Review Cinéma – Swamp Thing

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Les points positifs :
  • Hey, Wes Craven a fait ce film !
  • Le charme de l’ancien / le charme du fauché
  • Fidèle (un peu) au Swampy de Len Wein
  • Pour les fans de films de monstres en latex
  • Quelques jolis moments
Les points négatifs :
  • Hey, Wes Craven a fait ce film !
  • N’a que trente ans mais en paraît soixante
  • Adapter Swamp Thing avant que le run de Moore n’ait eu lieu
  • Bourré de défauts !

« It was like hitting a tree. » – Ritter


  • Réalisation : Wes Craven Production : Benjamin Melniker, Michael E. Uslan
  • Scénario : Wes Craven
  • Acteurs : Louis Jourdan, Adrienne Barbeau, Ray Wise, David Hess, Mimi Craven, Dick Durock, Nicholas Worth

À force d’énumérer les ratés des plateaux de tournages en cette semaine spéciale adaptations, on finirait par croire que DC Comics n’a que des mauvais films en stock pour peu qu’on passe les bancs des héros très connus. « Tu veux dire que tu vas parler d’un bon film aujourd’hui ? » et bien : oui et non, voix imaginaires qui me donnez la réplique, quoi que le constat soit un peu plus positif qu’à l’accoutumée. Le héros dont il est question aujourd’hui est un personnage sombre, né il y a trente-cinq ans dans l’esprit de Len Wein (ou Gerry Conway), il aime le vert et la chanson Born on the Bayou, il s’agit d’Alec Holland, aussi appelé Swamp Thing ou Créature des Marais.

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L’adaptation de Swamp Thing remonte à une époque lointaine, à une époque où la Time Warner s’appelait Warner Communications d’un côté et Time Inc. de l’autre et où Wes Craven n’avait pas encore donné vie aux Griffes de la Nuit ou à la saga Scream (bon, il avait déjà réalisé pas mal de très bons films d’horreur, mais pour les gens de ma génération, mettons c’est comme enlever Sueurs Froides à Hitchcock). Le réalisateur a déclaré à l’époque que le projet était une façon pour lui de s’extraire de l’image de réalisateur en marge, et de montrer qu’il était capable lui aussi de gérer un film dynamique basé sur l’action et avec un casting important.

Le studio Embassy Pictures lui confie la somme de 2,5 millions, ce qui n’a pas l’air beaucoup posé tel quel, mais reste un budget plus conséquent que ses productions précédentes (voir cumulées). À sa sortie, le film décroche pas mal de critiques positives, s’amortit suffisamment pour mettre une suite en chantier, et à l’inverse de pas mal d’adaptations, verra le personnage ressortir grandi auprès des décideurs du studio, puisque s’enchaîneront ensuite la série TV, le dessin animé, le jeu vidéo NES et le projet de remake dans les années 2000. En somme, un long-métrage qu’on imagine assez intéressant pour aller au devant des séries Z habituelles. Voyons ça ensemble.

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Le film s’ouvre sur l’arrivée d’Alice Cable, un personnage inventé pour les besoins du scénario et qui conjugue en gros l’idée de deux figures habituelles du paysage posé par Len WeinMatt & Abby Cable, soit, le meilleur ami et le love-interest du héros (Moore n’avait à l’époque pas eu le temps de tout réécrire). Le personnage est jouée par Adrienne Barbeau, qui a joué dans Escape From New-York de Carpenter, The Fog de Carpenter, la voix de l’ordinateur dans The Thing de Carpenter ou le Creepshow de George Romero et Stephen King. Cable est une technicienne opératrice qui part dans la jungle rejoindre un complexe secret tenu par Alec Holland, incarné par Ray Wise, un acteur à la carrière super éparse dont on peut citer une petite apparition dans Mad Men, une petite apparition dans X-Men First Class et une petite apparition dans Swamp Thing, puisque le personnage du docteur n’occupe en gros qu’un premier tiers de film.

Comme en comics, le docteur travaille bel et bien sur une formule de régénérations arboricole, en tout cas, officiellement. Il découvre au fil de ses recherches un composé permettant d’unir les cellules végétales et animales, d’où le secret du labo’ situé en pleine brousse, entre les marais, et la crainte de voir un riche industriel malfaisant local, le Dr. Arcane, s’intéresser à ses découvertes. L’origine suit le déroulé classique de la BD : Arcane pénètre dans le laboratoire, fait tout péter, Holland s’enfuit des flammes brûlé et se précipite dans le marais, avant de revenir en Swamp Thing, c’est à dire ici, en type dans un costume en latex incarné par un autre acteur qui bouge comme Casimir.

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Le film prend pas mal de libertés avec le comics pour aller vers un scénario classique de film d’horreur. D’abord, Linda est ici la sœur d’Alec et plus sa femme, Arcane tient plus du méchant capitaliste de James Bond (ce qui est marrant, mais on va y revenir) que de l’occulte reclus dans son château, et troque ici son apparence de lambeaux de chair pour un costume de phacochère humanoïde à crinière de lion (ouais, rigolez, mais est-ce que vous auriez fait mieux ? « Oui ! », ok, peut-être, c’est vrai). À l’inverse, le scénario sait être fidèle aux bons endroits. Les origines sont respectées, les pouvoirs et le caractère de la Créature épousent ceux de Wein d’assez près, l’acteur semble même épouser le phrasé lent et intérieur de Swampy.

