Review VF – Superman & Wonder Woman Tome 2 : Très chère Vengeance

Les points positifs : Tomasi qui manie habilement les personnages d’Azzarello Sympathique L’époque où le super couple avait un semblant de sens Les points négatifs : Automatique Facile Sans ambition Le dessin a des hauts et des bas

« J’ignore si c’est bien écrit… Mais ça me fait du bien. » – Diana

• Scénario : Peter J. Tomasi – Dessin : Doug Mahnke, Ed Benes – Encrage : Doug Mahnke, Ed Benes, Norm Rapmund, Jaime Mendoza, Don Ho, Christian Alamy, Mark Irwin, Keith Champagne – Couleur : Tomeu Morey, Hi-Fi, Marcelo Maiolo, Pete Pantazis, Wil Quitana

• Superman & Wonder Woman Tome 2 – 06 mai 2016 – 144 pages – 15 €  – DC Renaissance

 Au lendemain des New 52, un axe envisagé pas les pontes de DC fut de canoniser davantage le flirt Superman & Wonder Woman, une idée sortie du chapeau balancée entre deux arcs en set up d’un pay off jamais survenu, et dont les principaux mérites furent une jolie couverture et quelques numéros sympatoches de Charles Soule, à l’époque attaché à la maison. Sur la reprise de la série par Peter Tomasi, le constat est encore défendable, dans ce premier hardcover publié par Urban, qui colle la série pour d’évidentes raisons de calendriers inter-médias, mais ne restera pas la publications la plus intéressante de ces dernières semaines.

Le scénario de Tomasi reprend un déroulé classique d’histoire de super-héros, servi par quelques twists sans envergure et un peu de recherche sur les différences philosophiques fondamentales de Superman & Wondie. Évidemment, un lecteur « à l’ancienne » trouvera grossier le pacifisme boyscout de Clark et la caricature de guerrière de Diana, plus héritée du run d’Azzarello que de la conception classique de l’Amazone, en théorie plus proche de l’amour et de la paix que de l’affrontement bestial. Le scénariste fait ici le motif de différenciation des deux personnages, deux conception de l’action héroïque, là où un auteur pré-New 52 en aurait justement fait un point d’accord, les deux héros étant généralement des figures lumineuses avant le relaunch. Premier point.

Ensuite, force est de constater que Tomasi ne met pas la même qualité dans son histoire que celle qui lui a valu les louanges de nombreux lecteurs sur Batman & Robin. Une idée commune à pas mal d’auteurs est la différenciation de l’histoire personnelle et de l’histoire appliquée – en gros, quand un auteur parle d’un sujet qui lui importe, ou bien qu’il exécute ce que lui pense être la façon de faire sur un sujet qu’il ne maîtrise pas. De toute évidence, Superman & Wonder Woman est l’application du Tomasi artisan, homme sûr de DC depuis des années et qui réalise ici une commande à deux vitesse : l’histoire est là pour l’habituer à maîtriser des héros qu’il retrouvera à la redistribution périodique des séries (il a hérité de Superman dans Rebirth), et pour surfer sur la petite hype du couple auprès des lecteurs.

Sauf que là où Soule faisait de la relation amoureuse des deux héros le cœur de son récit, dans des numéros auto-contenus légers et symboliques, Tomasi décline un arc de long-terme hyper classique, hyper facile et sans aucune retombée importante sur la continuité. Le scénariste manifeste une retenue véritable, qui n’effleure pas un quart des idées qu’un scénariste inspiré aurait devant la perspective de voir deux des être les plus puissants de la planète s’unir – on imagine la contrainte éditoriale de voir Loïs revenir dans la vie du héros ou l’envie de ne pas barricader Clark dans cette relation au cœur du problème. Pas de super bébé envisageable pour les figures divines, puisqu’à l’époque Convergence était prévue, et le coup de semonce de l’enfant déjà calculé.

Il en ressort une série sympathique, avec un certain rythme et qui fait le taff en tant que production super-héroïque lambda. Mais pas plus. Là où le concept posé au départ par Johns & Lee avait tout d’une superbe feuille blanche pour proposer autre chose, aux heures du relaunch et de voir tout être réinventé, Tomasi exécuté un scénario inoffensif, avec début, milieu, fin, méchant obligatoire et ressorts classiques de toute proposition du genre. Moins auteur qu’exécutant, condamné à noircir du papier pour un éditeur qui tente des idées à l’aveugle sans plan de long terme. Maintenant, la série ne dénote pas d’une qualité correcte, mais reste peu intéressante au regard de plein de trucs importants : conséquences ? Univers partagé ? Continuité ? Situation vis a vis des autres séries ?

De ce côté là, l’écriture se débrouille pas trop mal en utilisant le paysage mythologique laissé par Azzarello, comme d’hab sur les séries du scénariste qui fait toujours preuve de beaucoup de respect envers le travail de ses collègues. Aux dessins, Mahnke oscille entre le moyen et le pas terrible, avec dès le premier numéro de vraies difficultés sur les visages. Clark ou Diana changent de tête toutes les deux pages, et hésitent entre les portraits décalqués de célébrités caricaturales, ou l’exagération de faciès dans les scènes d’action. De même, quoi que ça ne s’applique pas qu’à ce comics en particulier, les couleurs industrielles ne font qu’augmenter l’effet produit de l’ensemble. Tout ça sent bon le numérique et les teintes flashys ou abusivement noires et grises, tout ce qu’on reproche à DC dans sa perspective d’univers plus sombre, ce qui veut bien souvent dire aussi, plus moche.

Maintenant, soyons raisonnables. Superman & Wonder Woman reste une BD sympa’, qui mérite son pesant de brouzoufs pour peu qu’on sache ce que l’on achète, cette édition est en plus assez bien garnie en bonus pour valoir le détour. Mais, à l’image d’autres idées curieuses posées par les New 52 depuis l’invention initiale du relaunch, le couple Clark & Diana avait des choses à dire et à offrir d’un autre calibre. Ici, il n’est pas défendu, justifié ou expliqué sous d’autres arguments qu’une bête passade éditoriale, et n’aura jamais eu de véritable fulgurance. Une série automatique à la Batman/Superman, qui vend correctement pendant que de meilleurs titres à la tracklist moins aguicheuse dorment dans les back issues.