Dossier – Le Superman des Fleischers, ou l’âge d’or du grand dessin animé

Sommaire

C’est en 1941, trois ans après avoir été inventé par Jerry Siegel et Joe Shuster, que Superman s’anima pour la première fois depuis les planches figées des comics de l’époque jusqu’aux écrans de cinémas des salles Américaines. Le public l’avait entendu parler un an plus tôt, dans le sérial radiophonique adapté de ses aventures, qui fut pour l’anecdote le premier à lancer la désormais célèbre catchphrase « Look ! Up in the sky ! », et c’est par le même élan de popularité que naquit ce qu’on appelle aujourd’hui le « Fleischer’s Superman« , série de dessins animés produite par les studios Fleischer pour le studio Paramount, unique en son genre dans l’histoire des adaptations de comics et dans celle du cartoon à l’Américaine.

Ce projet voit le jour sur un marché de l’animation très différent de ce que les années et les évolutions techniques l’ont amené à devenir. Dans ce qu’on qualifie d’âge d’or du dessin animé, la télévision n’existe pas. Les cartoons, qui pour l’anecdote précèdent l’apparition des premiers films « live-action » via le Praxinoscope de Charles-Emile Raynaud dans une forme encore très rudimentaire, sont alors projetés avant les longs-métrages dans les cinémas (on y adjoindra aussi, dans la même logique de « l’avant séance » les premiers journaux et reportages télévisés, en particulier pendant la Guerre pour les nouvelles du front), une tradition qui continuera de courir jusqu’au début des années ’60, vite rattrapée par l’apparition des premiers postes domestiques de télévision.

Déjà à l’époque, Walt Disney et son emblématique créature, connaissent un succès retentissant auprès du public (petits comme grands). Mais, dans l’ombre de cette immense popularité, deux studios connaissent un essor grandissant. Le premier et le plus ancien est celui des Fleischers, deux frères venus d’Autriche qui auront pour eux (et Max, en particulier) de lancer le premier cartoon sonore en 1926, My Old Kentucky Home, deux ans avant le Steamboat Willie de Disney et un an avant ce qu’on considère comme le premier film sonore, Le Chanteur de Jazz, en 1927. Ce long-métrage est d’ailleurs né d’un autre studio capital à l’évolution du héros, Warner Brothers, qui de leur côté donnent vie aux héros Merrie Melodies / Looney Tunes, dont un autre rongeur se distinguera à la même époque.

Avec Superman, les Fleischers vont proposer quelque chose d’inédit dans le paysage des dessins animés animaliers, comiques et souvent musicaux : un dessin animé à la narration cinématographique, qui ira chercher dans la BD et les magazines de pulp une exigence esthétique et scénique jamais vue dans les aventures des Mickey, Bugs et Popeye. Longtemps avant la décrue de moyens qui suivit l’ère Hanna-Barbera, ces cartoons étaient d’authentiques travaux complexes et aboutis, avec une énergie et un soin dans l’animation qui continuent d’impressionner, encore soixante-douze ans après leur création.

1. Un peu d’histoire

Max Fleischer, artiste/inventeur

La famille Fleischer émigre d’Austro-Hongrie en 1887 dans le ghetto juif de Brooklyn. C’est dans la région de New-York que les frères passeront leurs jeunes années, où le plus âgé Max, décidé à réussir, étudiera d’un côté l’art et de l’autre la mécanique avant de rejoindre la revue The Brooklyn Daily Eagle, où il apprendra la photographie, la photogravure et deviendra avec le temps membre de l’équipe des dessinateurs. Avant d’être animateur, il réalisera ses propres comic-strips à une époque où le comic book contemporain n’a pas encore vu le jour.

Sa fascination pour la technologie le mènera, après avoir enrichi ses connaissances de quelques autres boulots, au poste d’éditeur artistique pour le magazine Popular Science, une des plus anciennes revues scientifiques aux Etats-Unis qui continue encore aujourd’hui de publier. C’est au contact de ce monde de l’innovation qu’il va, en parallèle de l’apparition des premiers cartoons au cinéma quand la Première Guerre Mondiale se met en marche, inventer le Rotoscope, une technique d’animation révolutionnaire qui consiste à capturer un sujet réel en mouvement, pour ensuite agrandir l’image prise sur pellicule par un jeu de lentilles et dessiner sur ses contours un dessin qui n’apparaîtra que plus vrai, car directement pensé en mouvements.

