[Review VO] Worlds’ Finest Vol. 1

Les points positifs : Artistiquement très réussi Deux héroïnes fortes Les liens avec Earth 2 Ambiance légère et optimiste Les points négatifs : Un vilain anecdotique Quelques pistes inexplorées

« And I think we’re going to be friends forever. » – Helena Wayne

• Scénario : Paul Levitz – Dessins : George Pérez, Kevin Maguire, Scott Koblish, Wes Craig, Jerry Ordway, Serge LaPointe – Couleurs : Hi-Fi, Rosemary Cheetham – Couverture : George Pérez

• DC Comics – Worlds’ Finest Vol 1 : The Lost Daughters of Earth 2 – Contient : Worlds’ Finest #0-5 – 10 Avril 2013 – Softcover – 144 pages – 14,99$

Lorsque DC Comics a décidé de relauncher/rebooter tout son univers avec les New 52, le postulat était ainsi : toutes les séries publiées se déroulent sur la même Terre, qu’on appellera Prime Earth par la suite. Pour un souci de simplicité, l’univers des New 52 est uniforme, et l’idée même de Multiverse, qui fait pourtant l’essence du DCU, n’était pas évoquée (ou peut-être un peu, je n’ai pas lu toutes les séries à l’époque). Pourtant, quelques mois après ce lancement arrive une « seconde vague » de titres qui fait suite à l’annulation des séries qui se vendent le moins. Et parmi ces nouveaux titres, deux attirent particulièrement l’attention des lecteurs : Earth 2 et Worlds’ Finest. Et pour une raison toute simple : on apprend en effet que le Multiverse n’est pas vraiment mort, avec cette terre parallèle qui fait ses débuts. Et pour Worlds’ Finest, nous allons donc suivre le destin des Robin et Supergirl de cette Terre 2, qui vont débarquer sur Earth-0 après de malheureux évènements.

Le numéro #0 de la série qui ouvre ce recueil est la parfaite introduction pour présenter les deux personnages principaux et ce qui les différencie de leurs équivalents sur Earth-0. Robin, de son vrai nom Helena Wayne, est la fille de Bruce Wayne et Selina Kyle, qui sont ici tous deux mariés, donc (oui parce que les enfants hors-mariage, non merci hein). De l’autre côté nous avons Supergirl, aussi Kara Zor-El qui est la cousine du Superman de cette Terre. Mais à l’inverse de celle qui passe son temps à geindre et s’énerver par delà le Multiverse, cette Supergirl s’entend très bien avec son cousin, qu’elle admire beaucoup, et démontre un enthousiasme très grand pour agir comme une héroïne. Le seul souci c’est que Kal-El la juge encore trop inexpérimentée et ne veut pas qu’elle subisse le même sort que sa femme Lois Lane, dont on apprend qu’elle est décédée (et lorsqu’on voit le sort réservé à Selina Kyle, on se dit que décidément, le mariage n’est effectivement pas le mot d’ordre dans les New 52 !). Il la considère de plus comme une arme secrète… contre Darkseid, dont l’ombre plane sans conteste dans ce numéro et le reste de la série, pour des raisons somme toutes évidentes, puisque c’est lors de l’attaque du Seigneur d’Apokolips que les deux héroïnes se retrouveront propulsées en dehors de leur monde. En attendant, ce numéro #0 permet de se familiariser avec ces deux héroïnes et de voir leur première rencontre, qui se fait alors qu’Helena est on ne peut plus fragile, ce qui amorcera le début d’une longue amitié.

Nous retrouverons ensuite Helena et Karen (comme elle se fait appeler) sur Earth 0, cinq ans après les évènements survenus sur Earth 2. Si Helena porte déjà le costume d’Huntress (repris en hommage à Helena Bertinelli d’Earth-2, qui est décédée), Karen ne s’est pas encore lancée de plein fouet dans une carrière super-héroïque. Nous voyons au travers de nombreux flashbacks tout au long du récit le parcours des deux jeunes femmes depuis leur arrivée sur Earth-0, il y a cinq ans, jusqu’à présent. L’une des motivations principales de nos héroïnes, c’est bien sûr de retourner chez elles (les pauvres ne sont pas au courant de la situation là-bas). et pour ce faire, Karen a décidé de se la jouer riche célébrité/femme d’affaires dont les fonds servent à financer de nombreux laboratoires de recherche, afin de développer des technologies capable de les ramener chez elles. Et malgré cette volonté de vouloir se faire discrète (elles ne veulent pas rencontrer les Batman et Superman de cette Terre, qui de toute façon n’est pas la leur ; il y a une forme de méfiance et/ou de rejet de ce monde dans lequel elles ont débarqué), le destin se rappellera à eux avec l’arrivée du gros vilain pas beau qui aura le malheur de s’en prendre à l’un des laboratoires de Karen. Un vilain qui prendra d’ailleurs les 3/4 de l’intrigue de ce tome, mais qui peine pourtant à beaucoup impressionner. Sa présence permet de soulever pas mal de questions aux héroïnes, et notamment le fait qu’il soit capable de blesser Karen les fait se demander s’il n’aurait pas un lien avec Apokolips.

