Review VO – Martian Manhunter #1

Critique de Martian Manhunter #1 (2015)
Les points positifs :
  • Retcon probable sur ses origines New 52
  • Maîtrise d’un personnage difficile
  • Intrigant
Les points négatifs :
  • Démarrage somme toute traditionnel
  • À priori, une menace pas bien neuve
  • On en a peu sous la dent

« …I am not a superhero. I am martian. » – J’onn J’onzz


  • Scénario : Rob Williams – Dessin : Eddy Barrows – Couleur : Gabe Eltaeb

Parmi les titres lancés dans le cadre de l’opération DC You, cette série Martian Manhunter a quelque chose de frais à plusieurs égards. Elle amène tout d’abord du sang neuf dans l’écurie DC, puisqu’il s’agit du premier travail de Rob Williams au sein de l’éditeur (si on met de côté son récent The Royals, mais c’était chez Vertigo). Le Britannique – rien qu’à la mention de cette nationalité ça annonce du bon – s’est jusqu’alors surtout fait connaître pour ses histoires au sein du magazine 2000 A.D., et on est curieux de voir ce qu’il vaut aux commandes de super-héros. Même si, comme il l’indique dans ce single, le Martian Manhunter n’est pas, à proprement parler, un super-héros. Cette série est également fraîche dans le choix de son héros. En effet, les diverses tentatives de donner à Martian Manhunter un univers solo se sont systématiquement soldées par des échecs, plus ou moins douloureux, et ce même lorsqu’il était en d’aussi bonnes mains que celles de John Ostrander. Son rattachement instinctif à la ligue lui a toujours nui, tout comme ses points communs avec Superman (alien, pouvoirs fantastiques, etc.). Chris de ComicsAlliance avait d’ailleurs fait un papier très intéressant sur la difficulté de faire tourner un titre solo autour de Martian Manhunter. La question du jour est donc la suivante : cette série lui donnera-t-elle tort ?

Dans une maison abandonnée, un être étrange au visage dissimulé dort. Quelques enfants l’approchent, pleins de bonnes intentions, pour lui donner des biscuits. Comment va-t-il réagir ? Est-il un gentil, ou un méchant ? Parallèlement – peut-être dans le passé – J’onn J’onzz sauve un avion en perdition du désastre. Mais cette catastrophe, évitée de justesse, cache quelque chose de plus louche, tandis que la Terre semble sur le point de sombrer dans le chaos…

Il y a pas mal de mystère dans ce premier numéro. Le personnage sur lequel s’ouvre et se conclut le récit tout d’abord : qui est cet étrange personnage aux proportions difformes ? Les soupçons se portent naturellement vers le Martian Manhunter, auquel cas on pourrait voir dans son penchant pour les cookies un clin d’œil sympathique à sa passion pour les Oreos remontant aux belles années de la Justice League International. Mais ça ne répond pas à toutes les questions : pourquoi reste-t-il dans ce taudis ? Pourquoi dissimule-t-il son visage ? Pourquoi ne prête-t-il pas à son corps des proportions normales ? Aurait-il perdu la mémoire ? Pourquoi ? Il y a quelque chose de très intrigant dans cette situation, et d’assez savoureux, le single ayant la bonne idée de ne donner aucune réponse à ce sujet, trahissant l’intention de l’auteur de prendre son temps et de ne pas chercher à tout prix à épater le lecteur à chaque numéro.

Le reste de l’intrigue, bien que ce ne soit pas mentionné explicitement, se déroule probablement antérieurement à l’arrivée de J’onn dans cette demeure délabrée, puisqu’on l’y voit avec son costume traditionnel faire face à un menace qui se dessine gentiment, d’ampleur mondiale, que J’onn J’onzz découvre inopinément en sauvant un avion d’un crash. Le crash d’avion évité est une image qu’on associe très facilement à Superman ; toutefois ici l’auteur a la bonne idée de pousser son héros, après que celui-ci eut tenté de récupérer l’avion de manière traditionnelle en le soutenant depuis son ventre (à la Superman pourrait-on dire), à faire usage des pouvoirs qui le distinguent justement de Superman pour empêcher le désastre, lors d’une scène proprement spectaculaire, de celle qui suscite de la sympathie pour le Martian Manhunter puisqu’elle souligne en quoi il est différent des autres héros. Nous n’en dirons pas plus pour pas amoindrir le plaisir de découvrir la planche en tournant la page, mais elle évoque la scène où Martian Manhunter s’en prend à Ultraman dans le JLA : Earth-2 (Justice League : L’Autre Terre) de Grant Morrison.