La rotoscopie, ancêtre de la motion-capture, lui permettra de créer Ko-Ko le Clown en 1921 pour sa première série animée, Out of the Inkwell. Un genre de grand-père de L’Alinéa où créature et créateur se répondent dans une technique d’animation déjà aboutie, mais à laquelle manquait encore les moyens de ses ambitions. La décennie 1920 voit Max et son frère travailler ensemble à la réalisation d’une série de courts en parallèle des studios Disneys, et se faire les armes sur leur premier personnage. Mais ce n’est qu’en 1927, après la faillite de leur distributeur, que les Fleischers obtinrent de Paramount un accord de distribution et de financement qui leur permettra de lancer Fleischer Studios, le studio qui allait les faire décoller.

Premiers succès

Après trois années passées à surfer sur le succès des cartoons chantant, la série des Talkartoons, un épisode baptisé Dizzy Dishes, une parodie canine de la chanseuse Helen Kane (qui fit d’ailleurs un procès à Max Fleischer un peu plus tard) attira l’attention du public. Un an plus tard, en 1931, le personnage fut recréé sous des traits humains, et apparu comme une version candide et sexy des chanteuse de jazz et de cabaret de l’époque. Le studio venait de créer Betty Boop, leur première star faite pour le succès. Baptisée au départ « Jazz Baby », le personnage connut un accueil retentissant quasi immédiat, et s’attira au passage quelque polémique pour ses reprises promotionnelles de titres de chanteurs noirs de l’époque, Louis Armstrong et Cab Calloway.

C’est à travers Betty Boop que les Fleischers trouvèrent leur style, dans la continuité du clown : un style plus sombre et New-Yorkais porté par des personnages plus humains que les animaux loufoques de la côte Ouest. Calqué sur les chanteuses de son époque, Betty était un personnage type de la Grande Dépression, une star  de cabaret aux allures d’enfants et aux poses sexy, qui trouva un public plus adulte que les productions de cartoons usuelles. Lancée dans l’air du dessin animé chantant, sa création représenta un succès bienvenu pour le studio, qui s’en servit ensuite pour introduire leur autre grande vedette.

Car c’est bien dans un épisode de Betty Boop en 1933 que Popeye, le marin aux gros bras fan d’épinards en boîte, fit sa première apparition animée. Adapté d’un comic strip déjà très populaire d’Elzie Crisler Seagar lancé quatre années auparavant, Popeye se dirige vers l’animation quand le responsable de sa version papier propose à Max Fleischer de lui dédier sa propre série de cartoons par épisodes. Après avoir été présenté au public en dansant le hula avec Betty, le marin devient presque instantanément la figure de proue du studio, qui en fit son sujet expérimental aux premières créations en Technicolor, et dont la popularité concurrença sérieusement celle de Mickey, jusqu’à la dépasser à différents moments de leurs vies.

De Fleischer à Famous

Rattrapés par leur succès, les Fleischers sont obligés d’embaucher pour faire face à la demande de Paramount, qui veut encore et toujours plus de Popeye. Le studio s’industrialise peu à peu, et doit freiner ses ambitions créatives quand un grève générale de cinq mois est lancée par un personnel à bout de souffle en 1937. De là débute une érosion des relations entre les deux frères et la partie artistique contre la partie business.

La même année, le vieux Walt se lance dans l’industrie du long-métrage animé avec Blanche Neige et les 7 nains, distribué par la RKO. Avec un succès immédiat qui propulse Disney à une autre échelle, désormais plus cantonnée aux projections d’avant-séance, un marché se dégage dans le cartoon au long-format, et Max Fleischer obtient après trois années à le réclamer l’autorisation de Paramount pour produire son propre film d’animation, Les Voyages de Gulliver.

Entré en production en 1938, le film obtient un financement de 500 000 dollars (de l’époque), budget que le créateur ne parviendra pas à tenir et sera amené à dépasser. Malgré de bons scores au box office, et une seconde production en chantiers (Mr Bug Goes to Town), le studio réclamera une somme importante à Fleischer pour les coûts supplémentaires, et le succès de Popeye ne suffit pas à éponger ces pertes. C’est en parallèle de ce déclin que se lancera Superman, que les frères n’étaient au départ pas prêts à créer, de peur de se lancer dans une autre aventure trop gargantuesque.

