Review VF – Scalped Intégrale Tome 1

Review Scalped Intégrale tome 1
 review Scalped Intégrale Tome 1
Les points positifs :
  • Une belle amorce dans ce nouveau format
  • Des personnages léchés et nuancés
  • Une Amérique abrupte et sans concessions
  • Une vraie personnalité graphique
  • Les couvertures de Jock
Les points négatifs :
  • L’encrage parfois trop présent
  • Une seconde partie moins énervée

« Tu cherches à te faire buter ? »


  • Scénario : Jason Aaron Dessins : R.M. Guéra – Couleurs : Lee Loughridge, Giulia Brusco – Couverture : Jock
  • Urban Comics – Vertigo Essentiels – Scalped Intégrale Tome 1 – 18 novembre 2016 – 304 pages – 28 € – Contient : Scalped #1-11

Ce mois de novembre chez Urban Comics pourra être rebaptisé mois des intégrales. Ce sont techniquement les premières rééditions que l’auteur se permet de titres déjà publiés auparavant, suivant une démarche qui montre déjà son efficacité de l’autre côté de l’atlantique (avec les Deluxe Editions dont sont reprises ces intégrales). Une occasion qui permet également de remettre en avant des titres très forts du catalogue, pour ceux qui n’auraient pas pu se les procurer auparavant, ou qui avaient fait l’impasse dessus. Et également le moment pour Urban Comics de valoriser de très bons titres qui rappellent l’âge béni d’un Vertigo qui, alors, publiait parmi les meilleures séries indé’ que le marché du comics ait connu. Nous avons eu le moment de revenir vous parler de DMZ il y a peu, place maintenant à Scalped.

Scalped est le second titre de Jason Aaron (et l’un de ses premiers) chez Vertigo, après The Other Side (toujours inédit en VF), et nous emmène dans la réserve indienne de Prairie Rose, dans le Dakota, qui sert de zone de survie pour les natifs américains, descendants des Sioux qui sont, selon les dires de l’auteur « venu mourir » ici. D’entrée de jeu on verra que l’ambiance n’est pas aux joyeusetés et à la bonne humeur. Je vous avouerai que je ne sais pas quelles affinités entretient Jason Aaron avec les communautés natives de son pays mais il ne passe pas sous silence une partie de son Histoire qu’on aurait sûrement besoin de rappeler de temps à autres. Au delà de la domination de l’homme blanc et des ravages qu’il a causé en arrivant en Amérique, ce sont les conséquences actuelles de son installation qui sont explorées ici. Misère, pauvreté, chômage, crime, prostitution, jeux d’argents, drogues, entre fatalité, rêves perdus et un espoir qui s’amenuise ici, Jason Aaron nous ramène dans cette triste réserve en premier lieu avec son personnage principal, Dashiell Bad Horse (merci de ne pas avoir voulu traduire ceci, Urban), alias Dash, qui en était parti il y a quinze ans en jurant de ne jamais y revenir. De retour pour une obscure raison (qui sera explicitée assez vite, rassurez-vous), cet indien au caractère plus que trempé constate que depuis son départ, les choses n’ont pas vraiment changé. Les yeux et les poings pleins de colères, il va retrouver ceux qui ont bâti son enfance, à mesure que l’auteur nous amènera à rencontrer une galerie de plus en plus fournies en personnages. L’intrigue principale tourne autour de l’ouverture d’un grand casino, dirigé par le Chef Red Crow, véritable homme de mafia qui contrôle tout ce qu’il se passe (ou essaye) à Rose Prairie, et qui est la cible d’enjeux liés à son passé, à celui de Dash… et à tout le monde dans la réserve à vrai dire.

