Review VO – Teen Titans Vol.1 : Blinded by the Light

Les points positifs: Lisible Scott Hepburn Un progrès incroyable depuis la première série … Les points négatifs: … mais toujours insuffisant Rocafort pas à son meilleur Une histoire sans intérêt Peu d’espoir pour la suite

« You’re in a world of trouble » – Scott Lobdell à Will Pfeifer

• Scénario : Will Pfeifer – Dessins : Kenneth Rocafort, Scott Hepburn – Couleurs : Dan Brown

• DC Comics – Teen Titans Vol.1 : Blinded by the Light – 11 août 2015 – 176 pages – 16.99$ – Collectionne: Teen Titans #1-7

Teen Titans, c’est comme toute série secondaire, c’est bien. C’est même parfait. Tout dépend de ce que l’on lit. Et dieu sait que je défendrai toujours corps et âme le run de Johns et même les quelques épisodes de Lobdell précédant ce run. Certes, ça date, c’est indéniable. Et suite au départ de Johns, la série a connu une longue chute, et les New 52 laissaient présager une chance de retour. Certes, ça n’a pas marché, ça non plus, c’est indéniable. Au point même que DC a souhaité relancer la série au premier numéro. Et DC ne fait pas ça  à tout bout de champ, contrairement à Marvel (oui, je lance des piques, et je m’en fous). La réputation de la jeune équipe se détériore de plus en plus au fil du temps, laissant comme seul base indémodable le run de Wolfman et Perez, et ça aussi ça date, qui reste le seul apprécié par une majorité fortement majeure. Par les New 52, Lobdell a non seulement tout foiré, mais en plus montré qu’il ne sait pas refaire ce qu’il a réussi à faire 10 ans auparavant. Ces résidus de cendres dont il reste des Teen Titans de Lobdell font de cette série un dernier espoir pour l’équipe. Seulement, le premier arc sème de nombreux doutes et un sentiment de perplexité chez le lecteur quand au futur de l’équipe.

Ce premier volume regroupe les 6 premiers numéros, divisés en deux arcs. Le premier en quatre numéros, dessinés par Kenneth Rocafort. Le second en seulement deux numéros, dessinés par Scott Hepburn. Oui, ça aurait été étonnant de voir un TP uniquement dessiné par Rocafort. Qui dit nouvelle série dit changement d’équipe, adieu le triste duo Scott Lobdell et Brett Booth, DC confie le récit à la plume de Will Pfeifer. Là où les dessinateurs font un arc sur deux. Rocafort et ses délais, une histoire d’amour. Ce scénariste reste et est encore sur la série actuellement, toujours bercé par l’espoir de la réanimer.

Cette nouvelle série, ce renouveau de l’équipe, a l’avantage de permettre aux personnages comme Brick de mieux s’intégrer à l’équipe. Il semble plus travaillé (légèrement, mais c’est en progrès). Le fait qu’il soit gay ne devient pas juste un fait, un dire. Pfeifer ressort ce fait, mais pas encore suffisamment pour éliminer cette sensation d’avoir un personnage gay pour le fait qu’il soit gay et que cela n’apporte rien d’autre à l’équipe qu’une sorte de « quota ». Rien d’homophobe là dedans, mais depuis l’intégration et la publicité engendrée par le fait d’avoir un personnage gay dans une équipe multiplient ce fait et la création de personnages gay. Ce qui donne l’impression d’un personnage déjà défini et n’en fait qu’un personnage laissé pour compte. Brick est comme un personnage ne faisant qu’acte de présence afin de rappeler qu’il est gay sans jamais pouvoir avoir un développement de sa personnalité, de ses ressentis. Je reste persuadé que ce renouveau de l’équipe pourrait se faire en commençant par ça. Développer ce personnage, sans tomber dans le cliché du passé qui refait surface. Mais bien du présent, d’un certain attachement, voir même d’une relation plus développée, et non pas une relation annoncée et oubliée. Tout comme Beast Boy, qui reste la plupart du temps en arrière plan dans ce premier arc.

Il faut dire que ce premier arc en quatre parties, s’axe plus particulièrement sur le personnage de Red Robin. Tourné vers l’action, l’ensemble est assez plaisant, le premier numéro présentant les personnages et leurs pouvoirs afin d’arrêter un bus scolaire pris en otage par des mercenaires (oui ça peut sembler ridicule, mais ce sera « expliqué » lors de la conclusion). L’histoire se poursuit dans STAR Labs, où Red Robin s’infiltre et se conclut dans un huis-clôt qui s’annonçait parfait. Qui s’annonçait, oui. Mais manque malheureusement de pression de suspense, de tension. La peur, malgré l’enfermement, ne se fait pas ressentir. Robin ne se sent pas suffisamment en danger, et l’on ne le trouve aucunement en danger. Uniquement poursuivit par une menace qui paraît puissante, mais qu’il arrive à contrer bien trop facilement.

Le tout est centré sur l’action. Une série blockbuster à petit budget, avec encore une fois, du potentiel, mais mal exploité. On se trouve dans cet arc, plus dans des numéros qui auraient gagnés à lancer une série Red Robin, qu’une véritable série Teen Titans. La conclusion de cet arc permet une évolution de l’équipe. Un rattachement qui la rendrait plus officielle et supprimerait l’aspect Underground et indépendant qu’elle a depuis quelques années. C’est assez dommage, d’une part, mais cette évolution lui permettrait d’affronter des menaces d’une ampleur qui pourrait redonner à la série un certain intérêt et monter d’un cran dans le genre de comics d’action, puisque l’idée d’une équipe urbaine ne fonctionne pas, dans ces numéros (faut-il vraiment que je parle des précédents ?) .