C’est alors que leur vînt l’idée, pour effrayer Paramount, de réclamer un budget considérable de 100 000 dollars par épisode, inenvisageable pour l’époque (les épisodes les plus coûteux de Popeye n’excédaient alors pas les 25 000 dollars maximums). Mais, portés par la popularité tonitruante du héros en bleu dans les kiosques et à la radio, le studio insista et négocia pour un entre-deux de 50 000 dollars, déjà une somme conséquente, pour le premier des neuf épisodes que produirait le studio, les autres étant cadencés à une moyenne de 30 000. Ne pouvant alors plus refuser et galvanisés par ce confort financier, les Fleischers se lancèrent dans l’aventure, et le succès fut à nouveau au rendez-vous. A son pic de popularité, Paramount ose même un procédé nouveau dans le système promotionnel des années ’40 : des bande-annonces pour les épisodes, pratique jamais utilisée pour un cartoon, ou n’importe quel contenu aussi court, en plus de posters promotionnels dédiés.

Mais ce succès se montra malheureusement trop tardif, et lors de la sortie de Mr Bug Goes To Town initialement prévue au Noël de 1941, la plupart des distributeurs n’en voulurent pas (on attribue ce rejet généralisé au bombardement de la base Américaine de Pearl Harbor survenue le 5 décembre de la même année), et Paramount perdit une somme considérable sur les coûts de publicité et d’impression des copies. Les créations en parallèle de Superman proposées par le studio ne trouvèrent pas leur public, et après des mois de pertes sèches, les deux frères furent amenés à démissionner, cinq mois avant la clôture de leur contrat avec le producteur.

Famous Studios, une sorte de seconde enseigne qui récupéra une partie du savoir faire et du matériel de Fleischer Studios déplacé à Miami (sans les Fleischers) reprit alors les rênes et s’attacha à produire les huit épisodes de Superman qu’il restait à fabriquer, tandis que Popeye et Betty continuèrent d’évoluer loin de leurs créateurs pour les décennies à venir.

2. Look ! Up in the sky !

Able to leap tall buildings in a single bound

https://www.youtube.com/watch?v=sjdnCC6n4xk

Le premier cartoon Superman des Fleischers est lancé le 26 septembre 1941, et est immédiatement nommé aux Oscars dans la catégorie Meilleur Court d’Animation. Basé sur la même technique de rotoscopie que les travaux du créateur jusqu’à présent, celui-ci présente les origines du héros (à une époque où les parents Kent n’ont pas encore été inventés) dans un résumé à grande vitesse, où on reconnaît déjà les codes et gimmicks du sérial radiophonique parallèle. Les slogans, le résumé lyrique des propriétés du Kryptonien, jusqu’au casting vocal qui récupère Bud Collyer et Joan Alexander, voix officielles de Loïs et Clark en radio, la version animée s’inscrit dans une continuité de comment Superman était perçu par le public de l’époque, y compris avec le trait des premiers comics de Siegel & Shuster.

Une nuance cependant intervient dès ce premier épisode : à la conception de la série, Max Fleischer demande à National Comics l’autorisation de faire voler le héros en bleu. A l’époque seulement capable de sauter par dessus les buildings (comme précisé dans l’intro’), la difficulté d’animer un mouvement fluide de bonds dans les plans paysages et l’envie de libérer certaines possibilités de scénario poussent l’artiste à cette demande, qui deviendra historiquement le premier envol du Kryptonien vers des cieux qu’il ne quittera plus.

More powerful than a Locotomotive

https://www.youtube.com/watch?v=DadH3KjHZws

Mais la série se distingue dès ce premier épisode sur l’ambition portée : inspiré par l’imaginaire des savants fous de BD, elle s’oriente d’emblée vers une direction « aventure-fiction », inspirée de la SF de l’époque et de l’imaginaire rudimentaire, quasi diesel-punk des années ’40. La science faite de gros robots métalliques, de savants dans d’improbables laboratoires quasi gothiques sur fond de musique dynamique à l’image des premiers films d’aventures, voire même une version rudimentaire de Godzilla à Metropolis. Et si le bestiaire est déjà extraordinaire, la technique, surtout, est au rendez-vous. Le studio a déjà fait ses armes sur la synchronisation du son et l’usage de la Technicolor, pour un rendu colorimétrique extraordinaire qui utilise un jeu de nuances et d’éclairages inspirés tantôt par le film noir, tantôt par la BD et la peinture dans des jeux de dégradés ou de contours proprement splendides.