En ce qui concerne la réalisation, il me faut d’abord présenter ce que je comprends du film. Maigres sont mes connaissances du cinéma de genre à petit budget des années ’80, aussi je ne m’explique qu’à moitié les notations que le film a pu recevoir, ou comment le placer par rapport à la norme en vigueur, sur le plan du budget, de la réalisation ou des acteurs. Ce que j’interprète de tout ça, en le visionnant trois décennies après, est que le film garde un aspect vieillot et maladroit, plus que d’autres films antérieurs de Wes Craven, voire plus que d’autres films antérieurs tout courts (les Carpenter, Cronenberg ou même l’Alien de Ridley Scott faisant foi). Ce film, depuis les plans de caméra, le jeu des acteurs ou la technique, ne me renvoie pas l’idée d’un film des années ’80, ou en tout cas, pas de ce que mon imaginaire de type né dix ans après a pu intégrer de musiques, films, séries et documentaires de l’époque.

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Or, finalement, on peut faire un constat similaire sur le comics Swamp Thing. Lorsqu’il paraît en 1971, le premier volume de Len Wein épouse les codes des séries Eery & Creepy, matinées de fantastique et pleine d’horreur littéraire et des monstres du cinéma d’épouvante des années ’50, voire même au Golden Age et au personnage de The Heap de Hillway Periodicals. L’esthétique gothique du château d’Arcane, Hollande en Dr Jekyll piégé dans le corps de Hyde, la chevelure blanche et noire d’Abigail comme la fiancée de Frankenstein, etc. Ces aventures étaient déjà plus passéistes que contemporaines à l’époque, dans le grand Silver Age et son déluge d’idées étranges dans lequel un homme transformé en plante n’avait rien de si extraordinaire. Dès lors, j’aime à considérer que le film, et c’est tout à fait personnel, accuse le même coup de retard stylistique que son matériau de base. Depuis la mise en scène jusqu’aux deux trois tentatives de scènes d’action, à part quelques ralentis, rien n’a l’impact d’un film des années ’80. L’ensemble me fait plus penser aux premiers films de science-fiction ou d’horreur des années ’50, avec la même panoplie de costumes en plastic et les mêmes bruitages de rugissements ou de coups de feu, ce qui peut aussi s’expliquer par un budget assez serré.

Maintenant, rien de tout ça n’excuse les défauts factuels du film : un rythme qui ne se tient pas, une love story forcée entre Holland et Alice, des règles qui changent au cours du film – Alec ressuscite les morts, la potion sensée faire pousser les plantes devient finalement un révélateur physique de personnalité, et si en début de film c’est très compliqué d’accéder au bayou, Arcane y tient une fiesta de trente-cinq personnes en fin de film – et un jeu d’acteur qui là encore collerait davantage à un film sorti trente ans plus tôt. Louis Jourdan prête ses traits à Arcane, et si l’acteur français amène un peu de diversité au jeu très américain de l’ensemble du cast, sa performance ultra-monolithique de méchant archétypal (qu’il gardera dans Octopussy quelques années plus tard) fait presque espérer une scène post-générique où le méchant s’arracherait le visage et découvrirait le sourire de Fantômas dans un éclat de rire super mou. L’acteur qui interprète la créature Dick Durock, reste touchant mais plutôt limité, et j’ai plein de blagues bizarres à faire sur le nom de ce type.

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Enfin et surtout : Swamp Thing ne fait pas peur. Avec ses imprécisions techniques, une réal’ assez plate et des choix artistiques douteux, le film a tout d’une production Trauma sans l’humour assorti. Il arrive à placer un peu du génie de la Créature, qui reste proche des plantes et offre de vrais beaux moments d’harmonie paisible dans le monde végétal, mais reste fait avec trois bouts de ficelles, et ça se voit. C’est un film qui arrive à être sincère de temps en temps, mais demande d’être vu comme une espèce de rediffusion d’un classique des années ’50. J’ai fait le test sur mon ordi’, et honnêtement, le film passe beaucoup mieux en noir et blanc avec plus de grain, comme s’il avait été fait pour une autre époque du cinéma (ouais, c’est n’importe quoi hein ? Mais j’ai envie de le défendre).

En réalité, le plus gros reproche à adresser au Swamp Thing de Craven serait de ne pas adapter le run qui a fait de ce personnage un incontournable dans l’Histoire de DC. Lancé trop rapidement, le film n’avait pour lui que le run de Len Wein, bon mais pas extraordinaire, et sans toutes les idées qui nourrissent le personnage. Un comics inspiré de vieilles BD d’horreur qui offrent en définitive un film inspiré de vieux films d’horreur, ce qui se retrouve à plein de moments (comme la transformation d’Arcane, qui me fait un peu penser au Jekyll & Hyde de 1932, ou les transitions assez grossières qu’on ne se permettait déjà plus dans les années ’80). Après, je suis sans doute trop fan du personnage pour détester un truc fait sur lui, mais honnêtement, entre les Jonah Hex, Catwoman ou Green Lantern, l’adaptation faite par Craven peut se regarder comme un gentil film de la Toho, avec second degré et un peu de tendresse pour les méthodes artisanales du cinéma. Un film qui respecte son origine BD suffisamment pour rester sincère et honorable, vu le personnage et l’époque où ça a été fait, c’est déjà énorme. Oh, et y a une scène d’Adrienne Barbeau seins nus aussi. Voilà, je mets ça là pour les deux trois qu’on a sans cesse besoin de convaincre autrement. 

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Corentin

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Capugino
7 années il y a

Tellement pas au courant pour ce film :O
Belle surprise, merci mec

thekomkiller
thekomkiller
7 années il y a

sans oublier sa suite : le retour de la créature du lagon ^^

batmandk001
batmandk001
7 années il y a

Et n’oublions pas la série télé qui a duré trois saisons

Billy Batson
7 années il y a

On attend maintenant la review de Steel ^_^

thaflash
thaflash
7 années il y a

Je viens d’apprendre quelque chose !!

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