Off My Mind #13 : Green Arrow – qui a peur de Kreisberg ?

Les premiers rapprochements avec Arrow ?

Avant d’aborder le rapprochement du comics de la série tv, rappelons, même si c’est évident, qu’avant tout Arrow est une série tv qui est basée sur les comics, sur un personnage qui existait depuis des décennies et qui a autant de bouteilles en termes d’histoires. L’une des inspirations les plus évidentes de la série est certainement le Green Arrow : Year One d’Andy Diggle et Jock, notamment pour l’importance de l’île, sur laquelle se passe l’histoire, et qui est exploitée, bien que différemment, dans la série tv. C’est d’ailleurs sur ce passage sur l’île que Lemire va revenir dès son arrivée sur le titre, alors que ça n’avait été qu’abordé succinctement. On peut déjà se douter d’un rapprochement avec la série tv, même si Lemire fait bien plus que ça, parce que l’île est abordée au coeur d’une nouvelle histoire qui instaure une mythologie particulière autour de Green Arrow, quasi mystique, et que l’auteur prend soin en plus de ne pas renier tout ce qui avait été fait avant par Nocenti et ses collègues. Bien entendu, dès le premier numéro, il fait le ménage sur les éléments qu’il n’aimait pas, éliminant d’emblée Emerson (ancien ami de son père) et Jax (un de ses alliés qui s’occupe de lui fabriquer son équipement), d’une façon qui pousse à lancer l’histoire, tout en permettant à Lemire de faire intervenir un nouveau sidekick. Astucieux, et ce n’est pas fini, puisque l’auteur décidera également de donner à Oliver Queen une petite soeur (et accessoirement, révéler que son père n’est pas vraiment mort), et à lier tout ça à l’île. Preuve est que cet élément est central, et dans les premiers numéros de Lemire nous assistons à pas mal de sauts temporels, de flashbacks qui pourront rappeler ceux que l’on voit dans la série tv (vous pouvez toujours consulter la review de mon collègue Deiimo au cas où). Ce rapprochement vis-à-vis de ce run continue d’ailleurs à se faire (mais pas dans le sens que l’on croit !) puisqu’on a appris tout récemment que le personnage de Komodo, premier vilain dans le run de Lemire, sera porté dans la saison 3 d’Arrow ! Reste à savoir quels éléments du personnage seront conservés ou mis de côté (remarque, apporter l’aspect mythologique des Outsiders dans Arrow, si c’est bien fait, je ne dirais pas non !).

Le point que je veux avancer, c’est par rapport à la peur que certains ont lorsqu’ils entendent que Kreisberg veut ramener des éléments de la série tv dans le comics Green Arrow. Le truc, c’est que sous Lemire, ça a déjà été fait. Outre le fait d’avoir ramené l’île au centre de l’intrigue avec Komodo (et, dans une certaine prolongation, avec The Outsiders War), Lemire a également ramené le personnage de John Diggle. Pourtant, cette version n’a pas tellement de choses à voir au départ avec celui que l’on connaît de la série tv. Si on enlève la couleur de peau, le personnage n’est pas des plus ressemblants avec David Ramsey, et lorsqu’il revient on apprend qu’il était en premier lieu garde du corps de Moira Queen (et pas d’Oliver), et que c’est lors du Zero Year que les deux se sont rencontrés. Pendant toute la durée du run de Lemire, Diggle sera vu comme un ancien allié de Green Arrow (officiant avec lui lors de cette trouble période où Arsenal opérait également avec lui) qui revient, petit à petit, sur le devant de la scène. Il fait à nouveau partie intégrante de l’équipe, et se rapproche en cela plus de son statut dans la série tv, lors de Green Arrow #34, qui signe la fin du run « standard » de Lemire. Ramener donc un ou plusieurs éléments présents dans un média vers un autre n’est donc pas forcément une mauvaise chose, du moment que la façon dont c’est fait soit correctement exécutée ; comme on peut voir que Lemire a pu les intégrer dans son run tout en apportant sa propre touche. Au final, c’est simplement là la force d’un bon auteur.

Mais comme toute bonne chose a une fin, Lemire et Sorrentino ont estimé qu’ils avaient fait le tour de ce qu’ils avaient à raconter et donc de laisser leur place à d’autres. On peut comprendre la frustration, car il est vrai que la mythologie instaurée par les deux donne à être d’avantage exploitée… Mais si des auteurs disent qu’ils n’ont plus rien à raconter (c’est ce qu’ils ont déclaré, à vous de les croire ou pas), ne vaut-il pas mieux les laisser partir plutôt qu’ils s’embourbent ? On a eu le même cas de figure avec Flash et il me semble que les deux équipes créatives (Venditti et Booth sur The Flash et Manapul et Buccellato sur Detective Comics) ne s’en sortent pas trop mal…

Je voudrais également mentionner les chiffres de vente du comics sous l’égide de cette équipe créative. L’arrivée de Lemire et Sorrentino sur Green Arrow #17 a propulsé les ventes du numéro jusqu’à 38k exemplaires. Des chiffres qui sont tout de même à relativiser car le dit numéro s’était orné de deux variantes, dont une « We Can Be Heroes » qui est très populaire outre Atlantique. Toujours est-il que par après, Lemire a réussi à stabiliser les ventes de la série pendant quelques mois, oscillant entre les 25 et 29 000, puis a légèrement chuté avec des ventes à 23 000 exemplaires stables sur les 5 derniers mois (Juillet exclu, je n’ai pas encore les chiffres). Une performance tout à fait honorable comparée aux chutes régulières dues à Nocenti, mais lorsqu’on entend à quel point la série a été encensée pour ses qualités, on aurait pu s’attendre à ce qu’elle dépasse ou reste plus proche des 30k que de la dizaine d’en dessous. Après je suis pas expert en analyse de chiffres non plus, et je suis le premier à dire que c’est pas parce qu’un truc se vend que c’est forcément bien, ou vice versa…

En tout cas, malgré le succès du comic, et celui de la série tv, on ne peut pas vraiment faire de relation entre les deux. Serait-ce pour cela qu’Andrew Kreisberg et Solokowski arriveraient sur le titre ? Ils ont bien sûr parlé du fait de faire « un pont » entre les deux médias, mais soyons sérieux deux secondes. Vous croyez vraiment que ceux qui regardent la série tv (on parle de millions de personnes) vont se mettre à lire du Green Arrow sous prétexte que les mecs derrière la série tv sont à l’écriture ? Bien sûr, il pourrait y avoir quelques curieux, mais à mon sens rien qui pourrait faire pencher vraiment la balance dans le bon sens. J’en veux pour preuve un exemple personnel très simple. Ma soeur regarde Arrow depuis ses débuts, et je sais qu’elle apprécie beaucoup. Je lui ai donc dit un jour, « ha ben tu sais que y a deux scénaristes d’Arrow qui vont écrire la bd dont c’est inspiré ? » et de lui demander si ça la motiverait à la lire. La réponse était implacable : non. Et je crois qu’une majorité de l’audimat de la CW n’en a pas grand chose à faire, un peu comme elle. Et c’est pas grave, on a le même phénomène avec les films, qui attirent des millions de gens dans les salles, mais qui ne font pas forcément exploser les ventes de comics… Bon, mais pour en revenir aux histoires d’éléments repris entre médias, ce n’est clairement pas la première fois qu’il y a des échanges entre le milieu des comics et de leurs adaptations (on ne citera que Batgirl ou Harley Quinn comme exemples, ou à l’inverse Geoff Johns qui débarque sur la série tv The Flash), alors pourquoi avoir peur d’Arrow ?