Plus intéressant encore : la série accentue un énorme travail de mise en scène, complètement inédite dans les séries animées. Plans débullés, plans serrés, contreplongées, gros plans et travellings, jeux d’ombres et de contrastes, zooms et travail sur le mouvement : inspirée par le cinéma expressionniste des années ’30 et les premières années du genre fantastique, Superman en tant que cartoon devient la première manifestation d’une envie (qui disparaîtra plus tard avec les versions animées ultérieures jusqu’aux années ’90) de faire en mouvement ce que les comics tentaient de faire sur papier. Tant dans les designs que dans le jeu d’une animation fluide et réaliste, la série devient un long-métrage de dessins où se mêle le talent d’artistes avec un travail de storyboards pour appuyer un énorme travail de cinématographie.

Appuyée par une économie de dialogues, quelque part à l’inverse de la BD encore très bavarde qui ne se prive pas de glisser un flot constant de répliques jusque dans ses scènes d’action, Superman semble à mi-chemin entre le cinéma muet (où on peut même s’amuser à trouver du Fritz Lang en trichant un peu) et l’animation silencieuse des années ’20. Mais là où la plupart des premiers cartoons utilisaient une représentation de plans en pied dans des décors fixes où la perspective en deux dimensions n’évoluait que rarement (on dessinait généralement un seul fond sur lesquels les personnages évoluaient de gauche à droite), Superman récupère l’énergie des Voyages de Gulliver et de Blanche Neige : pensé comme un long-métrage, où l’excellence technique se permet une folie d’effets perpétuellement travaillés.

Beware the Japanazis

Après l’éviction des frères Fleischers, apparaît en parallèle de la sortie de Mr Bug Goes to Town le bombardement de Pearl Harbor. Un séisme s’empare du cinéma, de la radio et de la BD lorsque l’effort de Guerre demande de mobiliser « les forces vives et créatrices de la nation », selon l’expression consacrée. La reprise de Superman par Famous Studios, survivant de l’appareil créatif, n’impose pas de réelle décrue dans la qualité d’animation, malgré un budget plus serré, mais le héros en bleu s’éloigne peu à peu de son esprit science-fiction pour se mettre lui aussi à botter le cul des Japonais, pratiquement au jour le jour dans une Amérique désormais frontalement opposée aux forces de l’Axe.

L’esprit pulp ne disparaît pourtant pas, et se contente en fait d’accorder comme les magazines et la BD de l’époque son imaginaire permissif (entre film noir, labo’ secrets, jungle exotique et rituels secrets, comme un Rocketeer en situation) avec la propagande du moment. Japoteurs, le dixième épisode, ouvre le bal de ce nouvel esprit instauré par Famous, et quelques épisodes plus loin, un Adolf Hitler silencieux apparaît dans la série pour le symbole et en conclusion d’une autre aventure aux confluents d’une jungle bordée de vils germains (Jungle Drums). Aux mains de ce nouveau studio, le générique n’affiche plus le fameux « Able to leap tall buildings in a single bound », dans la perspective d’un Superman désormais officiellement capable de voler.

Même à ce moment là, la série n’oublie rien de son ambiance cinématographique, et rend déjà hommage aux classiques de l’horreur à travers quelques moments, en particulier au film La Momie, qui devient l’antagoniste d’un des rares épisodes non-dédiés à l’atmosphère martiale (un autre rend hommage aux univers de Jules Verne, The Underground World). Malheureusement, la popularité du héros s’étiole dans les salles et Paramount réduit peu à peu le budget de la production. Lorsque le dix-septième épisode est projeté, l’ensemble du show aura coûté 530 000 dollars au distributeur. Ajusté à l’inflation, cette somme correspondrait aujourd’hui à plusieurs millions.

Alors que les salles décommandent peu à peu, Superman est remplacé par l’adaptation animée du comic strip de Marjorie Buell, Little Lulu. Les droits du cartoon reviennent dans l’escarcelle de National Comics, éditeur du Kryptonien à l’époque. Des versions VHS, DVD et Laserdisc seront commercialisées plus tard, jusqu’à ce que la série entre dans le domaine public et soit accessible gratuitement via les sites de streaming. Lorsqu’en 1969, Time Warner rachète DC Comics, ils récupèrent dans leurs archives les copies 35mm de l’époque, encore quelque part dans les cartons historiques du studio.