Kenneth Rocafort est fidèle à lui-même. Un style très 90, des couleurs très claires, et beaucoup de nuances qui tendent vers le blanc. C’est un artiste qui régresse dans son style. Autant je le trouvais incroyable sur Reign of Doomsday ou ses numéros de H’el on Earth, autant sur cette série, j’ai comme l’impression qu’il cherche seulement à terminer son travail au plus vite. Son défaut majeur a toujours été les éléments de décor. Et de plus en plus, je trouve qu’au lieu de combler ce manque de décor, il l’amplifie. Sa mise en page permet de toujours comprendre où l’on se situe, mais il m’est déjà arrivé de retourner une page en arrière pour comprendre où se trouvait ce personnage. Ce serait vraiment dommage que ce dessinateur, au style unique, cherche à s’autodétruire de cette manière en s’enfermant dans cette sorte de syndrome à la Rob Liefield. Syndrome étant celui du : Le décor ça sert à rien, alors je ne dessine que les personnages. Pourtant le premier numéro était sacrément beau. Même si je lui reprochais le temps qu’il prenait à rendre ses planches, j’aurais préféré qu’il se concentre sur un arc, mais qu’il le fasse bien. Il est possible qu’un artiste manque de temps, mais c’est pénible de ne voir qu’un seul numéro fini sur les trois.

Avant d’attaquer le second arc, je tiens à revenir sur l’apparence de Raven. Je sais que « Raven » veut dire Corbeau, mais ça reste une appellation, un nom. Pourquoi rapprocher le personnage de l’animal avec lequel elle n’a de similitude qu’avec le thème de la mort et du mythe. Le personnage de Raven a perdu énormément. D’autant plus que je n’arrive pas à m’empêcher de le comparer à ce qu’à fait Johns sur le personnage. Dès les premiers arcs, il a su la rendre intéressante, alors que je n’avais rien qui me poussait à l’apprécier. Elle est ici, complétement vide, en plus d’être moche. Oui, c’est direct, mais il est difficile de cacher ce genre de chose. On retombe dans le côté sombre des années 90, en cherchant à faire pire que ce qui a pu se faire en terme de design.

Second arc ! Et ça me fait un peu mal de l’admettre, mais j’ai préféré les planches de Scott Hepburn à celles de Rocafort. C’est douloureux, sachant à quel point il peut être talentueux, mais en plus de cette impression que me laissait le premier arc avec ses planches quasi-vides, j’ai été surpris de voir des immeubles, et un changement radical de style. Scott Hepburn adopte un style assez proche d’un cartoon, avec peu de détails au niveau des visages. Épuré, coloré, c’est un style auquel j’adhère complétement. Les mots venant à la vue de ces pages étaient simples : Jeune, Nouveau, Espoir. Espoir pour la suite. Teen Titans a trouvé son dessinateur. Un jeune talent qui sera malheureusement vite oublié après ces deux épisodes, un espoir très bref au final. Triste gâchis.

Positivons et profitons donc de ces deux épisodes ! Tout a déjà été dit. Pfeifer commet une nouvelle fois ses erreurs. Une caractérisation absente, l’équipe est une seule et même personne, un seul et même avis dont Robin, enfin Red Robin, ou plutôt ce qu’il en reste (R.I.P. le Red Robin de Yost), décide des directives de l’équipe et perd toute crédibilité dans ses doutes. L’étoffe de chef qu’il avait, de jeune prodige, de génie, d’un Batman 2.0, est réduite à néant. En dehors de cela, si l’on oublie l’identité de chaque membre de l’équipe, et si l’on arrive à se dire qu’aucun d’entre eux n’est capable de ressentir quoi que ce soit, en dehors de Wonder Girl qui est plus une pseudo-star pour adolescente que l’amazone qu’elle est censée représenter, Will Pfeifer fait preuve d’un immense ingéniosité et d’un talent d’originalité incroyable en terme de création de menace : des étudiants cherchant à se droguer prennent des comprimés volés chez STAR Labs pour avoir des super-pouvoirs et n’ont qu’un seul objectif, détruire et se cogner dessus mutuellement. Adieu toute forme d’intelligence, et bonjour le stéréotype de « fils de bourges sans conscience ». J’ai sans aucun doute l’envie d’être méchant avec Will Pfeifer, et cette envie est d’autant plus grande qu’il n’est pas dénué de talent. Il suffit d’avoir lu son run sur la série Aquaman pour voir que ce type est loin de ne pas savoir donner vie à un personnage. Mais je commence à croire qu’autant il est capable de s’occuper d’une série n’ayant qu’un personnage à approfondir et une intrigue à faire évoluer, autant une équipe peut être plus complexe.

Une bonne introduction, permettant à tout nouveau lecteur de débuter par cette série, et d’oublier la précédente aux autres. Seulement, il vaudrait mieux pour les nouveaux lecteurs d’être orientés vers une série plus prometteuse, car même si ce premier album est assez prometteur, il est peu probable que le suivant élève le niveau encore assez bas de la série. Will Pfeifer est loin d’être celui qui redonnera au titre Teen Titans ses lettres de noblesse, mais le sort légèrement de la merde dans laquelle elle s’était fourrée.