De fait, le Martian Manhunter ne prend pas tellement de place dans ce numéro, sans que ce retrait amoindrisse le plaisir de la lecture d’ailleurs. Mais Rob Williams parvient en très peu de cases à faire un portrait juste du personnage. Un caméo de la Justice League sert à montrer son attachement historique à la team, en faisant traditionnellement le seul membre à ne pas avoir de vie en-dehors de la Ligue ; la réaction apeuré d’un jeune passager de l’avion qu’il a sauvé montre que s’il sauve des avions comme d’autres super-héros, il n’inspire pas aux gens la même confiance, parce que, contrairement à Superman, alien oui, mais d’apparence humaine et élevé au Texas, tandis que J’onn lui n’est arrivé qu’à l’âge adulte sur Terre et ne manque jamais de se sentir comme un ‘stranger in a strange land‘. Métaphore géniale ou accidentelle, lors du sauvetage de l’avion, Rob Williams fait arriver le Martian Manhunter, non pas depuis le sol, mais depuis le ciel au-dessus de l’avion, une manière subtile de rappeler, encore une fois, qu’il n’appartient pas à cette planète ?

Autre point positif, Rob Williams procède une retcon immédiate sur le personnage, qui apprend qu’il n’est pas ce qu’il croyait être, effaçant négligemment et sans pitié le calamiteux travail de réécriture qu’avait opéré Matt Kindt sur les origines du Martien dans les back-ups du titre Justice League of America. Autant je ne suis pas un fanatique de la retcon facile, autant j’attendais avec impatience que quelqu’un reprenne les choses en main avec le Martian Manhunter pour le sortir de ce rôle de grosse brute qui se dessinait dans sa genèse présentée par Matt KindtRob Williams n’en dit ici pas trop, mais semble ne pas vouloir revenir bêtement à ce qu’avait accompli John Ostrander sur son long run à la fin des années nonante. Faute de matière, on ne saurait juger de la qualité de la nouvelle direction que le personnage s’apprête à prendre, mais rien que pour avoir osé lui donner une nouvelle direction, on peut saluer l’effort de Rob Williams.

Le seul défaut majeur de ce single, c’est la manière convenue dont il lance son intrigue à partir d’une menace d’envergure, et deuxièmement la nature même de cette menace, qui semble faire intervenir des ennemis que les fans du Martian Manhunter et de sa mythologie connaissent bien. C’est sympathique de se retrouver en terrain connu et de constater que Rob Williams n’ignore pas ce qui a été fait avant les New 52, mais d’un autre côté, la mythologie du Martian Manhunter est tellement maigre qu’elle aurait gagné à voir émerger un adversaire neuf. Là encore, difficile de rendre un jugement définitif, Rob Williams sera peut-être capable de surprendre les lecteurs avec la manière dont il mettra en scène les dangers qui se dessinent.

La partie graphique s’en sort bien. Les planches d’Eddy Barrows, que vous avez peut-être croisées dans les pages de 52 ou des Teen Titans, sont belles, bien que rarement estomaquantes. On en retient tout de même quelques compositions de page audacieuses, probablement inspirées par les délires de J. H. Williams III dans leur façon d’utiliser des éléments d’une case pour séparer ses voisines sur la même page. La colorisation est également agréable, profitant des changements d’environnements (intérieur, extérieur de nuit, Doubaï, …) pour justifier une variété de tons agréable, et le coloriste marie aussi avec goût tons chauds et froids lors d’une jolie scène nocturne où l’uniformité de l’obscurité est ébranlée par une explosion de flammes.