3. Hommages et légende

Décadence de dessins

Là où le dessin animé meurt, l’émission de radio directement cousine des aventures de Superman se poursuit jusqu’en 1951. Dès 1948, un sérial télévisé précédant celui de George Reeves reprend les aventures en mouvement du héros en bleu, suivies de la célèbre série Adventures of Superman dès 1952, qui durera pendant six ans en parallèle de quelques films dédiés (dont beaucoup en télévision, désormais installée dans les foyers de la plupart des familles d’Amérique). L’animation devra, elle, attendre 1966 pour voir Superman se remettre à bouger en deux dimensions. The New Adventures of Superman, commandée au studio Filmation par Mort Weisinger, est à l’image des dessins animés des années ’60, une ère pensée pour l’économie de moyens.

On y retrouve un Superman statique, au rendu extrêmement pauvre tant dans la technique que dans les scénarios et la réalisation, vers un cartoon qui assume  un postulat de quasi-motion comics. L’ère n’est plus à l’excellence des Fleischers, et quoi que cette version là soit arrivée après vingt-cinq ans de progrès dans les long-métrages de Disney et de la Warner, le monde du DA se prépare à une cale sèche sans efforts d’où ne sortiront que les versions comiques de héros animaliers pour enfants (et une génération entière portée par Scooby-Do), peu coûteuse et largement rentable.

Mais, les créateurs n’oublient cependant pas l’excellent boulot des Fleischers et de Famous. Plusieurs vont même rendre hommage à ce joli travail, parmi lesquels son grand-frère né des mêmes parents, Popeye, et un futur cousin de sa lointaine maison d’adoption, Bugs Bunny. Dès 1944, un an après l’annulation de la série, le marin aux épinards sort She-Sick Sailors, où les héritiers de Famous livrent une jolie déclaration d’amour à leur ancien travail, via un Super Popeye à la patate digne du dernier enfant de Krypton, quand de son côté, le mangeur de carottes sort en 1943 Super Rabbit, lointaine anticipation des épisodes spéciaux en hommage à DC qu’offrira la maison Merrie Melodies.

https://www.youtube.com/watch?v=ZXu-5SsJaEE

Dini, Timm, Burnett, and all the others

Les documentaires thématiques sur le cartoon Superman des Fleischers ne sont pas rares sur la toile. Et avec raison, on a beaucoup redécouvert cette série après que, de leur propre aveu, elle ait servi d’inspiration à la génération des années ’90 du dessin animé DC : Batman et Superman (l’Ange de Metropolis) des studios Warner Bros. portés par Paul Dini et Bruce Timm qui y ont trouvé l’idée d’un modèle à suivre. Perpétuellement dans l’hommage aux années ’40, au genre du récit noir et au pulp, le Batman T.A.S. est l’héritier le plus évident de cette école, qui joue sur les ambiances, les décors et une mise en scène inquiétante en hommage au cinéma, pour rendre compte de ce qu’aurait pu donner un Batman entre les mains des Fleischers, avec des techniques modernes d’animation 2D.

D’autres très grands noms de la BD, comme Frank Miller ou Alex Ross, citent la série et le travail des Fleischers en général comme une influence majeure sur certaines de leurs oeuvres. Un héritage plus lointain est à retrouver dans le travail d‘Hayao Miyazaki, avec l’épisode The Mechanical Monsters en particulier, dont la silhouette et la structure des robots mécaniques ont inspirés le travail du géant Japonais sur Lupin III et sa créature du Château dans le Ciel. On pourrait même voir dans le Géant de Fer de Brad Bird un autre hommage caché à cet épisode, le film en lui-même étant déjà une énorme référence au Kryptonien et aux symboles du héros.

En définitive

Si le cartoon Superman des Fleischers a pu être oublié par une partie du public avec le poids des ans, il renvoie, à l’image des premiers numéros du héros en bleu, à un idéal passé de création. Une époque où le dessin animé revêtait une notion artistique loin de la promotion cachée d’un catalogue de jouets, où tout était encore à écrire dans les codes et les coutumes d’un medium aujourd’hui bien rôdé, et où ce Clark qui n’avait encore que trois ans était déjà présenté au public sous une autre forme que celle du papier.

