L’humeur du Lundi #31 – Johns V Didio : Dawn of DC

Au mois de novembre dernier je m’étais risqué à faire un édito légèrement politisé pour réagir à l’élection de Donald Trump. L’envie d’aller dans ce sens n’est pas forcément ce qui me manque aujourd’hui mais ce serait aller à l’encontre de la volonté de DC Planet de parler culture, comics, et DC. Et vous avez certainement envie d’entendre autre chose que ce que des dizaines de milliers de médias sont en train de répéter un peu partout sur les internets. Alors parlons politique, oui, mais politique interne chez DC.

Avant toute chose, les faits dont je vous discuter ici sont rapportés de bruits de couloirs, de discussions, etc. S’il est intéressant d’en parler, il faudra tout de même prendre des pincettes sur l’ensemble, puisque rien n’est officialisé (et on comprendra facilement pourquoi). Mais on pourra mettre ça en comparaison à ce que l’on peut voir ces derniers temps chez DC Comics. Il y a près d’un an, après cinq ans de manoeuvres éditoriales pour le moins houleuses, DC a décidé d’amorcer un grand virage dans sa politique et de revenir à une ligne plus classique, qui lui permettrait de retrouver ce qui fait la personnalité de ses personnages, de son univers, mais aussi de retrouver son lectorat – avec aussi la possibilité de l’agrandir.

DC Rebirth n’est pas tant un relaunch dans la forme qu’un retour au sources dans le fond. Si on peut débattre de l’utilité de rapprocher l’univers DC d’une autre oeuvre culte de l’éditeur, force est de constater que le succès est là pour une bonne partie des séries publiées, tant au niveau critique que commercial (je répète à qui veut que DC arrive à placer 30 singles grosso modo dans le Top 50 des ventes, ce qui n’aurait jamais été imaginable il y a encore un an). Et ce succès, celui du Rebirth, on peut l’attribuer volontiers aux plans de Geoff Johns, présenté comme le Sauveur de l’univers DC. Avec son one-shot, les grandes lignes dessinées pour l’ensemble de l’éditorial, une autre façon de voir les crossovers, et une cohésion dans les tracés de ses personnages, beaucoup de lecteurs sont globalement satisfaits de ce qui est actuellement produit. Certes, on trouve des petits moutons noirs là où on n’en voudrait pas (ex : Justice League qui est très loin de ce qu’on pourrait attendre du fer de lance de l’éditeur), mais comparé à la période DC You (qui avait ses qualités aussi), la Trinité ne s’est jamais aussi bien portée.

Sauf que chez DC Comics, il n’y a pas que Johns malgré son statut de Chef créatif. Et l’autre personnage auquel on s’intéressera c’est Dan Didio. Le fameux Anti-Didionitor. C’est à lui que l’on attribue l’opération New 52 puis DC You, et un bon nombre de décisions éditoriales plus ou moins controversées (les mois spéciaux, les couvertures 3D, par exemple, mais aussi les décisions sur le statut marital des personnages). Lorsqu’on regarde avec un tout petit peu de recul, on se rend compte que l’opposition entre Didio et Johns s’est toujours manifestée, créativement parlant, l’auteur n’ayant jamais voulu suivre complètement les directives imposées au reste des équipes. On pensera à la continuité de son run de Gren Lantern qui n’avait pas été touché par le reboot, mais aussi ce qui fut encore plus flagrant avec son dernier baroud sur Justice LeagueDarkseid War, qui était complètement déconnecté du reste de l’initiative DC YouJohns fait partie de ces auteurs qui ont assez d’importance pour échapper au contrôle de Didio, qui lui répond à priori directement à Diane Nelson, la Présidente de DC Comics.

Passation de pouvoirs, donc, puisque si les New 52 étaient marquées par le sceau du DidioRebirth à l’inverse est estampillé Johns. Et si tout semblait assez fluide pour le moment, on a désormais les premiers pas de résistance de l’Anti-Didionitor, qui a envie de se faire à nouveau entendre. J’en veux pour preuve l’annonce de la ligne Dark Matter, dont Didio fera partie intégrante puisqu’il sera à l’écriture avec Justin Jordan sur l’un des titres. On retrouve une envie de faire du « pas super-héroïque » au sein des publications DC, avec une différence majeure par rapport à DC You : c’est que l’éditeur fait un gros pari sur les artistes impliqués en sélectionnant parmi ses têtes d’affiche : Jim LeeJohn Romita Jr.Andy Kubert ou encore Greg Capullo. Et si on en croit les bruits rapportés, Johns l’a un peu mauvaise de voir tous ces gros noms être occupés de ce côté au lieu de servir la ligne Rebirth sensu stricto. Ce qu’on peut comprendre, bien que le roster actuel de la ligne principale n’ait pas à pâlir quand on trouve du Janin, du Barrows, du Sharp, du Ferreyra ou du Schmidt. En même temps on peut aussi comprendre avec des concepts aussi obscurs, sans un argument de vente par le nom, j’aurais beaucoup de mal à voir qui irait par lui-même jeter un oeil à cette ligne Dark Matter. Parce que surviendra toujours l’argument du « si on veut autre chose que du super-héros, c’est chez les indés qu’il faut se tourner » – un constat difficile à réfuter en toute bonne foi.

