Showcase #64 – Crisis On Infinite Earths #1

« We spent a lifetime terrorizing this world, yet our last moments alive are spent trying to save it. » Ultraman

Convergence oblige, nous profitons de la rubrique Showcase pour revenir brièvement sur le premier numéro de Crisis On Infinite Earths. C’est clair, Crisis On Infinite Earths a peu de chances d’égaler en ampleur et en qualité le superbe Convergence, désigné comme, je cite, « l’event le plus important de toute l’histoire de DC Comics », mais à l’époque, c’était une première, et pour une première, c’en était une belle.

Pour permettre aux nouveaux lecteurs de rejoindre leurs publications sans être étourdis par la profusion de terres parallèles, DC Comics avait en effet décidé, pour la première fois, de faire converger tous ses personnages vers une autre planète flambant neuve au moyen d’un event cataclysmique qui explorait toutes les possibilités d’un univers construit lentement durant des décennies. Ils confièrent cette lourde tâche au duo créatif qui s’occupait de leur best-seller de l’époque, les New Teen TitansMarv Wolfman et George Pérez. Savaient-ils, en s’attelant à ce laborieux projet, qu’ils s’apprêtaient à marquer l’histoire de DC Comics, et celle des comics en général ?


Crisis On Infinite Earths commence par la destruction de Terre-3. Que vous ayez vu le film d’animation Crisis On Two Earths, que vous ayez lu l’excellent JLA : Earth-2 de Grant Morrison et Frank Quitely (publié chez Urban sous le titre de Justice League : L’Autre Terre), ou que vous soyez passés plus récemment à travers Forever Evil, vous vous êtes probablement déjà familiarisés à cette terre alternative où la Justice League est remplacée par des versions maléfiques de ses membres. Ainsi, en lieu et place de Superman, BatmanWonder WomanGreen Lantern et Flash, c’est UltramanOwlmanSuperwomanPower Ring et Johnny Quick forment le Syndicat du Crime. On les voit lutter face à l’inévitable avec l’énergie du désespoir pour empêcher leur planète d’être anéantie par un vide immaculé qui l’avale implacablement. Impuissants face à ce désastre, ils périssent un à un, incapables de sauver une planète qu’ils avaient tyrannisée durant tant d’années, tout ça sous le regard passif d’un mystérieux personnage : le Pariah.

Cette introduction est merveilleuse à de nombreux niveaux. Elle montre tout d’abord que l’event qui s’apprête à démarrer n’a que faire des querelles intestines entre les personnages du DC Universe : bons ou méchants, tout le monde est menacé par le cataclysme qui se prépare, et c’est particulièrement poignant de voir ces vilains absolus endosser bon gré mal gré le rôle de justiciers dans leurs dernières heures. C’est aussi une manière de faire référence à une des toutes premières Crisis, la Crisis On Earth-3  du Justice League of America #29  – la troisième si on compte le Flash of Two Worlds et le Crisis On Earth-Two. En arrière-plan, on assiste aux efforts du Lex Luthor de cette Terre, d’alignement bon, tenter de sauver son fils en le plaçant dans une navette de sauvetage. Le miroir aux origines de Superman est particulièrement savoureux s’agissant d’une version déformée de sa némesis absolue ; la scène est d’autant plus intéressante que ce fils s’en sortira bel et bien, et non seulement il tiendra un rôle non négligeable dans Crisis On Infinite Earths, mais en plus l’histoire le retiendra tristement pour ses actions au cours de Infinite Crisis, bien des années plus tard.

Après avoir présenté le Pariah, personnage tragique nouvellement introduit ici dont votre humble serviteur est personnellement un grand fan, les auteurs présentent aux lecteurs angoissés le personnage du Harbringer, que Semic avait traduit par L’Avant-Courrier. Dépêchée par une entité mystérieuse, dont l’identité est dévoilée sur l’ultime page de ce numéro, elle va sommer un à un des personnages du DC Universe afin de les convier dans le satellite de la mystérieuse entité – bon ok je vous dis qui c’est cette entité : c’est le Monitor. À travers ces convocations successives, Marv Wolfman et George Pérez affirment d’emblée leur intention d’impliquer tous les recoins du DC Universe, en piochant sur des terres différentes et des époques différentes. Ils décident ainsi volontairement d’ignorer ses têtes d’affiche pour se pencher sur des figures plus undergrounds. C’est comme ça qu’on voit des types qui rien ne liait de prime abord contraints à coopérer pour survivre : Dawnstar de la Légion des Super-Héros dans le futur qui s’oppose à Arion ramené de la préhistoire, Firebrand de l’All-Star Squadron convoquée depuis Terre-2 et le Blue Beetle du roster rapatrié de Charlton ComicsSuperman de Terre-2, des créations de Marv Wolfman et George Pérez comme Cyborg ou Psimon, le vieil ennemi des Teen Titans, mais aussi Obsidian, le Dr PolarisSolivar – impliquer le gorille est une manière de souligner que ce n’est pas la seule humanité qui est menacée mais l’existence toute entière – ou encore Geo-Force des Outsiders. Enfin, le terrible Psycho-Pirate, qui, lui aussi, joue un rôle crucial dans les événements à venir !

