology, et souligne les avantages de lecture sur écran fournis par le site : affichage plein écran de chaque case, modèle narratif plus dynamique, zoom caméra, etc. Nous ne pouvons que saluer la pertinence des observations faites par l’ACBD, qui illumine les efforts faits par Comixology pour rendre la lecture numérique confortable ! Selon l’étude Babélio, 42% des amateurs de bande-dessinée se seraient déjà essayé au format numérique et quelques 18%  en seraient des consommateurs réguliers.

Dans un autre domaine, l’ACBD souligne la progression des sites spécialisés, en tête desquels caracole de loin le célèbre bedetheque.com  avec plus d’un million de visites mensuelles. L’étude démontre également que les comics sont bien représentés dans ce domaine. Dans le même ordre idée, 2013 a été la première année où la Japan Expo/Comic Con de Villepinte a attiré plus de visiteurs que le festival de la bande-dessinée d’Angoulême, avec près de 232’000 visiteurs contre un peu plus de 200’000 pour le festival de bd classique.

En Conclusion

Les observations faites par l’ACBD sont extrêmement réconfortantes de notre point de vue de lecteurs de comics, à fortiori en tant que fans de la Distinguée Concurrence. Non seulement, dans un secteur encore bien portant mais en baisse pour la première fois depuis de nombreuses années, le comics peut se vanter de subir une hausse, mais en plus Urban aligne les exploits en devançant Panini dans le domaine des comics librairie, et en s’imposant devant Le Lombard et Dargaud en terme de nombres de sorties au sein de son groupe Média-Participations. Du côté du numérique, il est impressionnant de voir que Comixology soit parvenu à se faire remarquer outre-atlantique, l’occasion de souligner les efforts accomplis par le site américain pour se développer sur le marché français.

Si les prouesses d’Urban semblent être largement dues à Batman, il trahit aussi l’arrivée massive de nouveaux lecteurs sur le marché du comics puisque c’est un tout un secteur qui subit une montée de popularité. Les raisons à ça ont déjà été évoquées : le succès des films de super-héros, des jeux Arkham, de la série Walking Dead, et, dans une moindre mesure, l’arrivée d’Urban. Faut-il craindre qu’Urban se concentre encore davantage sur Batman, encouragée par les ventes impressionnantes de la chauve-souris? Possible, mais parmi les nouveaux lecteurs de comics il y a certainement une proportion non-négligeable de curieux, en témoignent les efforts d’Urban pour proposer une offre alternative fournie avec ses gammes Vertigo et Indies. Le succès d’ouvrages dits « risqués » comme Kamandi ou la Jack Kirby Anthologie va dans le même sens, et la récente nomination de la Jack Kirby Anthologie au prestigieux Festival d’Angoulême ne pourra que contribuer à donner plus de visibilité aux comics d’âges révolus.

L’image de Panini souffre de la comparaison avec Urban. On constatait déjà des différences radicales en terme de contenu éditorial, qualité des ouvrages, rapport quantité de pages / prix, systématisation des réimpressions, etc. Aujourd’hui les chiffres viennent s’ajouter à ce constat. Est-ce que ça annonce du mauvais pour l’éditeur italien? Au contraire, puisqu’il profite également de la montée des ventes de comics. Le modèle fourni par Urban a d’ailleurs de fortes chances de l’inciter à faire davantage d’efforts pour proposer à ses lecteurs des ouvrages de meilleure qualité. Au final, grâce à Urban, le futur s’annonce radieux pour tous les lecteurs de comics, et pour ceci, on les remercie du fond du coeur.

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TheRiddler

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mavhoc
10 années il y a

Bon dossier, une bonne idée de rendre plus lisible l’aspect comics.
Relativisons sur un point cependant : le marché du comics est difficile à étudier en France car il faut compter les rééditions d’une même œuvre (ceux qui auront déjà Killing Joke chez Panini ne le racheterons pas en mars chez Urban) … De plus, il y a le système de VO également. Bref, deux éléments qui rendent plus difficile de se faire un avis sur ce marché qui, pourtant, empiriquement, est en évolution …
Tous les commerçants semblent le dire, depuis plus d’un an, le comics évolue bien en France !

Nereb
Nereb
10 années il y a

Merci pour cet excellent dossier ! :)

Barbuz
Barbuz
10 années il y a

J’ai une remarque d’ordre technique et une question.
La remarque, c’est qu’l y a une différence entre le tirage (c’est-à-dire le nombre d’exemplaires imprimés) et la diffusion (c’est-à-dire le nombre d’exemplaires vendus).
Et ma question : J’imagine que l’on ne sait rien de la diffusion, c’est-à-dire la proportion (ou le nombre) des tirages qui a été effectivement vendue ?
Merci.

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