[Review VO] The Kitchen #1

Les points positifs : Un pitch sympa Girl Powa ! Très chouette graphiquement Les points négatifs : [list] Trop décompressé… … et du coup trop introductif

Kath knew she’d fucked up, but she didn’t care.

• Scénario : Ollie Masters – Dessins : Ming Doyle  – Couleurs : Jordie Bellaire – Couverture : Becky Cloonan
  

• Vertigo – The Kitchen #1 – 32 pages – 2,99$ – 12 novembre 2014

Vertigo nous propose en cette fin d’année une nouvelle mini-série en huit numéros qui sent bon le polar et les effluves de film noir. Bienvenue dans la cuisine de l’enfer ! The Kitchen, c’est le surnom donné au Casey’s Bar, un bar que trois mafiosos (dont Johny) utilisent pour planquer l’argent qu’ils se font illégalement. C’est la situation qu’on nous explique rapidement, puisque tout va dégénérer avec l’arrestation de ce fameux Johny et de deux de ses acolytes (parce que bon, se mettre à trois pour rouster un type dans la rue, c’est un peu répréhensible m’voyez), et ça laisse comme qui dirait un certain vide. Surtout que les types chargés de reprendre le business se font un peu avoir, puisque ceux chez qui ils doivent récolter l’argent régulièrement se permettent de leur donner moins que ce qu’ils doivent. Et ça, en matière de respect dans ce milieu, autant vous dire que ça craint. Du coup, ce sont les femmes de Johny et ses partenaires qui vont se décider à prendre les choses en main. Après tout, vu la réputation de leurs maris, elles devraient pouvoir s’imposer facilement, non ?

C’est là le double-sens du titre de cette mini-série puisque la « cuisine » renvoie également à la place qu’occupent, je dirais « traditionnellement », les femmes au foyer américaines de l’époque. Mais comme le dit la tag-line, à New-York, le respect ne se gagne pas chez soi, mais dans la rue. Et ces trois femmes donc de sortir de la Kitchen pour aller gagner leur propre respect, et de s’émanciper dans un monde où ce sont les hommes qui font leur loi. Un combat motivé par Kath, la leader de ce petit groupe, au caractère fort, très trempé, et qui va aller au-delà des difficultés pour s’imposer – et s’attirer forcément des ennuis. Ollie Masters nous dépeint bien la difficulté pour ces femmes de s’affirmer en tant que tel. Premièrement, on voit un certain manque de reconnaissance en elles puisqu’elles s’identifient d’abord comme les « femmes de leurs maris », et utilisent cet argument pour se faire valoir, au début – mais elles se rendront vite compte que ça ne suffit pas. Le machisme ambiant dans les rues est là, difficile à combattre, et Kath va l’apprendre à ses dépends. Mais comme je vous l’ai dit, elle est très forte de caractère, et comprend très vite de quelle façon elle devra gagner le respect des autres.

D’ailleurs, si vous n’aimez pas trop la violence (faites aux femmes ou aux hommes), soyez prévenus que ça démarre assez fort dans ce numéro, même si c’est justifié par le scénario. Et l’action de Kath a quelque chose d’assez salvateur, et pour le personnage, et pour le lecteur, rappelant le sentiment qu’on peut avoir devant un vieux « rape & revenge » comme I spit on your grave, où on jubile de voir la victime se transformer en bourreau. Graphiquement aussi, le titre tient correctement la route avec Ming Doyle. Les personnages sont très expressifs et leurs émotions se lisent littéralement sur leurs visages. Avec l’aide de la colorisation, il y a une certaine ambiance qui se dégage des planches et si les décors pourraient être un peu plus soignés par moments (de même que certains visages, pour tout vous dire), le travail réalisé est très appréciable. Le découpage des planches est très classique, pas de surprises de ce côté là, mais la mise en scène est bien pensée et se veut assez cinématographique. Le revers de cet aspect c’est qu’en à peine vingt pages, Masters prend trop de place pour pouvoir réellement développer quelque chose. Certes, il y a un léger cliffhanger, et certes le récit est prenant, mais du coup on arrive à la fin et on s’étonne d’y être déjà arrivé. Certaines scènes prennent beaucoup de place car dépeintes assez longuement, et le sentiment d’avoir à peine démarré l’histoire m’a laissé un peu frustré. Comme souvent avec Vertigo récemment, j’ai l’impression d’avoir affaire à quelque chose qui s’appréciera beaucoup plus une fois le TPB sorti, surtout si le rythme reste décompressé de la sorte.

The Kitchen donne envie d’en lire plus. Le pitch de vouloir mettre un trio de femmes en avant dans un milieu et une société où elles étaient reléguées à leur statut de femme au foyer, et de les voir vouloir s’imposer dans la rue : je suis preneur, clairement. D’autant que le récit s’annonce assez brut, même si cette première partie est trop introductive. Servi par des dessins très appréciables, je pourrais vous conseiller de vous laisser tenter si vous en avez les moyens, mais en toute honnêteté, je vous conseillerais également d’attendre le TPB pour tout lire d’un coup. Faites votre choix.