Vous l’aurez compris, on tient dans ce premier numéro une team plutôt hétéroclite et c’est un aspect qui pourra facilement désarçonner les néophytes, car si certains de ses personnages comme Cyborg sont depuis largement passés à la postérité, d’autres comme Firebrand ou Obsidian n’ont jamais  vraiment dominé les couvertures d’une série. À noter toutefois qu’en brassant encore plus de personnages par la suite, les auteurs en viennent à des figures plus célèbres, citons notamment Barry Allen dont le nom est souvent associé à Crisis On Infinite Earths à cause du destin tragique qui lui y fut réservé.

Vraiment, ce premier numéro, et l’event en général, recèle vraiment un caractère historique, car c’est un des premiers events à toucher de manière aussi prégnante l’intégralité des titres estampillés DC. Maintenant, on conçoit difficilement un event sans changement renversant de statu-quo et impact sur toutes les séries, mais à l’époque c’était du jamais vu et on peut dire sans trop s’avancer que, sans Crisis On Infinite Earths, il n’y aurait eu ni DC One Million, ni Infinite Crisis (elle était facile), ni Flashpoint, ni même Forever Evil ou Blackest Night. C’est réellement Crisis On Infinite Earths, et le succès qu’il connut, qui lança, chez DC comme chez Marvel, cette mode des events d’ampleur dantesque à répétition.

Crisis On Infinite Earths servait également de ‘conclusion’ au DC Universe. Mais alors qu’il a la tâche de constituer sa veillée funèbre, Crisis On Infinite Earths célèbre paradoxalement cet univers en jouant de toutes ses déclinaisons, des plus inattendues aux plus emblématiques, rassemblées en une seule et même histoire. C’est une démarche qui fut souvent répétée par la suite, Infinite Crisis alla peut-être même encore plus loin. Mais ici, autant par leurs ambitions de pionniers que par le soin qu’ils accordaient à chaque élément, aussi anecdotique soit-il, Marv Wolfman et George Pérez ont institué une référence dans la manière de gérer un event d’une telle ampleur. Notons d’ailleurs que cet event avait été teasé depuis de longs mois dans les pages de diverses publications de DC ; encore une fois c’est une démarche qui est aujourd’hui largement utilisée.

Autant pour son exécution exemplaire que pour son importance historique, tout amateur de DC Comics finira par passer par Crisis On Infinite  Earths, et on trouve déjà dans ce premier numéro les germes des qualités qui le parcourront jusqu’à sa conclusion : une exploitation minutieuse des recoins du DC Universe et un souffle épique doublé d’une appréhension terrible face à cette mystérieuse menace. Un peu comme pour Convergence, quoi.

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Leonidas
8 années il y a

Un de mes premiers comics !

Vittorini
8 années il y a

Comme Leonidas, ma première lecture DC (lu dans le désordre, DCP et Internet n’étant pas accessibles, je n’ai pas pu demander si le #1 était un bon point d’entrée). L’introduction sur Earth-3 est toujours aussi excellente, il y a quelque chose d’assez admirable de reconnaître des caractéristiques inhérentes à Superman et Ultraman et en même temps cette fin est aussi tragique qu’ironique. Quant au reste de l’event les dessins sont spectaculaires et le principe même de proposer au lecteur une aventure où il peut croiser plus de 4 Superman différents reste incroyablement jouissif. De l’héroïsme pur du début à la fin, des morts vraiment marquantes (Supergirl qui passe à un cheveux de sauver tout le DCU !), ça reste LE crossover de référence.

A ce sujet, en francophonie, on a pas mal d’articles de qualité. Neault a, comme à son habitude, rédigé un article très intéressant sur COIE et le crossover en général (que je ne retrouve plus, bien évidemment) et il me semble que sur Buzz comics, un dossier assez conséquent avait été rédigé par un des membres (que je ne retrouve plus non plus ^^).

Bref, merci pour cette sympathique virée dans COIE #1 qui a le mérite de remettre à sa place un event qu’on a trop tendance à placer au-dessus du très sous-estimé Convergence.

Vinylien
Vinylien
8 années il y a

Est-ce que « Crisis On Infinite Earth » est sortit en France ? Urban comptent ils le sortir un jour ?

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