Jason Aaron construit en effet une intrigue vraiment profonde, dont les ramifications remontent jusqu’à l’enfance de ses protagonistes. Les faux pas de chacun, les rencontres, les opportunités manquées, les destins brisés mènent tous à une situation présente qui manque chaque jour de déraper. Et si la lecture de ce premier imposant tome ne vous convainc pas – notamment avec son dernier cliffhanger, laissez-vous convaincre par Catcher : un bordel sans nom s’annonce. L’avantage dans ce format est de pouvoir pleinement en saisir une partie des enjeux et d’avoir assez de contenu pour avoir un regard global sur la situation. La première moitié se met en effet au plus proche de Dash et sa façon de se faire sa place dans une réserve qu’il a abandonné ; autant vous dire que ça ne se fait pas calmement. La violence est dans l’ADN d’un personnage qu’on pourrait presque qualifier de suicidaire, et autant vous dire que si le polar hard-boiled ne vous plaît pas, peut-être ne devriez vous pas tenter cette lecture. Car rien ne vous sera épargné. Fort heureusement, et malgré le contraste provoqué, la seconde moitié se veut légèrement plus calme et se place plus dans une démarche d’exposition, en se concentrant sur les histoires (au sens personnel du terme) et les motivations des personnages principaux (ou secondaires, mais qui seront amenés, comme dans toute grande saga, à prendre de l’importance), aidant Aaron à bâtir de façon personnelle et cohérente son univers. Je mentionnais les personnages, sans trop en dire, car le plaisir vient de leur découverte, sachez qu’ils sont tous nuancés (même le plus vil peut avoir un bon fond) et surtout bien différents des autres. Mais avec également un caractère très trempé : on s’empoigne, on s’insulte, on s’engueule à longueur de journée – mais en même temps, qui ne le ferait pas dans une situation telle que celle-ci ? A cet égard, le chapitre sur Dino est très certainement le plus criant et dénonciateur pour la situation que doivent vivre actuellement des milliers (millions ?) de personnes.

Car Scalped ne se contente pas d’une intrigue musclée qui fait appel aux meilleurs codes du genre – mafieux, flics, femmes fatales, taulards, gangs, et autres agents fédéraux sont tous de la partie. Et les retournements de situation sont nombreux. On voit aussi dans cette oeuvre l’exposition et la dénonciation d’une culture entière dévastée, saccagée et laissée à l’abandon par une occupation qui a maintenant gardé ses stigmates – n’oublions pas que le racisme ne touche pas que les afro-américains sur ce continent. Il faut d’ailleurs s’accrocher devant le monde qu’on nous dépeint et pour le moment il n’y a pas vraiment un personnage qui soit lumineux et qui ramène ne serait-ce qu’une bouffée d’air pour respirer dans ce mélange d’émotions ultra-négatives. Mais quelque part c’est aussi pour ce genre d’évasion qu’on recherche dans la lecture des histoires fortes, et Aaron ne déçoit à aucun moment sur cet aspect là. Il faut également compter sur son compère aux dessins, R.M. Guéra, qui participe grandement à la réussite de cette oeuvre. Il faut reconnaître à l’artiste une très grande force dans ses dessins, avec des personnages aussi marqués visuellement que leur caractérisation, et une patte graphique qui là aussi, s’exprime avec tous ses excès. Explosions de violence, un côté insalubre prédominant, des personnages qui sont sales à tout point de vue, même le sexe en ressort marqué et cru. Un point de vue adulte pour un récit qui l’est tout autant, auquel on pourra malgré tout reprocher un côté trop appuyé de l’encrage. Très présent, il renforce le côté grim & gritty de Scalped mais apporte par moments aussi un aspect très lourd dans les dessins, ainsi qu’une certaine confusion. Sachez enfin qu’ici, la patte de R.M. Guéra pourra en rebuter quelques uns. Mais c’est comme avec 100 Bullets, passé la découverte et le style particulier, on se laisse transporter et ledit style devient une vraie force visuelle.