Ce premier numéro laisse un goût plutôt positif, et parvient à soulever plus de questions qu’il ne donne de réponses, laissant les lecteurs sur une sensation de soif pas désagréable. On attend de voir la suite, et nos attentes se confirmer ou être déçues, pour se prononcer avec fermeté sur le potentiel de ce nouveau scénariste, néanmoins il y a ici quelques signes encourageants qui laissent espérer que la collaboration entre DC et ce Britannique ne se limite pas à cette nouvelle série.

En passant par les liens affiliés BDfugue/FNAC/autres présents sur le site, DCPlanet.fr reçoit une faible commission. Qu’importe le montant de votre panier, vous nous aidez ainsi gratuitement à payer l’hébergement, modules, et autres investissements pour ce projet.

TheRiddler

TheRiddler

DC Comics : L'Encyclopédie (mise à jour et augmentée) / Edition augmentée

DC Comics : L'Encyclopédie (mise à jour et augmentée) / Edition augmentée

amazon
Voir l'offre
Patientez... Nous cherchons le prix de ce produit sur d'autres sites

À lire aussi

Shazam : La Rage Des Dieux [4K Ultra HD - Edition boîtier SteelBook]

Shazam : La Rage Des Dieux [4K Ultra HD - Edition boîtier SteelBook]

amazon
Voir l'offre
Patientez... Nous cherchons le prix de ce produit sur d'autres sites

Rejoignez la discussion

S’abonner
Notification pour
guest
5 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Flycatcher
Flycatcher
8 années il y a

J’ai trouvé ce premier numéro hyper naze, facilement ce qu’ai lu de pire depuis longtemps :)
Les premières pages démarraient pourtant plutôt bien avec ce que j’ai cru comprendre être une espèce de flashback nous dévoilant l’arrivée du Martian Manhuter sur Terre et ses premières interactions avec des êtres humains. Un moment plaisant à la lecture et réussi, à la fois sensible mais également inquiétant par certains aspects.

Puis tout se gâte lorsqu’on en vient à développer le fil rouge éculé de l’intrigue sur l’invasion des Martiens Blancs : on nage en permanence dans de l’auto-apitoiement qui donne lieu à des scènes ridicules (celle du face à face avec le gamin après le crash de l’avion, je ne sais pas s’il est possible de faire pire en terme d’écriture…). Quant aux passages clichés à souhait qui mettent en relief l’invasion secrète des aliens, je n’espère qu’une chose, que le scénariste renouvelle très rapidement ses inspirations afin de faire preuve d’un minimum de subtilité, de suspense et de mise en tension pour la suite. Trois caractères indispensables à ce type de récit, pour l’heure inexistants…

Winterwing
8 années il y a

J’ai plutôt bien aimé ! Beaucoup d’éléments étaient très classiques, limite clichés (la scène de l’avion, la menace, les thèmes évoqués, le cliffhanger de J’onn) mais ça ne signifie pas que c’était mal fait pour autant. Étant donné que ça fait un moment maintenant que J’onn a pas eu ses aventures solos ou qu’un titre JL a pas eu un arc tournant autour de sa mythologie, c’est normal qu’on ait droit à quelques classiques du personnage pour ce premier arc.
Pour les planches, bah c’était Eddy Barrows, donc beau mais très classique, quoique j’ai noté quelques découpages intéressants au cours de ce numéro.

Flycatcher
Flycatcher
8 années il y a

Désolé mais le coup du « Je ne suis pas un monstre ! »dixit le gentil martien avec des yeux de biches… My God, j’ai eu envie d’aller me pendre ^^’ Ca passe pas, le Martian Manhunter mérite un meilleur traitement.
Le bon point avec les Martiens Blancs en revanche, c’est que l’intrigue est une occasion de ramener Megan, et ça peut être cool.

DC Universe FRA

Rejoignez la première et la plus grande communauté non officielle DC Comics Francophone et participez aux discussions Comics, Films, Séries TV, Jeux Vidéos de l’Univers DC sur notre Forum et serveur Discord.

superman
5
0
Rejoignez la discussion!x