Faut-il voir d’un mauvais oeil cette ligne, ou l’opposition type « guerre froide » entre Didio et Johns ? Pas forcément. A sa défense, Didio n’a pas que des torts. DC You a proposé et donné sa chance à quelques très bonnes séries, le prix à payer étant de se taper une Trinité méconnaissable. Le relaunch des licences Hanna-Barbera a aussi été l’occasion de donner un souffle nouveau, et une certaine qualité, à des licences qu’on aurait pas imaginé revoir en comics aujourd’hui. On peut donc parier sur la positive en se disant que les idées de Dark Matter seront bonnes – parce que les auteurs suivront aussi, James Tynion IV et Justin Jordan se sont par exemple montrés plutôt convaincants ces derniers mois. De même, il n’est pas sûr que « l’opposition » supposée, et légèrement constatée soit délétère pour l’éditeur. On observe là un schéma inverse à celui des New 52, puisque c’est Didio qui se forge sa petite île au sein de la grande marée Rebirth, mais si sa petite lubie permet effectivement d’apporter une réelle nouveauté à DC, qui sera là pour râler ? Le pari est à mon avis double pour l’éditeur, car en cas de ratage (critique, mais surtout commercial), je pense que les possibilités pour l’ami Didio seront plus que limitées ensuite. Souhaitons donc des choses positives à Johns et Didio pour qu’ils puissent faire vivre, séparément et ensemble à la fois, le vivier de publications DC. L’essentiel, in fine, c’est que le lecteur en sorte gagnant.

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The Bat
6 années il y a

Je me dis qu’un peu de compétition ne peut pas faire de mal. Si la ligne Dark Matters nous surprenait (personnellement j’y crois) on aurait de la qualité un peu partout : Rebirth incluant Dark Matters, Young Animal, Wildstorm et même Hanna-Barbera. Ce n’est pas tous les jours que DC réussit à autant satisfaire.

Raptaman
Raptaman
6 années il y a

Je crois moyen à Dark Matters, mais on verra bien. Je pense surtout qu’il reste beaucoup à exploiter dans Rebirth et faire de la qualité avec ça (qui a dit Martian Manhunter et Hawkman #Kappa) et je trouve que c’est un peu dommage de se « disperser » vers des nouveaux personnages qui encore une fois personnellement, m’ont l’air pas bien ouf. Mais s’il doit y avoir une guerre Didio vs Johns, mon camp est déjà choisi. J’ai beau ne pas aimer tout ce que fait Johns (j’ai juste horreur de son Batman, alors que Batman = best personnage ever <3), il nous a offert un merveilleux run sur Green Lantern et une direction incroyable sur cette univers (que le gueux Venditti souille je trouve), tandis que de l'autre côté Didio, voilà quoi.

Winterwing
6 années il y a

Je crois que c’est la première fois depuis 2011 que je lis un article qui n’attribue pas bêtement la responsabilité des New 52 à Johns juste sous prétexte qu’il a écrit Flashpoint. Bravo !

Vittorini
6 années il y a

Très bon article. Je n’ai pas connaissance de ces fameuses rumeurs mais, quand bien même, je trouve que Dark Matter est une bonne initiative : Une fois l’intrigue Rebirth bouclée, ce serait une bonne chose d’embrayer naturellement sur une intrigue un minimum attrayante et Dark Matter peut très bien être là pour préparer le terrain et servir de passerelle au post-Rebirth. Pour l’instant, on va les laisser étendre (ou tenter du moins) le DCU, on verra bien ce que ça donne.

The Trickster
The Trickster
6 années il y a

Je hais Dan Didio et j’ai très envie qu’il retourne à la télévision (L’excellente série Reboot) et qu’il lâche DC comics.

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