C’est une question qui reviendra souvent hanter les deux héroïnes. Si cette Terre n’est pas la leur, elles sont persuadées d’une part, que quelqu’un ou quelque chose a traversé le portail avec elles il y a 5 ans (elles devraient avoir la réponse plus tard dans la série) ; et de l’autre cet ennemi, et tous leurs autres ennuis mènent à une légère psychose vis-à-vis de Darkseid et de ses envoyés. C’est d’ailleurs Helena qui doit calmer les craintes de Karen alors qu’elle ne cesse de dire que tout est lié à Apokolips. Mais malgré ces peurs qui reviennent souvent, le reste du tome offre une lecture assez légère (on est très loin du côté sombre qu’on peut avoir dans d’autres séries), empreinte d’un « girl power » (sans jeu de mots) pas désagréable du tout. Nous suivons Huntress et Power Girl dans leur combat contre le gros pas beau Hakkou mais également dans leurs vies civiles, l’occasion pour Levitz d’aborder les personnages avec un ton différent. On observe une Helena en effet assez réservée par rapport à l’extravertie Karen, qui de plus laisse sous-entendre à de multiples reprises qu’elle est une croqueuse d’hommes. La seule chose qui m’aura chiffonné dans la lecture c’est un léger manque d’ambition dans l’histoire présente (les flashbacks apportent ce qu’il faut en terme de narration et de caractérisation). Hakkou n’est pas très impressionnant et au final on n’apprend très peu de choses sur le personnage, alors que certaines questions auraient dû trouver réponse… un peu comme si le vilain a été placé là juste pour qu’il y ait un vilain. Et si le dernier chapitre se conclut sur une note d’optimisme, on a quand même cette impression que le titre se cherche encore un peu. Gageons que Levitz saura corriger le tir dans les prochains numéros !

Concernant la partie artistique, ce premier tome est un petit délice pour les yeux, de par la présence des deux artistes principaux George Pérez (qu’on ne présente plus) et Kevin Maguire (idem). Les deux ont un style pourtant différent, le trait de Pérez étant plus affirmé, et les dessins plus détaillés, alors que Maguire donne une impression un peu plus épurée à ces personnages et décors (aidé par une colorisation qui transcende le tout), mais le fait que les artistes soient assignés à des périodes temporelles données permet aux deux de laisser aller à leurs différences de façon à ce que ça ne gâche pas la lecture, ou que ça en casse le rythme. Au contraire, en mêlant ces changements au procédé des flashbacks, ça harmonise le tout. Et que dire de ce #0 avec quelques planches absolument magnifiques, qui vous feront tomber amoureux des deux héroïnes instantanément. Chose assez amusante, le costume de Power Girl n’est pas le costume classique que l’on connaît, mais les artistes s’amusent constamment à le faire se déchirer en lambeaux à chaque combat, de façon à ce que l’héroïne soit quasiment dévêtue (ce que d’ailleurs ne manque pas de lui faire remarquer Huntress, comme si Levitz savait déjà qu’on pourrait le lui reprocher). Mais je crois savoir que le « vrai » costume reviendra bientôt dans la série… Sur le dernier chapitre, nous retrouvons également Jerry Ordway et Wes Craig qui illustrent chacun une partie consacrée à l’une des deux héroïnes. Là aussi, intégré comme cela à la narration le procédé n’est pas dérangeant quant à la rupture de ton qui est occasionnée par le changement d’artiste (et les deux se débrouillent assez bien, même si je préfère Maguire ou Pérez, évidemment).

Worlds’ Finest commence donc sur une bonne lancée, avec les origines des personnages et leur parcours sur Earth-0 fort bien exposé, une caractérisation qui permet de bien se familiariser avec Huntress et Power Girl et une équipe artistique de bonne qualité. On pourra simplement regretter un léger manque d’ambition pour le titre ou un vilain somme toute assez anecdotique, pour autant la lecture de ce premier tome est plaisante, il n’y a pas de raison pour ne pas essayer !