Showcase #121 – Batman Beyond 2.0 : Mark of the Phantasm

Dans la parenthèse enchantée que représente pour les fans d’imaginaire cette édition annuelle de San Diego Comic Con, une information s’est glissée. Difficile à entendre pour certains fans, sans intérêt pour d’autres (je l’espère, moins nombreux), l’idée qui veut que Batman et Batgirl aient « une relation particulière » dans l’adaptation du comics The Killing Joke dirigée par Bruce Timm s’explique, en définitive, par une caractérisation entamée chez l’auteur il y a fort fort longtemps. A l’époque du DCAU des origines, maintenue pendant quelques années, et concrétisée aujourd’hui. Ce n’est pourtant pas sous la plume du réalisateur que tout ça s’explique le mieux. Retour ici sur l’itération la plus récente de cette idée curieuse, apparue il y a deux ans sous la plume de Kyle Higgins dans une obscure série digitale.

D’abord : pourquoi en parler. Parce que, pour ceux qui aiment (vraiment) l’animation, le Timm-verse et attendaient de pied ferme Killing Joke comme le nouveau chef d’oeuvre que Batman : Bad Blood n’était pas, ou les inconditionnels de Moore qui espéraient un case par case à peine modifié, cette proposition prend une place plus que conséquente dans l’animé, et c’est toujours mieux de savoir de quoi on parle. Non, Bruce Timm n’invente rien dans l’animé qu’il n’ait déjà dit par le passé – ce qui ne change pas grand chose au final – et l’aspect « documentaire » de cette chronique pourra refiler une micro-clé de lecture à tout ça pour ceux qui (comme moi il n’y a pas si longtemps) ne savaient pas.

Donc, Batman Beyond 2.0. est la suite en numérique des aventures de Terry McGinnis, descendant de Bruce Wayne et héritier du costume dans une cité cartoony et cyberpunk, où Barbara est devenue commissaire et où les héros de votre enfance ressemblent à vos grands-parents (on vous parlait déjà de ce comics dans notre dossier spécial Batman Beyond). Dans cet arc apparu au milieu de la série, Higgins utilise la figure de Vigilante, un ancien homme de main du crime reconverti en justicier armuré. Le premier numéro s’ouvre sur un combat mené de concert par le Batman 2 et son nouveau pote brise-mâchoires, que Bruce Wayne désapprouve contre l’avis de son (fiston) héritier.

Plus tard, aux quartiers généraux du GCPD, coup de théâtre : Vigilante n’est autre que Jake Chill, petit-fils de Joe Chill, le meurtrier des parents Wayne. Parce que l’histoire et l’hérédité renversent toutes les barrières, Jake Chill est (évidemment) le meurtrier de Warren McGinnis, père adoptif de Terry. Sur cette révélation outrageante, Phantasm apparaît chez le Vigilante. S’ensuit un combat où la super-vilaine manque d’assassiner Chill, avant que Terry n’intervienne et la mette en fuite. Ce n’est qu’alors qu’il comprend : Jake a tué son père, et c’est vraiment pas gentil. S’ensuit une baston, interrompue par la fuite de Chill.

En parallèle de ce présent, Higgins distille une série de flashbacks sur Barbara Gordon. On la voit quitter le costume, et mettre fin à « une relation » avec Bruce, qui n’a pas l’air de mal le prendre. La rouquine retrouve alors Dick, de passage sur Gotham, et reprend avec lui une relation longtemps, trop longtemps remise à plus tard. Le bonheur file droit jusqu’à ce que – attention – la jeune femme découvre après un test de grossesse qu’elle est enceinte de Bruce.

Dans le présent (enfin, le futur quoi), Terry accuse Bruce d’avoir été au courant depuis le début au sujet de l’identité de Vigilante, et lui reproche de na pas l’en avoir informé. Il va chercher auprès du vieux Dick pour savoir s’il peut encore faire confiance à son mentor, et c’est là que le flashback reprend. Alors que Dick et Barbara filaient le parfait amour, la jeune femme va avouer la vérité à Bruce. Celui-ci ne semble pas affecté, et promet de rester à l’écart et de ne pas parler à son ancien Robin, ce qu’il fait malgré tout en imaginant que celui-ci devait savoir. La révélation se fait dans la douleur : Dick ne supporte pas cette idée et attaque Batman, qui se laisse frapper sans réagir.

Je vous laisse quelques instants pour trouver au fond de vous un peu de bonheur et d’innocence, la suite arrive. Après ces événements, vieux Dick et vieille Babs expliquent à Terry n’avoir plus jamais reparlé à Bruce. Après l’avortement, Barbara s’est trouvé un autre amoureux et Dick et elle sont restés de simples amis (j’en entends deux dans le fond qui pleurent : ressaisissez vous, les gars, pensez aux trucs positifs). De l’autre côté de la ville, Vigilante continue sa croisade de justicier désormais solitaire, et traque les Jokerz, un groupe de Joker-wannabe qui l’empoisonnent à un genre de gaz hallucinogène.

Tandis que Terry discute avec Barbara, celle-ci reçoit un appel du commissariat l’informant de la situation. A la Bat-Cave, Bruce reçoit la visite d’Andrea (Phantasm), qui lui avoue avoir orchestré la révélation autour de Vigilante pour donner à Terry l’occasion de le tuer, et voir s’il en serait capable – parce que, selon elle, renoncer à cet acte seul lui donnerait la légitimité de porter le costume. Alors que Bruce lui avoue avoir encore des pensées pour elle, et qu’il n’est pas trop tard pour se retrouver, celle-ci disparaît dans un adieu, sérieusement, comment c’est sombre, c’est n’importe quoi.

Terry rejoint les lieux, trouve un Vigilante rendu fou par le poison et affronte les Jokerz. Phantasm apparaît, essaye de tuer Chill, mais Terry l’en empêche. Le type fait d’une attaque cardiaque, incapable de supporter l’adrénaline du poison, et part dans un sourire où on comprend que cet ex porte-flingues du crime local était, au fond, vraiment un bon gars (et là, il meurt). Après l’enterrement, Terry cherche le réconfort auprès de ses amies, et apprend de leur bouche que Bruce les avait contactés pour essayer de lui remonter le moral. C’est là que la goutte d’eau dépasse les bornes – Terry file dans la Bat-Cave et dit adieu à son mentor, avant de partir incapable de faire confiance à ce bien étrange Bruce décidément très peu enclin au sourire et à la bonne humeur.

C’est ainsi que s’achève l’arc, entre morts, ruptures et avortements. Cette lecture du DCAU (assez inédite, je l’avoue) est un des éléments de « continuité » sur lequel s’appuie Timm pour participer à sa reconstruction du duo classique Bruce/Barbara, unie par l’idée d’une fan amoureuse de son idole, et de l’idole qui dit oui et la met enceinte en définitive. Un constat personnel, d’un auteur qui a sa vision (vous voyez, cet argument peut servir pour tout et n’importe quoi) mais reste un ensemble étrangement acceptable à la lecture ou au visionnage, même si vous avez grandi avec tel ou tel dessin animé. En attendant, on se retrouve la semaine prochaine pour un Showcase Suicide Squad de pré-film, en espérant que d’ici là, Bruce n’ait pas non plus fricotté avec Harley.