A redécouvrir aujourd’hui, on est en droit d’émettre de vertes critiques sur le rythme ou l’aspect cliché de certaines histoires (qui à l’époque, n’en étaient pas), mais le boulot d’animateur ou l’héritage que les Fleischers et Famous ont laissé derrière eux relève d’une certaine magie. A ce point abouti dans le style et l’identité de son approche sur Superman et ses pouvoirs, la série aura marqué l’histoire de celui-ci comme une gemme unique en son genre, à la croisée des chemins entre le cartoon de l’âge d’or, le lointain souvenir d’un Superman de propagande, et l’utopie d’un DA quasi parfait dans sa naïveté et son ambition artistique, qu’aucune autre série n’aura reproduite avec la même tenue jusqu’à la génération T.A.S..

Une sorte de précurseur, qui imprimera sur le Kryptonien une série d’images et de slogans encore vivaces aujourd’hui – au final, peut-être même la version la plus fédératrice, dans la pureté de son message, et l’utilisation de son héros comme un symbole inaltérable d’optimisme et de prouesses. Et si au fond, ça n’avait jamais été que ça, Superman ?

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Corentin

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6 années il y a

Génial, époustouflant, le Superman des Fleischers était un immense hommage au personnage (je ne sais pas si on peut parler d’hommage étant donné que le personne était quand même tout jeune dans le format de ses origines). On peut dire pareil de ton Dossier Corentin qui est abouti, agréable à lire et extrêmement clair dans son propos (notamment sur tout ce qui peut référer à la technique de l’animation me concernant).
Je me rappelle très bien de l’épisode The Mad Scientist que je possédais petit en vhs de la collection qui retraçait justement les dessins animés distribués par Warner Bros. phares de ces années-là (les Merrie Melodies & co). Par contre il me semble que pour l’épisode de Sup’ en question, la coloration n’était pas aussi belle que la vidéo que tu as ajouté à l’article, plaisir rajouté à la dégustation de cette madeleine. La qualité de l’animation m’avait frappé, et pour avoir vu des animés des années 60, je la trouvais personnellement meilleure aussi mais tu as su mettre les mots sur le problème de cette période. Et l’hommage de la série Batman TAS, maintenant que tu le dis (et après avoir revu l’épisode du Mad Scientist), c’est terriblement frappant.
Bref un vrai bon moment de lecture et nul doute après cela que je vais visionner l’ensemble des Supermant des Fleischers. Merci Corentin.

Billy Batson
6 années il y a

Excellent dossier pour un excellent moment à lire ces lignes, bravo à toi Corentin. Est-ce qu’il y a moyen de l’ajouter au dossier des favoris ? Sinon petite rectification, le serial de 1948 n’était pas télévisé mais était bien diffusé au cinéma. :)

Billy Batson
6 années il y a
Répondre à  Corentin

« Un dossier George Reves sur le sérial des années ’50 »
Magnifique magnifique. Je suppose que tu connais ce lien (une adaptation en comics du projet avorté de film) :
http://www.jimnolt.com/splanet1.htm

« Le gros contenu newsaclic de notre ligne édito »
J’ai déjà été aussi virulent que ça dans mes commentaires, my bad alors :O

mmat1986
mmat1986
6 années il y a

chouette dossier, j’adore ces animés d’une qualité qu’on ne reverra sans doute jamais

et ceci, un gars de chez Disney avait rendu hommage au travaux des Fleitchers avec deux court animés

https://www.youtube.com/watch?v=T2WVlmNqMMs

https://www.youtube.com/watch?v=lSIlr2-mw-w

mmat1986
mmat1986
6 années il y a
Répondre à  Corentin

ah pardon donc

WhoWatches
WhoWatches
6 années il y a

C’était top a lire, j’ai appris pas mal de choses merci :)

td1801
td1801
6 années il y a

Wow. J’en avais vaguement entendu parler, mais c’est absolument génial et magnifique.
L’article est passionant merci ! (je suis juste resté sur ma faim par rapport a la suite de la vie des Fleischers)
J’ai beau adorer justice league TAS, la fluidité et la compexité de l’animation n’était pas au même niveau que ce superman.

jhudson
jhudson
1 année il y a

La télévision existait déjà en 1939, mais les possesseurs d’écrans trés étaient peu nombreux.
La Tv a pris son essor dans les années 50, à un tel point que les salles de cinéma ont pris peur devant cette ”concurrence ”, d’ou les avancées techniques avec la 3D, le cinémascope, le son stéréo multiples pistes, le Cinerama sur 3 écrans, le 70 mm,etc….

Bref à part numérique, le cinéma actuel n’a rien inventé de nouveau.

jhudson
jhudson
1 année il y a

Miyazaki s’est inspiré eu robot du Roi et l’oiseau de Paul Grimault.

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