Si vous n’avez donc jamais découvert Scalped (il faut dire que nos dernières reviews sur le site datent, tout comme la publication des précédents tomes), voici donc une bonne occasion de vous plonger dedans. Comme je l’ai dit auparavant, l’avantage des intégrales (outre le rapport quantité prix) est surtout d’avoir assez de contenu pour être vraiment lancé dans l’univers, chose qui est parfois plus difficile lorsqu’un auteur prend son temps et ne dévoile pas tout dès les 5 premiers numéros. L’ensemble contient l’équivalent de l’édition VO Deluxe qui comprend grand nombre de bonus, dont une bonne partie de travaux préparatoires de Jock sur les couvertures de la série, qui constituent d’ailleurs tout autant un vrai régal visuel. Un autre avantage, plus pragmatique, c’est qu’une intégrale prend un peu moins de place dans votre bibliothèque… Hé, je n’ai aucun intérêt personnel à vous faire lire Scalped, mais croyez-moi, vous auriez vraiment tort de passer à côté.

Les lecteurs de Vertigo de longue date n’apprendront rien de nouveau, et la série a certainement une réputation qui la précède. Il ne fait pas de mal à vous rappeler sur DC Planet que l’imprint indé de DC a publié parmi les meilleurs comics qui soient, et Scalped fait partie de ces oeuvres incontournables pour qui aime la BD américaine, le polar, les intrigues et personnages sans concessions, la brutalité dans toutes ses représentations ainsi qu’une critique virulente d’une communauté entière laissée à l’abandon et qui fait ce qu’elle peut pour s’en sortir. Profitez de cette réédition pour vous plonger dans les pages d’un récit culte, vous ne le regretterez pas.

En passant par les liens affiliés BDfugue/FNAC/autres présents sur le site, DCPlanet.fr reçoit une faible commission. Qu’importe le montant de votre panier, vous nous aidez ainsi gratuitement à payer l’hébergement, modules, et autres investissements pour ce projet.

ArnoKikoo

ArnoKikoo

DC Comics : L'Encyclopédie (mise à jour et augmentée) / Edition augmentée

DC Comics : L'Encyclopédie (mise à jour et augmentée) / Edition augmentée

amazon
Voir l'offre
Patientez... Nous cherchons le prix de ce produit sur d'autres sites

À lire aussi

Shazam : La Rage Des Dieux [4K Ultra HD - Edition boîtier SteelBook]

Shazam : La Rage Des Dieux [4K Ultra HD - Edition boîtier SteelBook]

amazon
Voir l'offre
Patientez... Nous cherchons le prix de ce produit sur d'autres sites

Rejoignez la discussion

S’abonner
Notification pour
guest
7 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Sandman
Sandman
7 années il y a

Merci pour la review!! J’hésitais à commencer ce titre mais tu m’as convaincu!!

KimiTheJelly
KimiTheJelly
7 années il y a

Merci beaucoup pour cette review ! Le titre m’intéresse beaucoup, j’y jetterai un oeil. :) Quelqu’un sait si ce titre aura le même rythme de parution que Preacher ?

Blue
7 années il y a
Répondre à  KimiTheJelly
KimiTheJelly
KimiTheJelly
7 années il y a
Répondre à  Blue

Merci pour le lien Blue ! Ça confirme bien mon hypothèse. ^^

nomalez
7 années il y a

Des années que je veux lire ce comics, et à chaque fois je passe à côté. Cette réédition au format intégrale est de bonne augure pour Noël, et de plus cette critique me donne encore + envie de l’acquérir ! Lire une BD dans le milieu des Amérindiens va me plaire au plus haut point (surtout que certains followers « Natives » sur Tumblr en disent du bien!^^)

Biggy
7 années il y a

The Other Side est sorti chez Urban.

Biggy
7 années il y a

The Other Side est sorti chez Urban. De l’Autre Côté.

DC Universe FRA

Rejoignez la première et la plus grande communauté non officielle DC Comics Francophone et participez aux discussions Comics, Films, Séries TV, Jeux Vidéos de l’Univers DC sur notre Forum et serveur Discord.

superman
7
0
Rejoignez la discussion!x